Fiche du document numéro 26117

Num
26117
Date
Dimanche Mars 2009
Amj
Auteur
Taille
328349
Titre
Le génocide rwandais et la politique israélienne
Nom cité
Type
Article de revue
Langue
FR
Citation
LE GÉNOCIDE RWANDAIS ET LA POLITIQUE ISRAÉLIENNE
Yaïr Auron, traduit de l’anglais par Dalit Lahav
Mémorial de la Shoah | « Revue d’Histoire de la Shoah »
2009/1 N° 190 | pages 225 à 240

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ISSN 2111-885X
ISBN 9782952440981

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LE GÉNOCIDE RWANDAIS
ET LA POLITIQUE ISRAÉLIENNE
par Yaïr Auron1
Traduit de l’anglais par Dalit Lahav

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Les actions génocidaires ne peuvent être perpétrées que dans
certaines circonstances. L’une de celles-ci est un évident pouvoir de
domination du bourreau sur sa victime. La violence de cette domination dépend largement du comportement d’une « tierce partie ».
Cette « tierce partie » est la majorité écrasante de l’humanité qui ne
se trouve pas, elle, directement impliquée dans l’accomplissement du
génocide. Cette « tierce partie » peut être divisée en trois catégories :
1. ceux qui soutiennent le bourreau car il est puissant et parce
que, pour des raisons d’ordre politique, c’est une « bonne
chose » d’entretenir des relations avec le plus fort ;
2. ceux qui soutiennent la victime (ceux qui, par exemple, ont
tenté de sauver des Juifs pendant la Shoah pour des raisons
d’ordre moral ou ceux qui, au péril de leur vie et de leurs
intérêts, ont agi pour sauver les victimes et qui sont toujours
une très petite minorité ; on les appelle les Justes ;
3. enfin les témoins, c’est-à-dire ceux qui ont vu et n’ont rien
fait. La grande masse des indifférents.
La condition requise pour détruire – mais elle n’est bien sûr pas
la seule – est que d’autres pouvoirs – en particulier ceux qui sont
1. Professeur à l’Open University de Tel-Aviv.
NDLR : avec l’accord de l’auteur, cet article a été modifié par la rédaction pour tenir compte
de la cohérence du volume.
2. Traduction de Lemaître de Sacy, écrivain théologien de Port-Royal, faite entre 1657 et
1696.

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Vous ne ferez pas des entreprises
contre le sang de votre prochain2.
(Lévitique XIX, 16)

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De nos jours, il est évident qu’en fin de compte, c’est le pouvoir
politique dans chaque pays qui décide de la politique de l’État sur les
sujets considérés comme cruciaux, telles que les actions de génocide
perpétrées dans le passé et dans le présent. L’élite politique est, bien
sûr, influencée par les multiples centres de pouvoir dans l’État – les
universitaires, les médias, les systèmes pédagogiques et ainsi de
suite –, mais, en dernière analyse, ce sont toujours les dirigeants
politiques du pays qui doivent décider. Ce sont aussi les chefs politiques qui influencent de façon significative l’attitude des autres
composantes de la société. Par conséquent, il est très important, dans
le contexte qui nous occupe, d’analyser l’attitude des chefs politiques
et de la classe politique au pouvoir sur la question du génocide. Nous
allons examiner ici comment le système politique israélien – les
partis politiques, la Knesset et le gouvernement – ont traité le cas du
génocide rwandais.
Malheureusement, l’espoir placé dans une humanité instruite par
l’étude de la Shoah et ayant tiré les leçons de cette catastrophe s’est
révélé sans réalité concrète. La formule « plus jamais ça » est restée
vide : beaucoup d’actions génocidaires ont eu lieu depuis la Seconde
Guerre mondiale.
Depuis la fin de la guerre froide, plusieurs pas décisifs ont été
accomplis pour établir une Cour pénale internationale. En 1993, le
Conseil de Sécurité des Nations Unies a créé un tribunal ad hoc afin
de juger des crimes commis depuis 1991 sur le territoire de l’exYougoslavie. Ce tribunal a jugé des criminels pour des violations
graves des conventions de Genève de 1949, violations des lois de la
guerre, pour génocide et crimes contre l’humanité. De nombreuses
accusations furent lancées contre des criminels suspects et des

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identifiés à une grande puissance politique, militaire et économique
– ne s’interposent pas entre le bourreau et sa victime. La plupart des
gens – la majorité de l’humanité – n’est pas impliquée de façon
directe dans le génocide ; ils appartiennent à la catégorie des indifférents, ceux qui ont gardé le silence. Les témoins sont comme un
baromètre qui, par contraste, nous renseigne sur l’extraordinaire
capacité humaine à la passivité face au mal.

