Fiche du document numéro 27632

Num
27632
Date
Janvier 2021
Amj
Taille
2371121
Titre
Le Congo belge sur pellicule. Ordre et désordres autour d’une décolonisation (ca. 1940- ca. 1960)
Nom cité
Résumé
By creating propaganda structures allowing maximum centralization and control of cinematographic productions shot in the Belgian Congo, the colonial authority, with the help of the catholic missions, demonstrate their desire to make and frame movies in order to meet a double objective: to present an idealized vision of a “modern” colony and to educate the Congolese population. The progressive transformation of spectators' lifestyles, the confrontation with new forms of political, economic and social powers and the 1950s troubles led the colonial power to encourage the films that show the peace and harmony of a united Belgian-Congolese community; at this moment, critics began to claim more openly a rebalancing of community relations and to denounce the gray areas of colonial power whose themes (delinquency, poverty, unemployment) are, so far, neglected by colonial cinema. Contradictory visions emerging around the independence ultimately demonstrated the final incompatibility between Congolese and Belgians.
Source
Type
Article de revue
Langue
FR
Citation
Le Congo belge sur pellicule
Ordre et désordres autour d’une décolonisation (ca. 1940- ca. 1960)
Patricia Van Schuylenbergh

Citer cet article : Van Schuylenbergh Patricia (2021), « Le Congo belge sur pellicule : ordre et désordres
autour d’une décolonisation (ca. 1940- ca. 1950) », Revue d’Histoire Contemporaine de l’Afrique, n° 1, 16-38,
en ligne. URL : https://oap.unige.ch/journals/rhca/article/view/01.vanschuylenbergh
Mise en ligne : 7 janvier 2021
DOI : https://doi.org/10.51185/journals/rhca.2021.e289

Résumé
En créant des structures de propagande permettant d’opérer une centralisation maximale et un
contrôle des productions cinématographiques tournées au Congo belge, les autorités coloniales
belges, aidées par les missions catholiques, démontrent leur volonté de réaliser et d’encadrer les
images afin de répondre à un double objectif : présenter une vision idéalisée d’une colonie
« moderne » et « éduquer » la population congolaise. La transformation progressive des modes de
vie des spectateurs, la confrontation avec de nouvelles formes de pouvoirs politiques, économiques
et sociaux et les troubles des années 1950 conduisent le pouvoir colonial à multiplier les films qui
montrent la paix et l’harmonie d’une communauté belgo-congolaise unie alors que des critiques
commencent à dénoncer les zones d’ombres du pouvoir colonial dont les thèmes (délinquance,
pauvreté, chômage) sont, jusqu’ici, les laissés-pour-compte du cinéma colonial. Des visions
contradictoires se révèlent autour de l’indépendance et démontrent finalement l’impossibilité entre
Congolais et Belges de vivre ensemble.
Mots-clés : cinéma ; politique ; éducation ; propagande ; censure ; publics-cibles

Belgian Congo on films. Decolonization through order and disorders (ca. 1940-1960)

Abstract
By creating propaganda structures allowing maximum centralization and control of cinematographic
productions shot in the Belgian Congo, the colonial authority, with the help of the catholic missions,
demonstrate their desire to make and frame movies in order to meet a double objective: to present
an idealized vision of a “modern” colony and to educate the Congolese population. The progressive
transformation of spectators' lifestyles, the confrontation with new forms of political, economic and
social powers and the 1950s troubles led the colonial power to encourage the films that show the
peace and harmony of a united Belgian-Congolese community; at this moment, critics began to claim
more openly a rebalancing of community relations and to denounce the gray areas of colonial power
whose themes (delinquency, poverty, unemployment) are, so far, neglected by colonial cinema.
Contradictory visions emerging around the independence ultimately demonstrated the final
incompatibility between Congolese and Belgians.
Keywords: cinema; politics; education; propaganda; censorship; target audiences

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https://oap.unige.ch/journals/rhca. ISSN électronique :

LE CONGO BELGE SUR PELLICULE |

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Le 30 juin 1960, l’abbé André Cornil, l’un des réalisateurs les plus prolifiques du cinéma
colonial et son assistant Dieudonné Mambula fixent sur pellicule les fêtes de l’indépendance.
Ce reportage pris sur le vif est l’un des rares témoignages visuels du passage d’un passé
colonial révolu à un avenir censé s’annoncer radieux pour le peuple congolais. Pourtant, une
succession de drames font rapidement sombrer la jeune république dans le chaos. Les
télévisions belges et étrangères, qui assurent la couverture médiatique des événements,
révèlent au public métropolitain une brutale irruption du réel et dévoile la subite dislocation
de l’État colonial : la fuite massive des civils belges, la rébellion des militaires congolais,
l’intervention armée des Casques bleus de l’ONU, la sécession du Katanga, l’assassinat de
Patrice Lumumba. Ces images contrastent avec celles construites par une propagande
coloniale très active qui voulaient notamment montrer le caractère paisible de la vie en colonie.
Les films produits durant la colonisation mettent en scène l’imaginaire du colonisateur
dans un récit construit selon ses normes et qu’il utilise à ses fins. Grâce à son potentiel
d’attraction, il n’est donc pas étonnant que les puissances coloniales se soient emparées du
média cinématographique pour en faire un objet de savoir et de pouvoir et ainsi imposer leurs
projets politiques, économiques et sociaux tout en le considérant comme un danger potentiel.
Hors de contrôle, les images mobiles pouvaient, en effet, influencer, « pervertir » et modifier
des attitudes, en particulier celles des colonisés1.
Le cinéma colonial belge illustre bien cette tension permanente. Instrument de
prédilection d’une propagande officielle destinée à modeler et éduquer les populations
congolaises, il peut aussi inciter à des comportements « divergents » ou « rebelles » s’il n’est
pas canalisé, contrôlé et censuré. Plusieurs études se sont penchées sur ce phénomène et ont
analysé les stéréotypes et les représentations collectives que la société coloniale belge donnait
d’elle-même et voulait imposer aux colonisés2. Par ailleurs, le cinéma colonial destiné
spécifiquement aux publics congolais, rwandais et burundais3, puis la création et l’évolution
des cinémas contemporains dans ces pays sont des thèmes relativement bien connus4. La
question de la propagande cinématographique a également été abordée comme fil rouge de
l’histoire de la colonisation belge et dans une perspective plus large qui met en parallèle les
diverses formes de propagande utilisées par les autorités coloniales (monuments, expositions,
1

Les cas d’études historiques relatifs au cinéma dans les colonies sont progressivement enrichis par des apports nouveaux, que ce
soit en termes d’évolution de l’industrie cinématographique africaine, de développement de la production documentaire, ou en
termes de pratiques socio-culturelles, avec des questionnements sur les conditions dans lesquelles les populations africaines vont au
cinéma. Citons, de manière non exhaustive, Bloom Peter J. (2008), French Colonial Documentary: Mythologies of Humanitarism,
Minneapolis, University of Minnesota Press ; Grieveson Lee et MacCabe Colin (dir.) (2011), Empire and Film, London, British Film
Institute ; Gangnat Emilie, Lenoble-Bart Annie et Zorn Jean-François (dir.) (2013), Mission et cinéma. Films missionnaires et
missionnaires au cinéma, Paris, Karthala ; Reynolds Glenn (2015), Colonial Cinema in Africa. Origins, Images, Audiences, Jefferson,
McFarland & Compagny ; Goerg Odile (2015), Fantômas sous les tropiques. Aller au cinéma en Afrique coloniale, Paris, Vendémiaire,
coll. Empires ; Fair Laura (2018), Reel Pleasures: Cinema Audiences and Entrepreneurs in Twentieth-century Urban Tanzania, Athens,
Ohio UP ; Parsons Neil (2018), Black and White Bioscope. Making Movies in Africa, 1899 to 1925, Brixton, Intellect Books.
2
Voir à ce sujet l’ouvrage pionnier de Ramirez Francis et Rolot Christian (1985), Histoire du cinéma colonial au Zaïre, au Rwanda et
au Burundi, Tervuren, Musée royal de l’Afrique centrale ainsi que Van Schuylenbergh Patricia et Etambala Mathieu Zana Aziza (dir.)
(2010), Patrimoine d’Afrique centrale. Archives Films. Congo, Rwanda, Burundi, 1912-1960, Tervuren, Musée royal de l’Afrique centrale.
3
L’administration des territoires du Ruanda-Urundi est confiée par la Société des Nations puis par l’ONU à la Belgique (1923-1962).
4
Convents Guido (2006), Images et démocratie. Les Congolais face au cinéma et à l’audiovisuel. Une histoire politico-culturelle des
Belges jusqu’à la République démocratique du Congo (1896-2006), Kessel-Lo, Prod. G. Convents et Afrika Filmfestival ; Mosley Philip
(2000), Split Screen: Belgian Cinema and Cultural Identity, Albany, State University of New York Press ; Kapanga Kasongo Mulenda
(2019), « The Question of Cinema for the Natives between World Wars in the Congo », in J. Vanderlinden, The Belgian Congo between
the Two World Wars, Brussels, Royal Academy for Overseas Sciences, pp. 243-267.

