Fiche du document numéro 22190

Attention : ce document exprime l'idéologie des auteurs du génocide contre les Tutsi ou se montre tolérant à son égard.
Num
22190
Date
Mercredi 1er octobre 1997
Amj
Auteur
Fichier
Taille
1455931
Titre
Interrogatoire de Jean Kambanda - Cassette # 28 [Les ministres du GIR : Casimir Bizimungu, Gaspard Ruhumuliza et Pauline Nyiramasuhuko]
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Résumé
Role of Casimir Bizimungu, Minister of Health of the GIR.
Source
Type
Audition judiciaire
Langue
FR
Citation
#L048513

Face A de la cassette 28.

PD _Nous sommes mercredi, le 1er octobre 1997, à 14 heures 44 minutes, nous allons continuer
la rencontre que nous avons avec Monsieur Kambanda, avant comme tous les jours nous allons, nous
allons vous, je vais vous lire la, les directives relatives à l'enregistrement d’un interrogatoire. Cet
interrogatoire est présentement enregistré, nous sommes dans une salle d’interrogatoire à Dodoma.
Il est 14 heures 45, le ler octobre 1997. Les personnes présentes sont priées de s'identifier afin qu’on
reconnaisse qu’on leur voix sur l’enregistrement, s’il vous plaît.

TK -Jean Kambanda.

MD -Marcel Desaulniers.

PD -Pierre Duclos. A la fin de l’interrogatoire, comme il est de coutume, Monsieur Kambanda,
on va sceller devant vous les rubans, et nous allons les conserver à notre niveau. Une copie de cet
enregistrement vous sera donné dès que ce sera possible à vous ou à votre représentant. Je vais
maintenant vous lire l’avis des droits au suspect. Comme tous les jours. Avant de répondre à nos
questions vous devez comprendre vos droits. En vertu des articles 42 et 43 du règlement de preuve
et de procédure du Tribunal pénal international pour le Rwanda, nous devons vous informer que notre
entretien est présentement enregistré et que vous avez les droits suivants : premièrement, vous avez
le droit d’être assisté d’un avocat de votre choix ou d’obtenir les services d’un avocat sans frais si
vous n’avez pas les moyens financiers de payer les services d’un avocat. Deuxièmement, vous avez
le droit d’être assisté d’un interprète sans frais, si vous ne pouvez pas comprendre la langue utilisée
lors de l’entrevue. Troisièmement, vous avez le droit de garder le silence si vous le souhaitez.
Quatrièmement, toute déclaration que vous ferez sera enregistrée et pourra servir de preuve contre
vous. Cinquièmement, si vous décidez de répondre à nos questions sans la présence d’un avocat, vous
pouvez arrêter l’entrevue en tout temps et requérir les services d’un avocat. Je vais vous lire la partie
qui est, qui s’intitule renonciation aux droits. J’ai lu ou on m'a lu dans une langue que je comprends
l'énoncé de mes droits, je comprends l’étendue de mes droits, je comprends également que ce que
je dis est présentement enregistré. Je comprends et je parle la langue utilisée lors du présent
interrogatoire, soit directement, soit par l'intermédiaire de l'interprète qui m’a été assigné. Je suis prêt
à répondre à vos questions et à faire une déclaration. J affirme en toute connaissance de cause que

je ne désire pas d’avocat en ce moment. Aucune promesse ni menace ne m'a été faite et aucune