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procès se tinrent à La Haye, où siège la Cour. Une autre cour fut
établie par le Conseil de Sécurité en 1994 afin de juger des criminels
suspects d’actes de génocide et d’autres graves violations des droits
de l’homme commis pendant la guerre civile au Rwanda.
Le comité préparatoire demanda la réunion de la Conférence des
plénipotentiaires pour le mois de juin 1998 afin d’établir un traité
pour la formation d’une Cour pénale internationale.

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Celle-ci devait prendre réalité avec la ratification du traité instaurant le statut de la Cour par soixante pays. Ce seuil fut atteint plus
tôt que prévu, en avril 2002. En juillet de la même année, la Cour
commença ses activités. Malgré ses insuffisances, l’instauration
d’une Cour pénale internationale permanente s’avère être un pas en
avant important pour l’humanité. La création de cette cour symbolise et englobe les valeurs de la justice, des droits de l’homme et de
la solidarité entre les hommes. Beaucoup la considèrent comme l’une
des institutions les plus importantes de l’ère moderne, comme une
nouvelle étape dans l’histoire de la justice pénale internationale.
Pendant des dizaines d’années, des juristes juifs et israéliens ont
participé aux efforts pour l’instauration de cette Cour. C’est pour
cette raison que l’étude de l’attitude israélienne au moment de l’étape
finale de sa création réserve des surprises. Israël sous le gouvernement Netanyahou – de droite – fut l’un des seuls pays à voter contre
le statut à la conférence de Rome (juillet 1998). Cette attitude s’expliquait alors surtout par un paragraphe concernant les colonies
construites par l’État d’Israël dans les territoires qu’il occupe depuis
1967, bien que ces colonies ne soient pas nommées explicitement. Ce
paragraphe, introduit dans le projet de statut suite à une initiative
des pays arabes, pose le principe qu’un transfert direct ou indirect
d’une population par un pays vainqueur vers un territoire occupé est
un crime de guerre. Soulignons que les États-Unis ont, eux aussi,
voté contre le statut, craignant que, pour des raisons politiques, la
Cour pénale internationale n’entreprenne des actions contre des

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Le 17 juillet 1998, après un long mois de rencontres et de tractations à Rome, la Conférence des plénipotentiaires adopta le « statut
de Rome » de la Cour pénale internationale.

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soldats ou des dirigeants américains en raison de leur implication
dans des opérations militaires à travers le monde. La Libye, l’Irak,
l’Algérie, le Pakistan, la Chine et la Turquie n’ont pas davantage
approuvé par leur vote le statut en question.

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Après la conférence de Rome (1998), un débat a eu lieu en Israël.
Yossi Beilin, ministre de la Justice dans le gouvernement travailliste
dirigé par Ehud Barak, a vivement encouragé la signature du statut,
avant d’être soutenu, plus tard, par Shlomo Ben-Ami, ministre des
Affaires étrangères. L’armée et tout le système juridique, y compris
le procureur général, se sont en revanche opposés à la signature du
statut. L’argument principal de ceux qui souhaitaient qu’Israël
approuve ce statut était que l’histoire du peuple juif et la naissance
d’Israël après la Shoah ne permettaient pas à l’État juif de se trouver
sur cette question aux côtés de la Chine, de l’Irak ou de la Libye, tous
pays dont la mauvaise réputation en matière de violations des droits
de l’homme n’était plus à faire.
L’événement qui a finalement conduit Israël à signer le statut fut
la décision du président Clinton d’apposer sa signature, en dépit de
l’opposition du Pentagone et de la majorité républicaine au Sénat. La
signature des États-Unis devait être approuvée par le Sénat et les
chances pour une telle approbation étaient faibles. Le président
américain a justifié sa décision en avançant l’idée d’une responsabilité d’ordre international – afin que les bourreaux, les auteurs de
génocides, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité puissent être jugés –, et en soulignant qu’elle était le fruit d’une longue
tradition des États-Unis, impliqués dans des événements de cette
nature depuis les procès de Nuremberg. (Soulignons toutefois que les
États-Unis n’ont approuvé la convention sur le génocide qu’en 1988,
soit quarante ans après le vote aux Nations Unies).

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Au 31 décembre 2000, 139 pays avaient signé le statut, parmi
lesquels tous les pays occidentaux, ainsi que la Syrie, l’Égypte et la
Jordanie. Ces pays sont considérés comme « membres fondateurs »
de la CPI.