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musées coloniaux, cinéma, photographie, radiodiffusion)5. Bien que ces monographies et
articles constituent une base solide pour appréhender le cinéma colonial dans ses nombreuses
dimensions, des lacunes persistent encore par défaut de dépouillement et d’inventaires
globaux des archives officielles du ministère des Colonies et, en particulier de celles du
gouvernement général à Léopoldville (Kinshasa) à propos de la propagande. En outre, les
archives issues de l’ancien parastatal (entreprise semi-publique) InforCongo6 semblent
perdues, à l’exception de ses collections photographiques et filmiques versés au Musée royal
de l’Afrique centrale (MRAC).
Le présent article tente donc de combler certaines lacunes en apportant des informations
inédites tirées de plusieurs fonds dudit ministère (Fonds des Affaires Indigènes, Fonds Justice)
et surtout du gouvernement général (Fonds GG), notamment en matière d’éducation, de
contrôle et de censure. Par ailleurs, des archives privées de cinéastes coloniaux, rassemblées
au MRAC, ont aussi été mobilisées, comme, par exemple, les dossiers de presse et documents
relatifs à André Cornil. Enfin, la digitalisation d’un nombre important de films coloniaux7 entre
2008 et 2010 a permis de les étudier plus précisément afin de comprendre leur évolution et de
déceler leurs principaux messages.
À la lumière de ces informations, cet article souhaite cerner les principales étapes de la
propagande coloniale belge à travers le cinéma. Il présente d’abord les principaux acteurs qui,
peu avant la Deuxième Guerre mondiale, ont donné l’impulsion à un projet cinématographique
officiel et global : le ministère des Colonies à Bruxelles, le gouvernement général à Léopoldville
ainsi que les missions catholiques à qui l’État colonial a notamment confié l’enseignement et
la transmission des valeurs chrétiennes. Dans le contexte d’un changement de perspectives et
de rapports de pouvoir entre la métropole et la colonie durant et à l’issue du conflit, il analyse
ensuite les principales stratégies entreprises par l’autorité coloniale et les missions catholiques
pour « éduquer », contrôler et distraire par l’image divers publics-cibles. Cet article montre
aussi l’existence d’un réseau d’entreprises cinématographiques privées qui peine à trouver sa
place dans un système cadenassé par le monopole « Administration-Missions » et par la
censure tout en souhaitant offrir des voies et des lieux de projections alternatifs. Ce texte évalue
enfin comment, entre la fin des années 1950 et l’indépendance de 1960, sont projetées les
images d’une colonie apparemment ordonnée, planificatrice, à son apogée matérielle dans le
domaine des infrastructures. En tentant, sans y parvenir, de convaincre les opinions publiques
belge et internationale de sa politique « égalitariste », des zones d’ombre émergent cependant,
la ségrégation continue de se manifester tandis que de nombreux désordres, tensions et
oppositions se cristallisent autour de revendications individuelles et collectives plus marquées.
Dans un climat de tensions de plus en plus explicites vécues durant la décennie 1950, dont
l’indépendance est l’aboutissement, le cinéma est davantage un marqueur identitaire entre les
deux communautés belge et congolaise distinctes qu’une expérience éducative réussie. À cet

5

Convents Guido (2003), L’Afrique ? Quel cinéma ! Un siècle de propagande coloniale et de films africains, Anvers, Éd. EPO ; Gillet
Florence et Cornet Anne (2010), Congo-Belgique, entre propagande et réalité, Bruxelles-Tournai, Ceges-Renaissance du Livre ; Stanard
Matthew (2012), Selling the Congo. A History of European pro-Empire Propaganda and the Making of Belgian Imperialism, Lincoln,
University of Nebraska Press.
6
Voir plus loin dans cet article.
7
En ligne, URL : http://cinematek.be/?node=2&news_id=138? (consulté le 15 septembre 2020).

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égard, l’histoire du cinéma colonial révèle les ordres et les désordres du colonialisme « à la
belge8 ».

Les acteurs de la propagande cinématographique au Congo belge autour
de la Deuxième Guerre mondiale
Entre la veille de la Deuxième Guerre mondiale et l’indépendance du Congo, la propagande
cinématographique coloniale se développe de manière accélérée, sous l’impulsion de trois
sphères de pouvoir : le ministère des Colonies à Bruxelles, le gouvernement général à
Léopoldville et le réseau des missions catholiques. Elle vise à mettre de l’ordre dans un cinéma
réalisé jusqu’ici par plusieurs cinéastes indépendants et qui pourraient montrer des images
imprévues ou inadaptées au projet colonial9.
À Bruxelles, le ministère des Colonies organise, par le biais de son Office colonial10, les
divers canaux de la propagande coloniale en métropole (presse, expositions, éditions,
radiodiffusion et cinéma). La création du Fonds de propagande économique et social en 1937
amplifie son action en s’alliant avec les deux grands organismes de gestion de certains
territoires congolais11. En s’assurant ainsi du monopole de la propagande, le Fonds permet à
l’État de devenir le principal producteur et distributeur des films coloniaux qu’il confie à des
cinéastes belges qui présentent le « profil » requis. Il faut éviter de montrer des réalités
dérangeantes, comme la lèpre ou les effets de l’alcool, qui avaient été évoqués dans le film
Terres brûlées (1934) de Charles Dekeukeleire, et souligner surtout le potentiel économique du
Congo et l’action « civilisatrice » de la Belgique, aspects que le réalisateur Ernest Genval avait
réussi à combiner12. L’avocat belge André Cauvin, préféré au réputé photographe polonais
Casimir Zagoursky13, réalise en 1939 le premier documentaire marquant, Congo, terre d’eaux
vives (1939) qui souligne par une évocation de la pénétration de la civilisation « blanche » le
long du fleuve Congo, les « progrès » réalisés au bénéfice des populations locales. De
nouveaux venus tels que Hélène Schirren et Guillaume Linephty - Guérir sous les tropiques
(1946), Sans Tam-Tam (1949) - qui évoluent dans la sphère culturelle, et surtout André Cauvin
- Congo (1942), L’Équateur aux cents visages (1948) - se moulent désormais aux exigences du
nouveau producteur officiel en réalisant des films qui exaltent le Congo actuel grâce à l’œuvre
des pionniers et des colons, présentent une colonie modèle au point de vue économique,

8

Pour les caractéristiques de cette colonisation, voir Goddeeris Idesbald, Lauro Amandine, Vanthemsche Guy (dir.) (2020), Le Congo

colonial. Une histoire en question, Waterloo, Renaissance du Livre.
9

Il faut surtout citer les films réalisés par les « premiers chasseurs d’images » tels que Hyacinthe Pirmez, Ernest Genval ou Charles
Dekeukeleire. Voir Van Schuylenbergh Patricia (2010), « Temps colonial, temps du récit cinématographique », in P. Van Schuylenbergh
et M. Z.A. Etambala (dir.), Patrimoine…, op. cit., pp. 16-23.
10
L’Office colonial est, dès sa création (1907), un service de documentation économique mais élargit ses compétences dès 1933 à la
propagande coloniale et au tourisme. Après la Deuxième Guerre mondiale, il est intégré pour une courte durée au ministère des
Colonies avant son abrogation en 1947.
11
Outre le ministère des Colonies et l’Office colonial, le Fonds est composé par des représentants du Comité National du Kivu et du
Comité Spécial du Katanga.
12
Van Schuylenbergh Patricia et Winter Grace (2010), « Ernest Genval. Le chansonnier-cinéaste propagandiste, Chansonnier, filmmaker and propagandist », in Belgisch Congo Belge gefilmd door/filmé par/filmed by Gérard De Boe, André Cauvin & Ernest Genval,
Bruxelles, Cinematek, pp. 40-45 et 72-78.
13
Archives Africaines, Ministère des Affaires étrangères (AA), Gouvernement général (GG), 9488, lettre de Sieben au nom du Secrétaire
Général du ministre des Colonies au gouverneur général, Bruxelles, 31 mars 1938.