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Un éditorial publié dans le quotidien israélien Ha’aretz, intitulé :
« Signer avec un poids sur le cœur3 » affirmait : « En signant le statut,
Israël a rejoint la famille des nations, et il ne reste pas à part, tel un
État paria. » Israël – comme les États-Unis, la Russie et la Chine – n’a
pas ratifié le statut, et il n’existe que peu de chance qu’il le fasse
dans un futur proche. En outre, l’administration Bush a fait
connaître son hostilité à l’égard de la CPI et a cherché à l’affaiblir,
entre autres en signant des accords de non extradition avec d’autres
pays, y compris avec Israël. En juillet 2002, le gouvernement d’Ariel
Sharon et les ministres du parti travailliste décidèrent à l’unanimité
(avec une seule abstention), qu’Israël n’approuverait pas la CPI et ne
ratifierait pas son statut.
L’attitude de l’État d’Israël face au génocide rwandais doit donc
être étudiée au regard de la pratique constante de l’État hébreu face
aux actes génocidaires perpétrés ailleurs comme au Biafra, au Tibet,
en Yougoslavie, et aujourd’hui au Darfour. Notons aussi que l’attitude d’Israël face à la CPI relevait de cette pratique constante.
La politique étrangère de l’État d’Israël, depuis sa création, a
toujours oscillé entre deux pôles. D’une part, le désir de devenir « une
lumière pour les nations », de venir en aide aux pays sous-développés, de partager les progrès scientifiques accomplis, en médecine
par exemple, et d’afficher la volonté du jeune État de trouver sa place
au sein de la famille des nations et des pays souverains4. D’autre part,
le sentiment que le monde, et parfois le monde entier, nous est
3. Daté du 2 janvier 2001.
4. Voir entre autres, Daphna SHARFMAN (éd.), A Light into the Nations: Israel’s Foreign Policy
and Human Rights, Tel-Aviv, Hakibbutz Hameuchad, 1999 (en hébreu).

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Le 31 décembre 2000, les États-Unis, suivis par l’État d’Israël,
encouragé par les appels de nombreux pays, notamment d’Europe,
ainsi que par le Canada et des organisations juives partout dans le
monde, ont signé le statut. Pour signer ce statut, ces deux pays ont
attendu l’ultime moment, le dernier jour où il était encore possible de
le faire. En effet, le pays qui l’aurait signé après le 31 décembre 2000
se serait vu contraint de se lancer dans une procédure juridique interne
complexe. Précisons que la signature n’a pas de valeur juridique
pratique : il ne s’agit que d’une simple déclaration à portée symbolique.

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hostile, comme cela fut mis en lumière par la condamnation du
sionisme aux Nations Unies en 1975 ou par la rupture des relations
diplomatiques de nombreux pays avec Israël, en particulier dans les
années 1970.

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Les années 1990 marquent un changement dans l’attitude israélienne à l’égard de ces régimes, en raison de la première Intifada,
l’insurrection palestinienne contre l’occupation israélienne
commencée en décembre 1987, suivie par les accords d’Oslo signés
entre Israël et l’Autorité palestinienne en 1993. Ces événements ont
sans doute provoqué un tournant dans la politique étrangère israélienne5. Et ce ne fut qu’un début. De nombreux intérêts militaires,
économiques et politiques ne pouvaient pas promouvoir une politique étrangère libérale. La puissance de ces intérêts favorisait au
contraire la mise en place d’une politique et d’une diplomatie secrète,
étroitement liées aux affaires militaires. La faiblesse du législatif face
à l’exécutif et la faiblesse du contrôle du gouvernement par la
Knesset autorisaient une telle évolution. Les informations superficielles diffusées par les médias, avares d’informations et d’analyses
politiques sur les régimes dictatoriaux et sur les chefs d’États avec
lesquels Israël collaborait, ainsi que la réticence à publier des articles
de fond sur les relations entre ces pays et l’État d’Israël, devaient
naturellement accompagner cette évolution.

5. Benny NEUBERGER, « Israel and its Relations with States in Africa, Asia and Latin
America », The Foreign Policy of Israel between Conflict to Arrangements, Raanana, The Open
University of Israel, pp. 1062-1054.

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Dans les années 1950, la première tendance dominait encore et
constituait une partie de l’éthos du jeune État. Entre 1960 et 1990,
l’attitude dominante des gouvernements israéliens – à quelques
différences près entre la gauche et la droite – était, d’une manière
générale, réaliste, pragmatique et excessive. Les ennemis d’Israël à
travers le monde, spécialement le monde arabe et les pays de
l’Europe de l’Est, fournissaient à Israël des « prétextes » pour soutenir
des pays non démocratiques violant les droits de l’homme, comme
l’Afrique du Sud, ou d’autres régimes autocratiques marqués par l’arbitraire, en Asie, en Amérique du Sud et en Afrique.

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Il s’ensuivait qu’Israël ne devait pas non plus autoriser un accueil
officiel pour le dalaï-lama, dont les visites en Israël étaient considérées comme privées. De nombreux Israéliens avaient fini par concevoir ces problèmes moraux comme étant le « privilège » des États
puissants. Or Israël, un petit pays condamné à mener un combat
existentiel, ne pouvait pas provoquer un puissant pays comme la
Chine. Appliquant cette idée générale, l’État d’Israël ne devait pas
non plus avoir le « droit » de dire quoi que ce soit concernant les
massacres (pourtant constitutifs d’un génocide) perpétrés au Timor
oriental, dès lors que la critique constituait une provocation envers
l’Indonésie, le plus peuplé des États musulmans, qui n’entretient
pourtant pas de relations diplomatiques avec Israël.
Tous les pays définissent leur politique étrangère en fonction de
leur conception de la raison d’État. Il s’agit pratiquement d’un
standard international. Mais tous s’évertuent aussi à poser des
limites à ces considérations pragmatiques et cyniques, des limites
dictées par les aspects les plus profonds de leurs éthos nationaux.
Pour nombre d’entre eux, la realpolitik qui sacrifie la justice sur
l’autel des considérations politiques et des compromis n’est plus
vraiment acceptable.
L’État d’Israël s’est élevé sur les cendres de la Shoah. D’où cette
question : l’empathie de l’État juif et du peuple juif pour d’autres
peuples qui ont subi ou subissent aujourd’hui génocides ou massacres
est-elle un aspect substantiel de son identité nationale et de son
éthos ? Cette empathie doit-elle être la limite que nous devons nous
imposer dans la conduite de nos affaires sur la scène mondiale ? Doit-

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Cette politique et le soutien populaire qu’elle recevait faisaient
d’Israël un petit pays entouré d’ennemis implacables, un État qui,
« n’ayant pas le choix », se voit contraint de coopérer avec des
régimes non démocratiques : elle eut un grand impact. Citons par
exemple l’absence de condamnation par Israël du massacre perpétré
sur la place de Tienanmen (à Pékin, en 1989), tout en rappelant que
le président israélien fut l’un des premiers chefs d’État occidentaux
à se rendre en Chine sans que cela déclenche la moindre manifestation publique d’opposition dans son pays.

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on attendre d’Israël une réponse particulière face au génocide – face
à tout génocide – chaque fois et partout où il se commet ?

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Afin d’être en mesure d’analyser les réactions de l’État d’Israël face
aux génocides perpétrés dans le monde, nous avons examiné sa position face au génocide rwandais et les polémiques suscitées par cette
catastrophe au sein de la Knesset et des médias du pays.
Malheureusement, l’attitude d’Israël vis-à-vis de ce génocide et
d’autres (comme ceux perpétrés au Biafra, au Tibet et en Yougoslavie)
n’a pas été étudiée de manière systématique. De telles études mériteraient pourtant d’être effectuées. Le cas que nous souhaitons
examiner ne traite pas « seulement » de faits historiques constitutifs
de génocide, mais de vrais meurtres qui se déroulent dans le temps
présent et qui, malheureusement, concernent des centaines de milliers
d’êtres humains. Dans ce cas, l’attitude ou le comportement d’une
« tierce partie » est crucial d’autant que de nombreux observateurs et
analystes ont pu parler du génocide commis au Rwanda comme d’un
génocide qui n’aurait pas dû avoir lieu ou qui aurait pu être évité.

Le Rwanda
Depuis 1994, le Rwanda est devenu synonyme de l’un des pires
génocides perpétrés au XXe siècle. En Israël même, les médias, en
désignant ces événements, ont employé à plusieurs reprises le terme
Shoah, normalement utilisé dans le contexte du génocide des Juifs.
6. Yossi BEILIN, « Foreign Policy and Morality », in SHARFMAN, A Light into the Nations, op.
cit., pp. 63-78.