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social, médical et scientifique et accentuent surtout les liens étroits unissant la colonie à la
« mère patrie ».
À Léopoldville, capitale du Congo belge, un service de l’Information du Gouvernement
général se met en place en 1940. Coupé provisoirement de ses liens avec la métropole, il est le
seul organe officiel belge qui fournit régulièrement des nouvelles de la colonie au
gouvernement belge exilé à Londres14 et répand au Congo et à l’étranger une propagande
relative à l’effort de guerre sur des supports divers. Les questions qui ont trait au cinéma sont
désormais prioritairement traitées sur place, ce qui témoigne de la volonté d’une autonomie
structurelle accrue et d’un plus grand pouvoir décisionnaire par rapport aux orientations
métropolitaines. Pierre Ryckmans, gouverneur général du Congo et du Ruanda-Urundi (19341946)15 veut davantage penser, réguler, et contrôler par lui-même les populations qu’il
administre. Il promeut ainsi des plans de développement post-conflit avec l’émergence d’un
État centralisé « fort » et d’une rechristianisation active de la société16. La création d’une section
Ciné-Photo au sein du service de l’Information vise à filtrer, surtout à l’intention des Congolais,
les actualités et les films provenant, depuis l’Afrique orientale, des canaux britanniques et
étasuniens et de prêter assistance aux premières missions cinématographiques de la colonie.
Le cinéaste Gérard De Boe, un agent sanitaire17, devient l’un des premiers cinéastes coloniaux
à travailler pour le gouvernement général et réalise notamment plusieurs films qui font l’éloge
des réalisations médicales et économiques de l’après-guerre dans la colonie : La Fomulac, Ngiri,
Un élevage au Congo belge (1939).
De son côté, l’Église catholique prend conscience à la fois du danger et du potentiel du
cinéma sur les populations locales. Puisque l’œuvre « civilisatrice » constitue une composante
essentielle des actions d’évangélisation et d’éducation qui confiées aux missions par l’État
colonial, les missionnaires sont très sensibilisés à toutes les formes de propagande qui
pourraient être utiles à leurs objectifs de moralisation de la société congolaise aux valeurs
chrétiennes. Dès 1937, le scheutiste18 Albert Van Haelst constitue à Luluabourg (actuel
Kananga) une cinémathèque offrant toutes les garanties sur le plan de la morale chrétienne et
organise des séances gratuites de films distribués par les canaux officiels. Sur la base de
l’expérience du Nigéria britannique qui utilisait depuis une dizaine d’années le film comme
moyen d’instruction et de propagation de sa politique coloniale auprès de ses populations19, il
s’associe en 1943 avec Willy Pitzele, directeur de la Radio Amplification Cinéma (RAC), l’une
des plus importantes sociétés de distribution, de location de films et de vente d’appareils de
14

Après l’invasion allemande en Belgique et la capitulation du roi Léopold III (28 mai 1940), le gouvernement belge replié en France
entend continuer le combat. Le Premier ministre Hubert Pierlot, qui a déclaré aussitôt le roi « dans l’impossibilité de régner », ainsi
que d’autres ministres Paul-Henri Spaak, Camille Gutt et Albert De Vleeschauwer, ministre des Colonies, décident de partir pour
Londres pour y former un gouvernement belge en exil (31 octobre 1940).
15
Vanderlinden Jacques (1994), Pierre Ryckmans. 1891-1959. Coloniser dans l'honneur, Bruxelles, De Boeck-Université.
16
Vellut Jean-Luc (2017), Congo. Ambitions et désenchantements 1880-1960, Paris, Karthala, pp. 409-410.
17
Catégorie de travailleurs créée par l’administration belge pour pallier au manque de médecins coloniaux et les soutenir dans la
lutte contre les grandes endémies.
18
La congrégation du Cœur Immaculé de Marie (CICM) mieux connue en Belgique sous le vocable de « Pères de Scheut » est un
institut exclusivement missionnaire qui a développé un véritable empire missionnaire dans le monde, principalement en Chine et au
Congo belge. Bontinck Frans (1988), Les Missionnaires de Scheut au Zaïre : 1888-1988, Limete-Kinshasa, Epiphanie.
19
Dès 1929, le gouvernement britannique introduit des films éducatifs au Nigéria comme appui visuel à la campagne pour
l’éradication de la peste. Le succès de cette initiative auprès de la population locale incite à poursuivre l’utilisation de films comme
moyen d’instruction et de propagation des programmes coloniaux. Okiremuete Shaka Femi (1999), « Instructional Cinema in Colonial
Africa: An Historical Reappraisal », Ufahamu, 27(1-3), p. 28.

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cinéma de la colonie20, pour projeter dans la capitale quelques films auprès d’une centaine
d’« évolués21 » afin d’étudier leur réaction et de rendre compte de « programmes idéaux » à
composer à leur intention.
Après la guerre, ce réseau informel reçoit l’appui d’un gouvernement général qui, dans
un esprit positif de redémarrage économique du Congo, veut promouvoir l’essor de
programmes de planifications et réduire les inégalités22. Par ailleurs, le développement
international de projets relatifs à l’éducation des masses entraîne une plus grande implication
des missionnaires dans ce domaine. Contrairement au cinéma laïc qui produit principalement
des reportages et des documentaires, les religieux se tournent surtout vers les films de fiction
qu’ils trouvent plus accessibles aux publics africains car, selon eux, non seulement les thèmes
sont davantage ancrés dans leur quotidien, mais les rôles sont aussi distribués à des acteurs
congolais. Le père scheutiste Alexandre Van den Heuvel joue un rôle important dans ce projet.
Fondateur du journal La Croix du Congo, organe de presse privilégié des « évolués » congolais
qui se sont affirmés comme nouvelle classe sociale à part entière pendant la guerre, il vise à
adapter et à encadrer par un apprentissage moral et religieux les structures familiales
« traditionnelles » aux nouvelles conditions sociales imposées par le colonisateur. À la
demande de la Conférence des Vicaires Apostoliques du Congo (1945), il fonde le Centre
Congolais d’Action Cinématographique (CCACC)23, un service de distribution, centralisé aux
mains des Scheutistes, des films catholiques au Congo belge et au Ruanda-Urundi. Sous son
impulsion, trois centres de production et de distribution de films pour Congolais se
développent en parallèle : Scheut-Films et Edisco-Films de Van Den Heuvel à Léopoldville et
au Bas-Congo, Luluafilm, du Scheutiste Albert Van Haelst au Kasaï occidental et Africa Films,
du Père Blanc Roger De Vloo, au Kivu et au Ruanda-Urundi.

Nouvelles stratégies post-conflit : éduquer, séduire et censurer
De nouveaux instruments de propagande
À la dissolution de l’Office colonial en mai 1947, un nouveau Centre d’information et de
documentation du Congo Belge et du Ruanda-Urundi (CID) reprend en 1950 ses attributions
et celui du Fonds de Propagande. S’il continue à contrôler tous les leviers de propagande tout
en accentuant son rôle d’incitant financier, il vise également à centraliser de manière plus
efficace toute la chaîne de réalisation et de production des films coloniaux et à orienter certains
projets. Sont aussi visés les films issus du service de l’Information, une manière de contrôler le
20

La RAC est créée en 1942 à Léopoldville. Elle réalise également des films, diapositives, bandes son, photographies, publicités sous
le nom « Congo-Flash » et « R’Actualité ». Willy Pitzele songe le premier à conquérir le public congolais en ouvrant un cinéma
commercial à Aketi en 1944. Le président Mobutu l’attribuera en 1975 à la société Anifrani.
21
Les « évolués » forment le tout petit groupe des détenteurs de la carte du mérite civique, qui octroie certains privilèges et des
« immatriculés » bénéficiant d’un statut proche de celui de l’Européen. Au sens large, il s’agit d’une classe moyenne congolaise,
formée d’employés, d’ouvriers qualifiés, de commerçants, et d’autres, ayant un niveau d’éducation et d’aisance matérielle les mettant
au-dessus de la masse et vivant en circuit fermé. Les élites politiques de l’indépendance sont issues de cette catégorie socioéconomique. Voir à ce sujet Mutamba Makombo Kitatshima Jean-Marie (1998), Du Congo Belge au Congo Indépendant, 1940-1960.
Émergence des « Évolués » et genèse du nationalisme, Kinshasa, IFEP ; Tshimanga Charles (2001), Jeunesse, formation et société au
Congo/Kinshasa, 1890-1960, Paris, L’Harmattan ; Tödt Daniel (2018), Elitenbildung und Dekolonisierung. Die Évolués in BelgischKongo 1944–1960, Coll. Kritische Studien der Geschichtswissenschaft, 228, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht.
22
Vellut J-L, Congo…, op. cit., p. 456. Voir aussi Vanthemsche Guy (1994), Genèse et portée du « Plan décennal » du Congo Belge
(1949-1959), Bruxelles, Académie royale des Sciences d'Outre-Mer.
23
Voir Gangnat E., Lenoble-Bart A. et Zorn J-Fr. (dir.), Missions et cinéma…, op. cit.

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gouvernement général dans sa volonté de mettre en place un cinéma national du Congo qui
pourrait dépasser en importance et en notoriété un cinéma colonial (métropolitain) qui ne
correspond plus aux évolutions récentes et aux fractures que la guerre a accentuées. Des
ferments d’agitations et de prise de conscience nouvelle secouent la société colonisée dans
son ensemble. Depuis la Conférence de Brazzaville de 1944, les colonies affichent leur volonté
d’entreprendre une certaine décentralisation associant progressivement les peuples coloniaux
à la gestion de la chose publique. En réponse à la Charte des Nations Unies (1945, San
Francisco) qui marque le début officiel d’une décolonisation mondiale, le gouvernement belge
proclame son adhésion à ses principes et se fixe comme objectif la primauté des intérêts des
habitants des territoires non autonomes et le développement de leur capacité à s’administrer
eux-mêmes.
La colonie belge suit le mouvement, du moins officiellement, alors même qu’émergent
dans les milieux missionnaires des propositions de « réindigénisation » d’une société africaine
- en proie aux dangers d’une « modernité » de type capitaliste24 - basées sur une armature
catholique solide qui puisse soutenir ce projet. À Léopoldville, le service de l’Information
multiplie ses instruments de propagande pour les publics congolais, belge et international et
engage du personnel congolais : tandis que sa section Presse produit ses propres
communiqués et articles, subsidie des éditions congolaises destinées aux « évolués » comme
La Voix du Congolais ou Nos Images, réalise des affiches et des tracts, des émissions
radiophoniques sont émises par Radio Congo belge (RCB) et Radio Congo belge africaine
(RCBA) pour les publics belges et congolais25. De même, la section Ciné-Photo, réorganisée
sous la direction du fonctionnaire Louis Van Bever, prévoit des films éducatifs ainsi que des
reportages d’actualités destinés aux publics congolais (Images Congolaises), belge et
international (Visages du Congo belge).
L’institutionnalisation du cinéma éducatif devient l’un des maîtres d’œuvre de la
nouvelle politique, impliquant davantage des réalisations missionnaires, avec l’aval et le
support du gouvernement général. La diffusion des films est assurée par les autorités qui en
supportent également les frais de production. De nouvelles stratégies de propagande se
mettent en place pour éduquer, contrôler et divertir les différentes strates sociales : éduquer
les consciences, attirer les élites, encadrer les réseaux cinématographiques indépendants.
L’objectif est à la fois commercial et idéologique car le cinéma peut tout autant attirer et
distraire un important public potentiel, surtout dans les cités indigènes et les centres extracoutumiers, qu’avoir sur eux une influence « bienfaisante ». Il s’agit d’abord d’éduquer les
masses populaires par des films qui inculquent des valeurs chrétiennes et morales, des
principes hygiénistes et des pratiques occidentales visant à améliorer le monde du travail et
celui des activités de loisirs et font assimiler et préférer les mœurs occidentales aux « coutumes
primitives » (polygamie, sorcellerie, danses « tribales », etc.). De la même manière, il s’agit de
délasser les populations dans les grands centres urbains et industriels, afin de contrecarrer les
24

À côté de la volonté des autorités coloniales d’engager une modernisation du Congo sur le modèle occidental, émerge, dans les
milieux missionnaires, des idées de programmes de développement économique fondés sur une société familiale « de base », fière
de son identité culturelle locale et qui puisse répondre à ce qui était considéré comme des dangers (matérialisme, déstructuration
sociale, etc.). Vellut J-L., Congo…, op. cit., pp. 459-460.
25
Voir Pauwels-Boon Greta (1979), L’origine, l’évolution et le fonctionnement de la radiodiffusion au Zaïre de 1937 à 1960, Tervuren,
Musée royal de l’Afrique centrale.

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effets néfastes des bars et dancings, d’éviter l’alcoolisme et « les plaisirs stériles et onéreux26 »,
mettant en péril le contrôle social des populations par le colonisateur.

Éduquer les consciences
Encouragées par le gouvernement général, les projections officielles sont réglementées dès
1948. Ces règles s’inspirent largement des principes émis par l’Advisory Committee on
Education des colonies britanniques (1944)27. Louis Van Bever rédige un premier manuel
pratique où il préconise l’utilisation des méthodes et techniques cinématographiques adaptées
« à la mentalité et au niveau intellectuel de ses spectateurs28 » : des films simples, courts,
compréhensibles destinés au public de base, essentiellement rural ; des films mélangés (films
simples et bandes-dessinées didactiques29) choisis pour les spectateurs « détribalisés », selon
le vocable colonial, vivant dans les centres (urbains, industriels) et qui assistent déjà à des
séances cinématographiques ; enfin, des films didactiques ou récréatifs sont réalisés à
l’intention d’un public plus « évolué » (élèves des écoles normales et supérieures, séminaristes,
membres de cercles d’étude, etc.), à condition d’être introduits et commentés par des agents
coloniaux sur place. Afin de réussir ce projet éducatif, des acteurs et actrices congolais sont
engagés pour amener le spectateur à se référer à une situation connue ou à un modèle vers
lequel tendre et qui lui permet rapidement, sans passer par la lecture et l’écrit, d’« apprendre
aux communautés primitives illettrées comment combattre la maladie, comment obtenir des
meilleures récoltes, comment construire de meilleures maisons30 ».
Dans cette optique, des scénaristes et des cinéastes belges sont engagés sur base de
leurs expériences cinématographiques ou photographiques, de leurs contacts étroits avec les
Congolais ou de leur familiarité avec leurs modes de vie et leurs cultures. C’est le cas de
nouveaux « réalisateurs » que sont des fonctionnaires du gouvernement qui font des films, tels
qu’André Heyman, Henri Philips, Gaby-Juan Felix, Gérard De Boe ou de l’abbé séculier André
Cornil. Parallèlement, des assistants congolais sont engagés pour effectuer des travaux
techniques
bien
déterminés :
électriciens,
opérateur-assistants,
aide-monteurs,
manutentionnaires et dactylographes.

26

Anonyme, « Le Cinéma pour indigènes au Congo belge », Congo Presse, 15 novembre 1947.
Whitehead Clive (1991), « The Advisory Committee on Education in the [British] Colonies 1924-1961 », Paedagogica Historica, 27(3),
pp. 384-421.
28
Van Bever Louis (1950), Le Cinéma pour Africains, Bruxelles, G. Van Campenhout, p. 8.
29
Ces dessins animés didactiques sont réalisés sur le modèle de ceux créés en Belgique avant la guerre, intitulés « Cinq minutes
de… », qui portaient sur des thèmes aussi variés que l’astronomie, la géologie ou la météo.
30
Van Bever L., Le Cinéma …, op. cit., p. 7.
27

N° 1 MEDIAS ET DECOLONISATIONS EN AFRIQUE (ANNEES 1940-1970), EN LIGNE, 2021.

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| PATRICIA VAN SCHUYLENBERGH

Illustration n° 1 : Cinéthèque du service de l’Information du gouvernement général à
Léopoldville31

André Cornil, surtout, est une importante personnalité du cinéma éducatif missionnaire.
Fondateur en Belgique d’Apostolat par le Septième Art (A7A), une petite société de distribution
visant à préserver les enfants, futurs catéchistes, du « poison » hollywoodien, il réalise aussi
une série de petits films édifiants. Fort de son expérience et soutenu par Van den Heuvel, il
propose au ministère des Colonies de réaliser des films pour les Congolais. Formé par l’Unesco
sur l’utilisation des auxiliaires audiovisuels dans l’éducation de base, Cornil est attaché par
contrat au gouvernement de Léopoldville qui lui offre du matériel et achète ses films, mais il
reste financièrement indépendant et libre de ses choix de sujets. Avec une soixantaine de films
à son actif, réalisés grâce à une activité itinérante, sur une production missionnaire de quelque
200 films, sa production se compose de films de fiction et de court-métrages éducatifs dont
les titres sont plus qu’explicites quant à la volonté d’inculquer des préceptes sociaux,
hygiénistes et productivistes (La propreté du corps, L’heure, La menuiserie, Mayele construit sa
maison, etc.) à l’ensemble de la population.

Attirer les élites
Montrer visuellement les nouvelles élites congolaises en action, ces « évolués » censés jouer
un rôle plus important à l’avenir, devient le thème principal de la propagande
cinématographique belge. Le voyage très médiatique du roi Baudouin au Congo en 1955
marque ce tournant. Il apparaît comme la formalisation, en la personne du roi, d’une synergie
durable entre la Belgique et le Congo, en vertu d’une souveraineté commune. Réalisé lors de
cet événement, le film Bwana Kitoko d’André Cauvin (1955) souligne ce lien avec force32. À
Bruxelles, un nouvel Office de l’Information et des Relations Publiques pour le Congo Belge et
31

Musée royal de l’Afrique centrale (MRAC), HP.1956.15.10273, photo J. Mulders (Inforcongo), années 1950, MRAC Tervuren ©.
Gillet Florence (2010), « André Cauvin. Gros plan sur deux décennies de carrière cinématographique en Afrique centrale », in P.
Van Schuylenbergh et M. Z.A. Etambala (dir.), Patrimoine…, op. cit., pp. 137-138.

32

REVUE D’HISTOIRE CONTEMPORAINE DE L’AFRIQUE

LE CONGO BELGE SUR PELLICULE |

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le Ruanda-Urundi (InforCongo) remplaçant le CID (1955), illustre alors le concept de
« communauté belgo-congolaise », introduit par le gouverneur général Léo Pétillon en 195233
et qui va servir de paramètre d’identification d’une société coloniale se voulant plus équilibrée
mais qui n’en restera qu’à des déclarations de principe. Les films tels que Jeunesse en marche
et Humanisme africain (Jean-Marc Landier, 1957), Deux hommes, un pays (Al Vaner, 1958) ou
Main dans la main (Robert Geerts et Marcel Thonnon, 1958), sont alors surtout destinés à
diffuser auprès des élites congolaises des messages de conciliation, d’amitié et d’égards entre
les deux communautés que l’on voudrait voir rassemblées en une nation unifiée. L’accent est
placé sur les potentialités d’avenir (« Le futur se trouve entre leurs mains, c’est eux qui veilleront
à la prospérité de l’Afrique et du monde34 »), sur le parcours des « évolués » qui personnifient
une classe moyenne focalisée sur les modèles urbains de consommation, d’habitats et du
paraître, conscient de son statut « privilégié » par rapport au « peuple » encore
majoritairement situé dans le monde rural.
Constitués en cercles dans les centres extra-coutumiers et dans les cités indigènes, ces
« évolués » participent à des séances cinématographiques, théâtrales et à des « causeries35 »
organisées par le service de l’Information. Pour le gouvernement, le cinéma est un puissant
moyen de les attirer et de les retenir. Il met donc à disposition dans le pays des appareils de
projections et offrent des séances gratuites36. Des associations telles que le Groupement
congolais des Employés Chrétiens (GEC) - Mouvement familial, présidé par Alphonse Sita, sont
créées pour conseiller les élites congolaises à suivre et consolider des valeurs familiales
(mariage monogame, épouse modèle), éducationnelles et disciplinaires (écoles, Force
publique, scoutisme)37, et présentent et relaient les films éducatifs de Cornil à ses membres.
Par ailleurs, les « évolués » prennent aussi conscience des potentialités qui leur sont offertes
pour augmenter leur chance d’ascension sociale. Par exemple, à Léopoldville, le ciné-club
Cinécole, fondé par le Groupement culturel belgo-congolais38 (1950) dans le but de rapprocher
les élites de la communauté blanche, propose en plus de la projection de films un
apprentissage aux techniques cinématographiques.