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Un léger changement fut perceptible dans les années 1990 avec
l’écroulement de l’Union soviétique et l’émergence d’un processus de
paix au Proche-Orient. Mais cette nouvelle orientation a rapidement
disparu. Quelques ministres au sein du gouvernement (Yossi Beilin,
Yossi Sarid et Shlomo Ben-Ami) proclamèrent publiquement qu’il
était bénéfique pour les intérêts israéliens de mener une politique
étrangère plus « morale » et que politique et éthique pouvaient
marcher ensemble6.

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L’arrière-plan politique et historique du génocide commis au
Rwanda, comme au Burundi, était la tension qui régnait entre les
deux groupes « ethniques majoritaires », tutsi et hutu. Une tension
qui s’était intensifiée et qui a été instrumentalisée et manipulée par
les dirigeants coloniaux, frayant ainsi le chemin aux événements
désignés sous le terme de « révolution sociale » dans les années
1959-1962. Avec le renversement de la monarchie tutsi et la prise du
pouvoir par les élites hutu, le Rwanda est devenu une république
gouvernée par les Hutu. Cet événement constitue le moment fort de
la révolution hutu des années 1959-1962. Avec le soutien de l’Église
catholique et des autorités belges, une prise radicale du pouvoir a eu
lieu au Rwanda dans l’année qui précédait son indépendance, avec
pour conséquence non seulement la chute de la monarchie et la
proclamation d’un gouvernement républicain, mais aussi la fuite en
exil d’environ 200 000 hommes, femmes et enfants tutsi. Avec une
minorité tutsi numériquement affaiblie et incapable de participer à
la vie politique du pays, la nouvelle république du Rwanda est, de
fait, devenue une république hutu.

À la Knesset, le sujet a été débattu à plusieurs reprises au cours
de l’année 1994, alors que le génocide était en cours. La question a
été abordée pour la première fois le 18 mai 1994 par Naomi Chazan
(membre du parti de gauche Meretz, qui milite pour les droits
civiques). Mme Chazan affirmait qu’« à l’heure actuelle se déroule au
Rwanda une “Shoah” » et que « la question est soulevée sur l’agenda

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Sur une population d’environ 7,5 millions personnes, ce sont
800 000 à 1 000 000 de Rwandais qui sont mortes en cent jours entre
les mains de milices hutu (connues sur place comme interahamwe),
avec « l’aide d’auxiliaires » de l’armée, des partis politiques, des autorités communales et des simples citoyens qui estimaient qu’ils
n’avaient pas d’autre solution que de tuer leurs voisins pour sauver
leurs propres vies. La grande majorité de ces personnes appartenait à
la minorité tutsi qui, à l’époque, rassemblait environ 10 % de la population ; mais des milliers de Hutu du Sud, identifiés avec des partis de
l’opposition, ont aussi péri sous le coup des escadrons de la mort.

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En juillet 1994, dans le cadre d’une opération humanitaire baptisée
Floraison de l’espoir, le gouvernement israélien envoyait un hôpital
de campagne au Rwanda (plus précisément à Goma, au Zaïre), avec
un effectif de 89 personnes. Cette opération a suscité un mouvement
d’approbation. On estime qu’environ 3 000 réfugiés rwandais ont
reçu un traitement médical dans cet hôpital israélien et beaucoup ont
sauvé leur vie. Nous savons maintenant que, parmi eux, des assassins
et des bourreaux avaient trouvé refuge dans le camp.
Le 27 juillet 1994, le gouvernement israélien a débattu une
nouvelle fois de cette question à la Knesset8. L’aide médicale envoyée
par Israël a été approuvée chaleureusement par certains, tandis que
d’autres prétendaient qu’elle était arrivée trop tard. Les analogies et
les différences avec la Shoah furent aussi évoquées. Certains membres
de la Knesset parlèrent d’un monde hypocrite et cynique, affirmant
que certains pays continuaient d’envoyer des armes au Rwanda. (On
n’a pas mentionné le nom d’Israël à cet égard.) Le député Rehavam
Zeevi, d’un parti de droite, concluait de son côté que « la leçon à tirer
de ces événements est que nous ne pouvons compter que sur nous7. Protocols of the Knesset, 18 mai 1994.
8. Protocols of the Knesset, 27 juillet 1994.

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de la Knesset et du monde occidental avec un mois de retard7 ». Elle
soulignait la responsabilité particulière de l’État d’Israël dans ces
circonstances. Selon Mme Chazan, « notre réaction face à cette
tragédie doit être claire et non équivoque ; sinon nous serions en
train de renoncer à une partie significative de notre vision sioniste ».
Le ministre adjoint des Affaires étrangères, Yossi Beilin (membre à
l’époque du parti travailliste du centre gauche, et plus tard du parti
Meretz), assurait qu’Israël avait appuyé la décision du Conseil de
Sécurité déclarant l’embargo sur les armes et envoyant un effectif de
5 000 soldats dans la région. Une décision du gouvernement publiée
le 22 mai 1994 au sujet des événements au Rwanda proclamait : « Le
gouvernement israélien est choqué par le génocide qui se déroule au
Rwanda et par la destruction de centaines de milliers d’innocents. Le
peuple juif, qui a vécu, avec la Shoah, le plus cruel des événements,
et Israël, l’État du peuple juif, ne peuvent rester indifférents devant
les horreurs commises au Rwanda. »

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Le génocide au Rwanda a été évoqué à une autre occasion à la
Knesset le 9 mai 1995, suite à une nouvelle vague de violences et au
massacre d’environ 8 000 réfugiés. Et, une fois encore, l’aide humanitaire apportée par Israël a été louée et présentée comme un modèle
pour le monde entier.
Abie Nathan (1927-2008), ce pacifiste israélien fort actif dans
l’humanitaire et qui participa entre autres à l’aide humanitaire
envoyée au Cambodge, au Bangladesh, au Biafra, en Colombie, en
Éthiopie et au Rwanda, a collaboré avec d’autres bénévoles israéliens, avec le Joint et l’UNRRA (United Nations Relief and
Rehabilitation Administration) pour sauver des réfugiés rwandais. À
deux reprises, à l’été 1995, l’American Jewish Joint Distribution
Committee a envoyé des experts israéliens pour soutenir sur place les
efforts pour la réadaptation des enfants rwandais.
Mais les efforts réalisés pour coordonner et organiser un soutien
populaire ne furent pas une grande réussite. Aussi, par exemple, une
manifestation organisée par le bureau israélien dans les locaux
d’Amnesty International, ne réunit que quelques dizaines de
personnes. Le commentaire d’Amnesty International fut que le public
israélien n’était probablement pas encore prêt pour ce genre de
manifestation9.
9. Efraïm ZUROFF, « Why I had to go to Rwanda », The Jerusalem Post, 29 novembre 1995.

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mêmes ». Quoique le terme employé le plus souvent pour définir les
massacres au Rwanda fût celui de génocide, ou même de Shoah, la
déclaration de la Knesset, adoptée à l’unanimité (les 26 participants
sur les 120 membres que compte le Parlement) ne parle que d’un
« choc profond et d’une grande consternation par rapport à la terrible
tragédie humaine qui se déroule au Rwanda ». On a fait éloge de l’aide
apportée par Israël et on a appelé d’autres pays à se joindre à nous
dans cette mission humanitaire avant qu’il ne soit trop tard. La déclaration a également appelé à la création par les Nations Unies d’une
force internationale qui serait envoyée sur place. La requête du
député ultra orthodoxe Abraham Rabitz de rajouter à la déclaration
de la Knesset la phrase « Les hommes ont été faits à l’image de Dieu »
– précepte de la pensée juive – a été acceptée à l’unanimité.

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Côté israélien, deux personnes ont répondu à l’invitation : John
Lemberger, directeur de l’organisation Amcha, qui offre un soutien
psycho-social aux survivants de la Shoah, et Efraïm Zuroff, directeur
du bureau israélien du Centre Simon Wiesenthal. Zuroff a expliqué
pourquoi il se sentait obligé d’aller au Rwanda : « Pendant des années
et pour cause, nous nous sommes plaints de l’indifférence des autres
pays à l’égard de notre souffrance, pendant la Shoah et aussi après.
Mais les Rwandais porteront les mêmes accusations dans les années
à venir – et elles nous viseront aussi10. » L’institut Yad Vashem a
décliné l’invitation en fournissant une étrange explication : « Nous ne
sommes pas une agence de voyage. Nous participons seulement à des
conférences ayant un caractère académique11. » Néanmoins, l’Institut
avait donné son accord pour aider le gouvernement rwandais dans les
domaines commémoratif et pédagogique. Un séminaire unique dans
son genre a été organisé à Yad Vashem en novembre 2005. À l’initiative d’une Rwandaise, Yolande Mukagasana (qui a perdu toute sa
famille – son mari et ses trois enfants – pendant le génocide et a
publié trois livres sur le sujet), un groupe de Rwandais (tutsi) survivants du génocide a participé au séminaire qui a duré huit jours.