Encadrer les réseaux indépendants
Bien que marginal par rapport aux productions de l’État et des missions religieuses, un cinéma
indépendant rassemblant plusieurs sociétés privées tente d’assurer sa position. La société RAC
de Louis Pitzele et celle de Jacques Surberck, Ekebo-Films, se spécialisent surtout dans la
production de films consacrés à l’industrie, aux actualités internationales et aux court-

33

Brassine de la Buissière Jacques et Dumont Georges-Henri (2010), Les autorités belges et la décolonisation du Congo, Bruxelles,
Cahiers du CRISP, 2063-2064, p. 16.
34
Commentaire final du film Les métiers de la construction (André Cauvin, 1955).
35
Ces « causeries » traitent de sujets en rapport avec des nouvelles normes de comportement en société : « Savoir reconnaître ses
fautes » (H. Ancelot, Congopresse, 1956) ; « En sport, en affaires et dans la vie, il faut jouer franc jeu » (H. Ancelot, 1955) ; « Habillonsnous avec goût » ou encore « Quelques étapes matérielles, religieuses et morales de l’ascension de l’homme vers la civilisation
occidentale ». Service Affaires indigènes et Main-d’œuvre (AIMO), Gouvernement général, Kalina, 1954.
36
AA, GG, 19033, Secrétariat Général, service de l’Information, R. Mossiat, causerie diffusée par le service de l’Information du
gouvernement général Léo-Kalina, 1956.
37
MRAC, Fonds Cornil, HA.01.0402, L’Avenir, 5 décembre 1955.
38
Les membres fondateurs étaient Albert Mongita, André Scohy, nouveau directeur du bureau Ciné-Photo, Henri Bongolo, (?)
Kambamba, Jean-Pierre Dericoyard et Antoine-Roger Bolamba, rédacteur en chef de la Voix du Congolais, puis Maurice Kasongo et
Gustave Van Herreweghe, sous-directeur de la Radio Congo belge et initiateur des émissions africaines.

N° 1 MEDIAS ET DECOLONISATIONS EN AFRIQUE (ANNEES 1940-1970), EN LIGNE, 2021.

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| PATRICIA VAN SCHUYLENBERGH

métrages. À côté de ces sociétés, plusieurs autres fournisseurs de matériel cinématographique
et photographique, dont certains étaient également des distributeurs et exploitants
(Hourdebise-Demon, Cofilimex, Jeronomis, ou les Établissements A. Van Heffen, par exemple)
ainsi que des ciné-clubs de cinéastes amateurs louent et diffusent des films de fiction
provenant majoritairement d’Europe et des États-Unis, après leur agréation par la Commission
de contrôle cinématographique.
À l’instar de nombreuses autres colonies qui craignaient l’impact social du cinéma sur
leurs administrés, le gouvernement de la colonie veille à censurer les productions considérées
comme inadéquates. Dans les années 1930, il interdisait les films qui portaient atteinte à l’ordre
public et étaient de nature à influencer les spectateurs : ceux contraires à la bonne
gouvernance, montrant une violence gratuite, offensant les convictions religieuses et la
décence ou portant atteinte au « prestige nécessaire de la race blanche39 ». Depuis la guerre,
la censure se raidit devant la multiplication et l’origine diverse (et internationale) des
productions cinématographiques. Elle vise à se prémunir contre des images venues de
l’extérieur, qui, montrées sans filtre, pourraient déconcerter les esprits et ainsi lutter contre les
risques d’extension du communisme40 et d’autres mouvements politico-religieux considérés
comme « subversifs » par les autorités. L’administration propose aussi de faire surveiller par un
fonctionnaire de l’administration les prises de vue de cinéastes « sujets à caution », en
particulier ceux qui jettent le discrédit sur les méthodes ou les résultats de l’œuvre coloniale à
l’égard de l’opinion publique à l’étranger41.
En fonction de leurs thèmes (violence, amours clandestins entre deux « races » ou
communautés, corruption, insurrection, mauvais rôles de Blancs, etc.), la Commission de
censure du gouvernement général distingue les films autorisés à être montrés aux « masses
(analphabètes) » de ceux destinés aux « immatriculés », aux membres de ciné-forums et cercles
d’études42. Par ailleurs, soucieux de l’incorporation progressive de Congolais aux organes de
décision, l’administration désigne, dès 1956, des personnalités « évoluées » telles qu’Albert
Mongita, Joseph Kasavubu ou Simon Mokemo43 en tant que membres à part entière de la
Commission de censure. Sur 847 films présentés à la commission en 1956, 97 séances sont
interdites, 69 films refusés, 38 admis avec coupures et 7 admis pour certaines catégories44.
Toutefois, un bon nombre de films passent entre les mailles de l’administration et font l’objet

39

AA, GG, 5657, lettre du ministre Tshoffen au gouverneur général, 12 avril 1933.
Voir Gijs Anne-Sophie (2016), Le pouvoir de l’absent. Les avatars de l’anticommunisme au Congo (1920-1961), Bruxelles-BernBerlin, P.I.E. Peter Lang.
41
AA, GG, 5942, note du secrétaire général Welvaert pour le gouverneur général, Léopoldville, 9 décembre 1954.
42
Ainsi, par exemple, le film « Nurse Ademola » est refusé parce qu’il présente la vie « trop luxueuse d’une nurse de couleur en
Angleterre », le film « Antwerp » est refusé car il montre les « travaux manuels » au port d’Anvers tandis que « Jeux de l’été et de la
mer » est réservé aux évolués car il montre notamment des bains de soleil. AA, GG, 241, registre de films, dont ceux censurés pour
indigènes, 1945-1949.
43
Albert Mongita Likele (1916-1985) est une personnalité aux talents multiformes du monde culturel congolais : journaliste, rédacteur
et présentateur de l’actualité, producteur et animateur d’émissions de radio, conteur, écrivain, comédien, chorégraphe et danseur,
peintre, cinéaste et acteur ; Joseph Kasavubu (ca. 1917-1969) est président de l’Association des Bakongo (Abako) qui devient parti
politique en 1955 et est élu premier bourgmestre congolais de la commune de Dendale (Léopoldville) avant de devenir le premier
président de la République du Congo le 30 juin 1960 ; Simon Mokemo Simon est le principal propagandiste de troupes scoutes à
Léopoldville et Boma.
44
AA, GG, 18642, service de l’Information, contrôle des films cinématographiques.
40

REVUE D’HISTOIRE CONTEMPORAINE DE L’AFRIQUE

LE CONGO BELGE SUR PELLICULE |

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de diffusions clandestines ou privées45, et ce jusqu’à l’indépendance, accentuant les craintes de
l’administration coloniale de perdre le contrôle sur les films en circulation.

Tensions visuelles autour d’une indépendance annoncée
Succès et anxiétés cinématographiques dans un contexte de bouleversements
socio-politiques
Malgré la difficulté de déterminer le niveau de popularité du cinéma dans la colonie, la
multiplication de la production et des projections auprès de divers publics congolais semblent
indiquer un considérable succès qui s’amplifie surtout à la fin de la décennie 1950. Les habitants
des centres urbains, les membres de groupes et associations culturelles et sociales, les
travailleurs des grandes entreprises et les écoles forment les publics privilégiés. Des séances
cinématographiques sont organisées dans tout le pays pour atteindre les publics ruraux,
notamment par le biais de groupes mobiles de projections, comme cela se fait déjà dans les
colonies britanniques. L’extension du cinéma éducatif, en particulier, est favorisé par une
multiplication du nombre de « correspondants » (organismes commerciaux, industriels et
miniers, missions religieuses, établissements scolaires, organismes officiels, privés) qui
externalisent la diffusion de la production vers l’ensemble des provinces. Au nombre de 22 en
1946, l’on compte 152 de ces intermédiaires en 1959. Sous son nom de producteur
« Congofilms », la section Ciné-Photo a dépassé ses espérances. Entre 1956 et 1957, elle double
ses chiffres avec le prêt de plus de 700 films mensuels et l’organisation de 15 450 séances46
pour quelque 8 674 000 spectateurs (sur une population totale de quelque 13 millions de
Congolais et de 118 000 étrangers)47; elle met en service 543 appareils de projections dans
toutes les provinces de la colonie. Par ailleurs, 266 salles de spectacles (salles des fêtes, cercles
d’« évolués », musées, centres sociaux, cercles pour Européens, salles de sociétés, etc.) sont
également équipées en matériel de projection.
Face à cette évolution rapide, l’État et les missions montrent des signes d’anxiétés
croissantes par rapport à la nécessité de contrôler des populations colonisées dont le destin
leur échappe peu à peu face aux pressions libérales et anticoloniales de plus en plus insistantes.
L’arrivée au pouvoir d’un ministre des Colonies libéral, Auguste Buisseret, change la donne et
met en tension les accords historiques entre les autorités coloniales, majoritairement
catholiques et l’Église. Désormais un projet anticlérical marque une profonde révision du
régime scolaire au Congo, sous le contrôle des missions, en faveur d’un enseignement officiel
laïque, détaché de tous liens avec ces dernières. En réaction à ce changement de perspectives
politiques en métropole, l’Église catholique et une large majorité des coloniaux, incarnées par
le gouverneur général Léon Pétillon, manifestent leurs vives oppositions. Ce prélude à la crise
entre les milieux catholiques traditionnels et le mouvement laïque annonce de manière
tangible la voie vers la décolonisation. Le rôle des missions catholiques dans l’enseignement,
mais aussi dans le cinéma est, de la sorte, dévalorisé.