Le programme de celui-ci prévoyait d’une part des rencontres
avec des universitaires et des enseignants travaillant la Shoah, mais
également avec des survivants de la Shoah – un moment de grande
émotion pour tous les participants –, et d’autre part des discussions
10. « Only dozen were present in the event organized by Amnesty on behalf of the Rwandan
refugees », Ha’aretz, 22 septembre 1994.
11. Or KASHTI, « Knowledge about Genocide », Ha’aretz, 4 décembre 1995.

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En novembre 1995, le gouvernement rwandais a organisé une
conférence intitulée « Génocide, impunité et responsabilité : dialogue
pour l’élaboration d’une réponse au niveau national et international », afin d’aider le pays à surmonter les traumatismes du génocide perpétré un an auparavant. Le gouvernement a invité 50 experts
étrangers, spécialistes de sujets comme la commémoration, la réhabilitation et la justice, à se joindre aux 150 fonctionnaires rwandais
et membres d’ONG étrangères, afin de discuter des moyens curatifs
à apporter aux traumatismes causés par le génocide.

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sur la question de savoir comment il fallait se souvenir et commémorer. Les survivants rwandais ont exprimé leur souhait de venir en
Israël afin d’apprendre comment le peuple juif se confronte à la
mémoire de la Shoah et organise les commémorations. Le séminaire
a été financé en grande partie par la Fondation pour la Mémoire de
la Shoah France. Il faut noter que c’était pratiquement la première
fois que Yad Vashem ouvrait ses portes à un autre groupe de
victimes. Les participants avaient l’espoir de maintenir dans l’avenir
des relations mutuelles, et l’idée a même été évoquée d’un envoi
d’une délégation israélienne au Rwanda ; malheureusement, cette
idée n’a pas eu de suite. La délégation tutsi s’est montrée très déçue
par la réaction de Yad Vashem, institution célèbre dans le monde
entier, y compris dans des régions lointaines et solitaires. Les survivants rwandais (qui sont maintenant au gouvernement) affirmaient
que les Juifs, mieux que quiconque, pouvaient les comprendre. Des
Israéliens ont visité le Rwanda, mais jamais dans le cadre d’une délégation officielle. Il est possible que l’explication tient à la spécificité
de la Shoah et à la difficulté à employer la bonne terminologie
quand il est question d’autres actes génocidaires.
En dernier lieu, il faut mentionner la douloureuse question des
armes de fabrication israélienne vendues au Rwanda. Des informations de sources diverses sont arrivées au sujet des ventes d’armes
effectuées par Israël (ainsi que par d’autres pays) au Rwanda pendant
que se perpétrait le génocide, et cela en dépit de l’embargo sur les
armes proclamé par les Nations Unies12.
Vérifier cette accusation et en examiner tous les détails dépasse
notre objectif. Des informations ont été divulguées par la BBC le
18 novembre 1996 : en avril 1994, des armes de fabrication britannique et israélienne auraient été vendues aux milices hutu. La question a été soulevée dans les médias israéliens le 19 novembre 1996.
Dans son rapport daté du 14 février 1998, Amnesty International a
évoqué la vente d’armes aux instigateurs du génocide. Le rapport
raconte l’histoire de quatre pilotes au service d’une compagnie
12. HRW et LIDH, Leave None to Tell the Story – Genocide in Rwanda, rédigé par Alison Des
Forges, 1999, New York, p. 636 (en français : Aucun témoin ne doit survivre. Le génocide au
Rwanda), et les rapports d’Amnesty International.

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britannique qui ont ouvertement admis avoir piloté, en avril 1994,
quatre avions charters remplis d’armes en provenance d’Israël et
d’Albanie à destination de Goma. D’après les informations recueillies,
parmi ces armes, il y en avait de fabrication israélienne, en particulier des mitraillettes Uzi, ainsi que des grenades appartenant à l’armée
égyptienne et saisies par Israël en 1973,pendant la guerre de Kippour.
Dans une brochure publiée en hébreu par le bureau israélien
d’Amnesty International, quelque temps après le génocide, on peut
lire qu’à peine deux semaines après le commencement des massacres,
un grand avion charter chargé d’armes et de munitions était parti de
Tel Aviv. Il s’agissait de la première de deux livraisons d’armes effectuées par Israël pendant le génocide. Quatre autres livraisons étaient
parties de Tirana (Albanie), sous la supervision d’officiers israéliens.
En juillet 1994, l’ancien ministre Yossi Sarid, lors de sa visite au
Rwanda comme chef de la délégation humanitaire chargée de monter
sur place l’hôpital de campagne, a vu de ses propres yeux des armes
et munitions israéliennes sur le terrain. La télévision israélienne les a
photographiées et elles ont été montrées sur la deuxième chaîne (la
chaîne nationale). À plusieurs reprises, nous avons essayé de soulever
la question et exigé que le sujet soit examiné, mais sans succès.