45

AA, GG, 5942, chef de service Tollet au gouverneur de la province de Léopoldville, 14 avril 1955.
AA, rapport annuel d’activités du service de l’Information pour l’année 1957.
47
Chambre des Représentants, Rapport sur l’administration du Congo Belge pendant l’année 1958 présenté aux Chambres législatives,
Bruxelles, Établissements Généraux d’Imprimerie, 1959, p. 16.
46

N° 1 MEDIAS ET DECOLONISATIONS EN AFRIQUE (ANNEES 1940-1970), EN LIGNE, 2021.

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| PATRICIA VAN SCHUYLENBERGH

De même, des désapprobations plus marquées apparaissent face aux messages et
images officielles basés sur une idée d’égalité qui ne transparaît ni dans la vie quotidienne du
Congo, ni dans les décisions politiques, d’autant que des clivages subsistent encore dans la
majorité des milieux coloniaux, profondément résistants à l’idée d’égalité raciale et où relations
entre Blancs et Noirs représentent des exceptions. La société coloniale, urbaine en particulier,
montre notamment une méconnaissance profonde des réalités africaines largement vécues
dans l’espace rural48.
L’éveil de la conscience politique autour de revendications d’indépendance se
manifeste également dès 1955-1956 par une série d’écrits politiques qui annoncent des
changements profonds : le Manifeste de Conscience africaine49 (1956), œuvre d’un petit groupe
d’« évolués » de Léopoldville, et généralement considéré comme le départ des doléances
nationalistes, rejoint les principales propositions du Plan (1955) de Jef Van Bilsen50 proposant
de mener le Congo à l’émancipation politique complète dans un délai de trente ans. Par contre,
le « Contre-Manifeste » de l’Abako51 (1956) formule une émancipation immédiate, en même
temps qu’est fermement rejetée l’idée de la « communauté belgo-congolaise ». Ces écrits
indiquent déjà les clivages internes dans le champ politique entre unitaristes et fédéralistes,
entre radicaux et modérés, entre des personnalités comme Joseph Kasavubu, président de
l’Abako qui représente l’aile fédéraliste modérée et Patrice Lumumba qui s’affirme dès la fin
1958 avec un Mouvement national congolais unitariste radical52. Désormais, ce sont les
manifestes congolais et l’essor d’une culture urbaine autonome qui représentent les signes
distinctifs du changement à venir. Et une plus grande liberté de penser et de communiquer.
La production cinématographique coloniale va alors ressentir ces changements
importants en répercutant de nouveaux messages qui montrent l’ambiguïté entre les images
qui mettent en valeur l’apparence matérielle d’une colonisation belge prospère et fière et des
interrogations plus franches sur les dégradations observables de l’édifice colonial.

Des cinéastes et exploitants face aux zones d’ombre du système colonial
Marqué par une accélération des interrogations et des confrontations politiques et
idéologiques, le gouvernement belge veut se montrer particulièrement prudent envers
l’opinion publique nationale et internationale qui relaient les critiques et attaques
anticoloniales. Il s’agit d’éviter des sujets sensibles, notamment la diffusion d’informations
maladroites destinées à la population congolaise, tout en accentuant des armes de séduction
48

Voir notamment à ce sujet Omasombo Tshonda Jean et Vanthemsche Guy (2020), « 1960 : la fin de la colonisation du Congo »,
in I. Goddeeris, A. Lauro, G.Vanthemsche (dir.), Le Congo colonial…, op. cit., pp. 81-93 ; Omasombo Tshonda Jean (2020), La
décolonisation du Congo belge. La gestion politique des vingt-quatre derniers mois avant l’indépendance, Juillet 1958-Juin 1960,
Tervuren, Musée royal de l’Afrique centrale ; M’Bokolo Elikia et Sabakinu Kivilu Jacob (dir.) (2020), L’indépendance du Congo et ses
lendemains, Tervuren, Musée royal de l’Afrique centrale.
49
Voir Tousignant Nathalie (2009), Le Manifeste Conscience Africaine (1956). Élites congolaises et société coloniale. Regards croisés,
Bruxelles, Presses de l’Université Saint-Louis.
50
Van Bilsen Jozef (1956), « Un plan de trente ans pour l’émancipation politique de l’Afrique belge », Les dossiers de l’Action sociale
catholique, 2, pp. 83-111.
51
L’Alliance des Bakongo, qui a été créée en 1950 en tant qu’association culturelle visant à unifier, conserver et perfectionner la
langue kikongo, se transforme en 1956 en parti politique ethnico-régional. Son Manifeste se prononce pour l’institution d’une
fédération congolaise pensée sur des bases ethniques. Voir notamment Verhaegen Benoît et Tshimanga Charles (2003), L’Abako et
l’indépendance du Congo belge, Tervuren-Paris, Institut africain-L’Harmattan.
52
De Villers Gauthier (2012), « Du Congo au Zaïre. Épilogue d’une décolonisation », in M. Dumoulin, et al. (dir.), Du Congo belge à
la République du Congo 1955-1965, Bruxelles-Bern-Berlin, P.I.E. Peter Lang, Coll. Outre-Mers, pp. 120-121.

REVUE D’HISTOIRE CONTEMPORAINE DE L’AFRIQUE

LE CONGO BELGE SUR PELLICULE |

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sur « les réalisations morales, sociales et politiques et sur notre politique éminemment
respectueuse de la personnalité humaine53 ». À Bruxelles, InforCongo participe activement à la
mise en valeur de la colonie à l’Exposition Internationale de Bruxelles de 1958 avec comme
point d’orgue, le film Congorama qui exalte un Congo historique façonné par les pionniers et
les colons, exagère les liens étroits unissant la colonie à la « mère patrie », valorise les nouveaux
modèles socio-politiques, célèbre la beauté et la richesse des ressources naturelles et
culturelles du territoire. Face à des critiques de plus en plus tangibles à propos du caractère
raciste de la politique coloniale, InforCongo appuie davantage sur un engagement colonial
tourné vers l’instauration d’une « communauté belgo-congolaise » et réalise, à cet effet, une
série de films éducatifs tournés en Belgique sur la vie quotidienne des « bons » travailleurs
belges (Douze heures avec Joseph employé des postes, Les Belges au travail, Une journée dans
une famille d’ouvriers ou Un fermier belge), afin de montrer aux travailleurs congolais comment
vivent leurs « frères » belges. De même, des missionnaires comme Cornil réalisent plusieurs
films de fiction (Au bord de l’abîme, Pêcheurs de mer, Terre d’Espoir, Marie Lépreuse, etc.) qui
proposent des solutions aux problèmes sociaux conflictuels engendrés par le passage des
sociétés communautaires dites « traditionnelles » à une « modernité » occidentale favorisant
l’individualité comme ferment de l’émancipation.
Alors que le cinéma est censé être sous contrôle, c’est ce même espace public procuré
par le cinéma qui permet à des voix dissidentes de s’exprimer en Belgique et au Congo. En
marge de l’Exposition universelle de Bruxelles de 1958, les manifestations cinématographiques
organisées du 24 au 26 juillet dans le cadre des Rencontres Internationales « Le Cinéma et
l’Afrique au sud du Sahara54 » à l’initiative du Groupe Ciné-Photo de la Section du Congo belge
et du Ruanda-Urundi engagent certains participants tels que les anthropologues et cinéastes
Pierre-Louis van den Berghe et Luc de Heusch, à dénoncer les images « officielles » des
Congolais jugées arriérées, inexactes, voire déformées, notamment face au racisme, à la
pauvreté et au système d’exploitation coloniale. En tant que rapporteur des débats, De Heusch
indique que de manière unanime, la production cinématographique mondiale offre une image
« trop souvent inexacte ou déformée » de l’Afrique et dénonce le règne d’une censure qui
bâillonne la liberté d’expression :
La censure existe cependant déjà, sous une forme larvée, infiniment pernicieuse : l’auto-censure.
Soucieux de ne choquer personne, préoccupés trop exclusivement de montrer les progrès
accomplis par les sociétés africaines au contact de la civilisation occidentale, les cinéastes,
travaillant directement ou indirectement pour les pouvoirs publics, semblent s’être mis le plus
souvent au service d’une propagande inefficace ou malencontreuse.55

Le film Tokende (1958) de Gérard De Boe, large fresque consacrée aux soixante années
d’activités missionnaires catholiques, se voit reproché la conformité d’un message trop orienté
et peu conforme à la réalité, ainsi que son absence de position critique. Des cinéastes engagés
par l’État commencent à se plaindre aussi plus ouvertement du manque de liberté dans le choix
53

Rapport du Conseil Colonial, Bulletin officiel du Congo belge, 1955, pp. 898-900.
Rapport général du Groupe Ciné-Photo, section du Congo Belge et du Ruanda-Urundi, Exposition Universelle et Internationale de
Bruxelles 1958. Ces rencontres sont présidées par Louis van den Berghe, directeur de l’Institut pour la Recherche Scientifique en

54

Afrique centrale (IRSAC) et par Willy Pitzele, administrateur de nombreuses sociétés, assistés de Luc de Heusch, cinéaste et professeur
d’ethnographie à l’Université libre de Bruxelles, en tant que rapporteur général des Rencontres.
55
Ibid., pp. 103-104.