***

Le bref aperçu de ce cas d’étude (nous avons aussi étudié les cas du
Biafra, du Tibet et de la Yougoslavie) montre que nous avons affaire à
une tragédie. Évidemment, ces cas exigent une étude systématique et
profonde. J’espère qu’en Israël, journalistes, étudiants et intellectuels
reconnaîtront l’importance de ces questions. Mise à part l’aide humanitaire – et nous sommes les derniers à sous-estimer l’importance d’une
telle aide – accordée aux victimes par le gouvernement israélien et ses
citoyens, force est de constater que l’État d’Israël est resté indifférent
face à la tragédie. Israël a soutenu politiquement et militairement la
Serbie à l’époque où des atrocités étaient commises dans ce pays. Le
pays n’a pas respecté l’injonction de la divine parole biblique : « Vous
ne ferez pas des entreprises contre le sang de votre prochain. »

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En critiquant la politique israélienne, on ne doit pas oublier que la
plupart des pays agissent de la même façon, même quand il s’agit
d’une puissance comme les États-Unis. En analysant l’attitude des
États-Unis face aux génocides perpétrés au XXe siècle (le génocide
arménien, la Shoah, les génocides au Cambodge, au Rwanda et
ailleurs), Samantha Power, directrice exécutive du Carr Center for
Human Rights Policy à la Harvard’s Kennedy School of Government,
écrivait : « Le plus choquant se trouve dans le fait que les décisionnaires de Washington n’ont presque rien fait pour empêcher les crimes
car les “intérêts vitaux et nationaux de l’Amérique” n’étaient nullement menacés par le génocide. Des officiers supérieurs américains
n’ont pas accordé au génocide l’attention morale qu’il méritait13. »
La question clé est la suivante : pourquoi les États-Unis sont-ils
restés les bras croisés ? En effet, le tableau, qui s’éclaire de plus en
plus à mesure que nous étudions l’attitude américaine face aux actes
de génocide, met en lumière l’indifférence du témoin. La réaction des
masses, celles qui se trouvent placées entre le bourreau et la victime,
est caractérisée par l’indifférence, la conformité et l’opportunisme. À
notre grand regret, l’État d’Israël n’a pas dépassé cette banale réalité.
Il a choisi de rester sur le bord du chemin, indifférent.
Il existe, à mon sens, des liens entre l’attitude du monde face au
génocide rwandais et son attitude face à celui qui se commet au
Darfour. C’est pour ces mêmes raisons, raison d’État et état d’esprit
qui ne prend pas en compte la souffrance d’autrui, qu’Israël renvoie
13. Samantha POWER, « Genocide and America », The New York Review, 14 mars 2002. Voir
aussi Samantha POWER, A Problem from Hell: America and the Age of Genocide (New York,
Basic Books, 2002), dont est tiré cet article.

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Il me semble qu’il existe un lien direct entre l’échec israélien
relatif à ces actes génocidaires commis récemment et son échec
moral lorsqu’il a refusé de reconnaître le génocide arménien.
L’affirmation qui veut que celui qui préfère ignorer le fait historique
d’un génocide perpétré dans le passé est capable aussi d’agir de la
même manière face à un génocide perpétré dans le temps présent
peut tout à fait être renversée : celui qui préfère ignorer un génocide
perpétré dans le présent est capable d’agir de même concernant un
génocide perpétré dans le passé.

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en Égypte les réfugiés qui ont fui le Darfour et qui tentent de
traverser la frontière et de trouver refuge sur son sol.

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Je suis de plus en plus convaincu que ceux qui restent sur le bord
du chemin soutiennent inconsciemment les assassins, et jamais les
victimes. Décider de ne pas prendre parti, c’est choisir le camp de
l’agresseur. Moralement, nous ne pouvons accepter l’argument qui
veut que rien ne puisse être fait, que « ce sont des choses qui arrivent ». Le Mal ne cesse pas d’être le Mal quand il atteint quelqu’un
d’autre. Il est écrit dans la Bible : « Vous ne ferez pas des entreprises
contre le sang de votre prochain ». Sur le plan moral, les témoins
sont responsables et ils peuvent aussi être coupables.

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024