N° 1 MEDIAS ET DECOLONISATIONS EN AFRIQUE (ANNEES 1940-1970), EN LIGNE, 2021.

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| PATRICIA VAN SCHUYLENBERGH

des thèmes de reportage proposés, en particulier ceux montrant les zones d’ombre du modèle
colonial (pauvreté, chômage urbain, inégalités socio-économiques, racisme). Le cinéaste
Delcourt dénonce le refus absolu notifié au réalisateur Henri Philips par le service de
l’Information de traiter des sujets sensibles comme l’enfance désœuvrée, l’enfance délinquante,
ou encore, l’émancipation de la femme congolaise56.
Au Congo, les missionnaires Van den Heuvel et Cornil, l’indépendant Jacques Surbeck
ainsi que Louis Van Bever et André Scohy, les responsables respectifs de la section Ciné-Photo,
contestent le peu de place laissée aux Congolais dans une création cinématographique en
phase avec les aspirations africaines naissantes, à l’instar, selon eux, des industries africaines
qui se développent alors dans les colonies britanniques et françaises et qui forment des locaux
à la production et aux techniques cinématographiques57. Le cheminement émancipatoire reste
lent. Bien que les « évolués » soient progressivement intégrés dans des groupements culturels
leur permettant de visionner certains films censurés pour les masses, d’être membres de la
Commission de censure cinématographique et de défendre leurs créations artistiques dans des
cadres bien déterminés (rédacteurs de la revue La Voix du Congolais, animateurs à Radio
Congo Belge Africaine), ils restent relégués à des tâches administratives subalternes
(électriciens, opérateur-assistants, aide-monteurs, manutentionnaires et dactylographes),
notamment au service de l’Information58 et assistent les cinéastes belges sans jamais pouvoir
prendre l’initiative de la réalisation59.

Illustration n° 2 : Personnel congolais du service de l’Information au gouvernement général à
Léopoldville60

56

AA, Cabinet, 1556, note manuscrite de Delcourt, Léopoldville, 13 mars 1959.
AA, Cabinet, 1556, discours de J. Surbeck aux Rencontres Internationales sur le cinéma en Afrique noire [1958]. Il est néanmoins
important de nuancer les affirmations de ces personnalités en soulignant que les techniciens africains engagés par le Colonial Film
Unit britannique ou les étudiants africains formés à l’Institut des Hautes Études cinématographiques (IDHEC) français sont en fin de
compte très peu nombreux tandis que leur liberté d’expression est fortement entravée.
58
Van Bever L., Le Cinéma…, op. cit., p. 22.
59
Convents G., Images et…, op. cit., pp. 154-166.
60
MRAC, HP.1956.15.2615, photo H. Goldstein, 1946, SOFAM ©.
57

REVUE D’HISTOIRE CONTEMPORAINE DE L’AFRIQUE

LE CONGO BELGE SUR PELLICULE |

31

L’appui à l’entreprise privée est également freiné. Ainsi, après une longue quête auprès
de diverses instances politiques au Congo et en Belgique, Jean-Émile Malundu et Jean-Aimé
Longby se voient refuser leur demande de crédit pour l’ouverture d’une salle de cinéma dans
la cité indigène. Dans une lettre adressée à Joseph Kasavubu, alors membre du Collège Exécutif
à Léopoldville, ceux-ci écrivent :
Nous vous signalons, à titre confidentiel, qu’un jeune homme européen âgé de 22 ans a obtenu
tout dernièrement auprès du Crédit du Colonat pour le lancement de ses affaires une somme de
un million de francs et pour un Noir, on refuse catégoriquement sous prétexte qu’il n’a pas
d’expérience ou encore qu’il est trop jeune […] ???61
Illustration n° 3 : Groupe réuni de Louis Van Bever au Ciné-Club congolais62

Excepté quelques acteurs engagés temporairement dans des films ou des séries comme
Matamata et Pilipili, créées par le père Van Haelst sur le modèle hollywoodien des Laurel et
Hardy, ceux-ci ne font pas carrière, même s’ils persistent dans la mémoire collective du pays
en raison de l’important succès rencontré63. À Léopoldville, le Groupement culturel belgocongolais qui avait fondé Cinécole, un ciné-club destiné à réaliser des films d’inspiration
congolaise64 (illustration n°3) ne produit pas les effets escomptés, malgré l’influence
déterminante de son président Albert Mongita et sa co-réalisation d’un premier film réalisé par
61

AA, Cabinet, 3761, lettre de Malundu et Longby à Kasavubu, Léopoldville, 27 avril 1960.
MRAC, HP.2009.3.411, photo H. Goldstein, 1951, SOFAM ©.
63
Hunt Nancy Rose (2002), « Tintin and the Interruptions of Congolese Comics », in P. Landau et D. Kaspin (dir.), Images & Empires.
Visuality in Colonial and Postcolonial Africa, Berkeley-Los Angeles-London, University of California Press, pp. 90-123 ; Engelen Leen
(2010), « Une bonne dose de sucre pour faire avaler la pilule amère. La série de films Matamata et Pilipili du R.P. Albert Van Haelst »,
in P. Van Schuylenbergh et M. Z.A. Etambala (dir.), Patrimoines…, op. cit., pp. 166-179.
64
Anonyme, Le Courrier d’Afrique, 30 octobre 1950.
62

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des Congolais et intitulé La leçon de cinéma (1951). Son souhait de laisser l’initiative, la
réalisation et le montage des films aux Congolais ne reçoit pas plus le soutien de la part de
l’administration. Pourtant Louis Van Bever (fonctionnaire en charge de cette question) avait
commencé dès 1950 à donner des cours privés à ses membres65 et insistait sur la nécessité
d’engager assistants et techniciens locaux, appelés à remplacer progressivement les Belges66.
Cet appel fut peu entendu.
Ces maigres initiatives sont accessoirement comblées par Surbeck et Cornil qui tentent
les premiers l’aventure de la collaboration congolaise. Établi dans la cité indigène de
Bandalungwa (Léopoldville), Cornil y crée en 1957 le Centre expérimental africain
cinématographique (Centrera). Conscient du changement progressif des mentalités des élites
congolaises, de leur assimilation plus rapide que prévue aux messages et techniques
cinématographiques et de leur exigence plus grande par rapport aux films projetés, il prône
une réorganisation du cinéma sur des bases nouvelles, plus adapté au temps présent et qui
réduirait aussi la disparité de plus en plus flagrante entre le cinéma urbain et le cinéma rural.
Tandis que Lukunku Sampu et Emmanuel Lubalu réalisent des films publicitaires et des
reportages d’actualités pour Ekebo-Films67, Antoine Bumba Mwaso et Dieudonné Mambula
deviennent assistants permanents du missionnaire.

Illustration n° 4 : André Cornil et ses assistants, Antoine Bumba Mwaso et Dieudonné
Mambula à Bruxelles en 195868

65

Convents G., Images et…, op. cit., p. 157.
Van Bever L., Le Cinéma…, op. cit., p. 22.
67
Convents G., Images et…, op. cit., p. 164.
68
MRAC, HP.1979.42.1, photographe non identifié, 1958.
66

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Antoine Bumba est présenté comme l’espoir du cinéma congolais. Recruté par Cornil alors qu’il
fait partie de la Compagnie des commandos de l’École centrale de Luluabourg, il devient
l’acteur principal de son film Le Sergent-Major avait une fille (1957). Après le tournage, il
accompagne Cornil en Belgique où il suit des cours de photographie et de prises de vues
cinématographiques dans l’entreprise photographique Gevaert pour retourner au Congo avec
en poche un diplôme de photographe-cinéaste. Ils tourneront ensemble plusieurs reportages
d’actualités dont l’arrivée à Léopoldville de Jean Bolikango, grande figure de l’élite congolaise69
et délégué aux travaux de la Table Ronde à Bruxelles qui devait formaliser les conditions de
l’indépendance, ainsi que les cérémonies et les fêtes de l’indépendance.

Images désenchantées de la décolonisation
L’idée de décoloniser le Congo et la nécessité de fixer des délais d’accès à l’indépendance sont
revendiquées dès le milieu 1958, par le biais d’une nouvelle génération d’hommes politiques
belges de gauche et chrétiens progressistes, sensibilisés aux mouvements de décolonisation
dans le monde, et d’acteurs politiques congolais revendiquant un nationalisme congolais plus
radical. Aux émeutes du 4 janvier 1959 à Léopoldville suite à l’annulation d’un meeting de
l’Abako, succèdent la déclaration royale du 13 janvier et le voyage éclair, à la mi-décembre, et
sous sa propre initiative, du roi Baudouin, accompagné du ministre des Colonies August De
Schryver. Ces événements qui précèdent l’annonce officielle d’une issue indépendantiste
trouvent échos dans une importante propagande des dirigeants des nouveaux partis politiques
congolais dans tout le pays. Les revendications des élites et des « évolués » (agents de
l’administration, commis, clercs, employés) gagnent le monde rural. La rupture d’une « pax
publica » se produit au profit d’agitations de moins en moins maîtrisées. Dans la capitale, la
croissance inattendue de la ville a entraîné des phénomènes peu pris en compte et que les
autorités préfèrent ne pas montrer : la délinquance, la misère, la corruption contrastent avec
des images cinématographiques grandiloquentes (Léopoldville présentée comme une grande
ville occidentale, l’essor touristique, les industries de pointe). Une violence urbaine s’exprime
alors à travers une jeunesse désœuvrée, issue de l’exode rural massif, socialement déstabilisée70
et à la recherche des nouveaux héros qu’elle trouve notamment dans les projections
clandestines et privées de westerns américains tels que La dernière chasse, L’homme du
Kentucky, Le triomphe de Buffalo-Bill ou Vera Cruz71. Des demandes à l’accès libre des salles
cinématographiques pour tous, à la suppression des règles ségrégationnistes et à l’ouverture
des ciné-clubs aux femmes se multiplient. L’administration coloniale a peu de prise sur ce
phénomène. Des personnalités comme Surbeck, qui plaident en faveur de distractions plus
« saines » (scoutisme, sports, théâtre) pour les jeunes Congolais72, réalise Victoire sur la haine
qui montre la reconstruction d’habitations européennes par des élèves de l’école
professionnelle de la commune de Ndjili venus bénévolement « réparer les torts causés » et
69

Jean Bolikango est un journaliste associé à toutes les activités et organisations d’évolués dans les années 1950. En tant que
représentant parmi les plus importants de l’élite congolaise, il devient commissaire général au Service de l’Information du
gouvernement général à Léopoldville. Willame Jean-Claude (1990), Patrice Lumumba : la crise congolaise revisitée, Paris, Karthala,
p. 370.
70
Ces gangs urbains de bills, comme on les appelait, s’inspiraient surtout de la figure emblématique de Buffalo Bill et développaient
une véritable structure socioculturelle de la violence, munie de ses codes de comportements et ses slogans. Voir à ce sujet, Gondola
Didier (2016), Tropical Cowboys: Westerns, Violence, and Masculinity in Kinshasa, Bloomington, Indiana University Press.
71
AA, GG, 16270, sûreté, censure films pour Indigènes.
72
Surbeck Jacques, « Une expérience intéressante », Courrier d’Afrique, 3 février 1959.

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propage le message que « tous les noirs n’avaient pas l’esprit du 4 janvier73 », en référence aux
émeutes de janvier 1959.
Néanmoins, plusieurs films commencent à témoigner alors plus ouvertement d’un
avenir préoccupant, comme La Croisée des chemins de Louis Pitzele (1959) qui se focalise sur
l’octroi des droits politiques aux congolais et l’accession progressive de la colonie à
l’autonomie et au libre arbitre. En montrant les Congolais se rendant massivement aux urnes,
les commentaires ne mentionnent en aucun cas qu’Européens et Africains votent ensemble
mais soulignent davantage les chemins qui se coupent et se détournent que ceux qui
unissent74. En 1960, la production cinématographique est considérablement ralentie, voire
brusquement stoppée. Sonne ainsi le glas d’un cinéma d’État convaincu du bien-fondé de ses
choix, alors que les sociétés missionnaires continuent de s’autofinancer pendant quelques mois
en vendant, jusqu’à épuisement, des copies de leurs productions. Les cinéastes quittent le
Congo, comme l’abbé Cornil, dont le dernier film de fiction inédit, Wadimbisa (1960), dresse le
portrait de l’artisanat en milieu rural pour illustrer le changement des rapports au profit des
Congolais : les Européens y sont quasi absents et ne sont plus présentés en position de force
au profit d’un héros congolais intégré, quant à lui, dans un système professionnel librement
consenti. Ce sous-entendu de la prochaine remise en cause de l’État colonial est confirmé par
un autre film missionnaire, L’impasse (1960), du père Éric Weymeersch. Réalisé après les graves
troubles qui suivent l’indépendance, ce film évoque le retour amer en Belgique d’un Père Blanc
dont la mission a été brûlée par des émeutiers. Cette véritable remise en question d’une
prétendue entente belgo-congolaise, cette désillusion complète de l’activité évangélique au
Congo, marquent la « fin symbolique d’une production belge largement placée sous le signe
de l’euphorie coloniale75 ».

***

En 1965, Crawford Young parlait « d’autosatisfaction bornée76 » pour caractériser le
climat de l’État colonial entre 1945 et 1960, convaincu de son invulnérabilité, et cela, malgré
les mouvements de décolonisation, les changements d’orientations politiques et les
oppositions grandissantes en Belgique et au Congo. Le cinéma offre une parfaite illustration
de ces contradictions. Il révèle des tensions croissantes entre plusieurs sphères de pouvoir et
d’influence. D’abord entre Bruxelles et Léopoldville, toutes deux s’appliquant à vouloir
centraliser et contrôler l’ensemble de la production alors que le gouvernement général vise
une plus grande autonomie de son cinéma. Un cinéma colonial métropolitain évolue ainsi en
parallèle d’un cinéma « national » au Congo. Il témoigne de la collaboration active entre le
gouvernement général et les missionnaires catholiques pour instruire les populations
congolaises en matière de santé, d’éducation, de développement psychologique et de confort
matériel. Il mise surtout sur l’influence des « évolués » qui représentent, selon eux, la courroie

73

AA, Cabinet, 3761, dossier 350-Films.
Pour une analyse plus approfondie de ce film, ainsi que celui relatant le Voyage du roi au Congo belge. Noël 1959 (H. Philipps,
1959), se reporter à l’article de Van Schuylenbergh Patricia (2012), « Formater les regards, décoloniser les esprits ? Éducation et
transition politiques à travers les films d’archives », in M. Dumoulin, et al, Du Congo belge…, op. cit., pp. 239-251.
75
Ramirez Fr. et Rolot Ch., Histoire du…, op. cit., p. 219.
76
Young Crawford (1965), Politics in the Congo. Decolonization and Independence, Princeton, Princeton University Press, p. 161.
74

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de transmission de la morale chrétienne dominante et des valeurs familiales, éducatives, de
savoir-vivre qui légitiment l’action civilisationnelle des colonisés. Le cinéma manifeste donc un
ordre colonial écrasant qui privilégie le mythe d’une communauté belgo-congolaise
harmonieuse, faisant miroiter une émancipation individuelle, sociale, économique et bientôt
politique. C’est aussi par le biais du cinéma que des critiques secouent l’édifice colonial : elles
se cristallisent autour des thèmes que le pouvoir colonial préfère cacher, sur la participation
des Congolais à la réalisation et à la diffusion cinématographique ; en parallèle, des films
internationaux passent à travers les mailles de la censure et alimentent des convoitises et des
rêves d’accès à d’autres réalités. Bon nombre de films montrant des aspects méconnus de
violence et de déviances occidentales (inégalités sociales et de genre, conflits, racisme,
prostitution, etc.) sont en totale contradiction avec les images contrôlées de la paix coloniale.
Le succès grandissant du cinéma, surtout dans les espaces urbains en plein essor dans les
années 1950, devient, pour les autorités coloniales, un enjeu sécuritaire qui traduit leurs
nombreuses anxiétés et révèlent une perte de contrôle progressif sur le terrain, alors même
qu’elles continuent, avec un certain aveuglement, à montrer un climat de quiétude généralisé.
Les films tournés durant cette période de décolonisation constituent sur ce point le reflet d’une
colonisation qui a eu peur d’affronter les faiblesses inhérentes de son système, et notamment
l’africanisation trop tardive de ses cadres, dont le cinéma colonial propose un exemple
significatif.
Cet article qui développe un vaste sujet en ces quelques principaux traits en appelle
d’autres, plus pointus, notamment à propos de la réception publique des images, des lieux de
projections (salles de cinéma, théâtres, lieux culturels), des réseaux cinématographiques
indépendants et du phénomène de censure. Il pousse aussi à confronter la propagande
cinématographique à d’autres types de propagande, la radiodiffusion en particulier. Cette
thématique est ainsi loin d’être épuisée.

Patricia Van Schuylenbergh
Service Histoire et Politique, Musée royal de l’Afrique centrale, Tervuren (Belgique)

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