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pression n’a été exercée sur moi. Si vous êtes d’accord avec la renonciation aux droits, je vous
demanderai de signer la formule, signature du suspect, nom du suspect, la date, l'heure et le lieu, s’il
vous plait.
MD -Vous êtes d’accord ?
JK -Oui.
PD -Marcel, si tu veux signer comme témoin après que Monsieur Kambanda ait signé à... 14
heures 49 ?
MD et JK -Oui
PD -Hier, après les enregistrements, nous avions scellé les copies 27, la copie A du ruban 27, puis
cet après-midi avant de reprendre, on a scellé la copie A et B, la copie B pardon des rubans 26 et 27.
En votre présence, vous avez signé à l’en-dos, c’est ça Monsieur Kambanda ?
JK -Oui.
PD -Nous en étions rendus hier, je crois à, Monsieur le ministre Casimir.
K -Bizimungu.
PD -Bizimungu?
JK -Au niveau du discours, c’est, c’est un ancien ministre des affaires étrangères pendant près
de cinq ans, il a eu à négocier les accords de cessez-le-feu avec le FPR en 91-92. Au cours de ces
négociations, il avait qualifié les soldats du FPR de simples vagabonds, et ces mots lui ont, lui furent
toujours reprochés. Par la suite, il devint d’une prudence extrême en mesurant chaque mot de ses
discours. Au conseil des ministres, lorsqu'il était présent il me rapportait avec la même prudence, les,
les propos qu’il avait recueilli auprès des missions étrangères. Au niveau des armes, je ne l’ai jamais
vu avec une arme. Il n’a jamais été impliqué directement dans l’achat d'armes. Treillis : jamais vu
avec un treillis. Connaissance : il assistait le 11 avril 94 au conseil des ministres lors de la présentation
des préfets. Comme ministre de la santé il a été informé de l'existence de très nombreux cadavres au
centre hospitalier de Kigali. Dans sa lettre de démission datée du mois d’août 94, il reproche au
gouvernement sa non-intervention dans les massacres de populations rwandaises. Il a dû intervenir
dans l’ensevelissement des corps à Kigali. Au niveau de la ligne de conduite : je considère qu'il est
hypocrite, il reprochait aux membres du gouvernement de ne pas avoir agit contre l’élimination des

populations alors qu'il était lui-même membre de cette institution. Je l’ai confronté à ce reproche en



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lui demandant sa contribution contre ces massacres, il ne m’a jamais répondu, se contentant de
justifier les montants qu’il aurait dépensé au nom du gouvernement. Ses missions extérieures n’ont
jamais apporté de résultats concrets. Il quittait pour faire ses visites et jamais nous n’obtenions de
résultats officiels. Tout au plus il faisait du travail de police, il se justifiait en nous transmettant ses
itinéraires et ses agendas. Ses voyages visaient plus à soigner son image et à préparer ses alibis qu’à
servir le pays. Sur le plan militaire, je ne connais pas son passé militaire. Je ne crois pas qu'il en ait
un. Je n’ai pas d’information concernant ses relations avec les militaires pendant cette période.

PD -On peut peut-être commencer comme à l’habitude, il occupait quel ministère lui, ce
Monsieur-là ?

JK -Il était ministre de la santé.

PD -C’était le ministre de la santé. Est-ce que c’était, heu, c’est un ministère qu'il occupait depuis

longtemps ?
TK Oui, c’est un ministère qu’il occupait au moins depuis 92.
PD -Au moins depuis 92. Auparavant vous avez dit qu'il était ministre des affaires étrangères ?

JK -Oui. Auparavant il était.

PD -Dans le temps du parti unique MRND ?
K -Oui.

PD -Longtemps ?

JK -Longtemps, oui.

PD -Longtemps ?

JK -Oui.

PD -On peut parler de combien d’années peut-être ?

JK -Je peut, je pense que ça pouvait être autour de 3 à 5 ans.
PD -3à5ans.

le -Oui.

PD -Donc c'était quelqu'un qui était. on peut dire un peu féru en politique rwandaise, c'était
quelqu'un qui était connu, qui avait l'expérience de la politique.
JK -C'était quelqu’un qui était connu, qui avait l'expérience de la politique.

PD -Ok. Ce Monsieur Bizimungu là, a suivi, selon les, selon ce qu’on avait fait dans le



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diagramme, le gouvernement à Kigali, Gitarama et Gisenyi ?

K -Oui.

PD -Par la suite est-ce que vous savez ce qu’il a fait ?

JK Je sais qu’il est passé à Goma, quelques jours avant de se réfugier à Nairobi, au Kenya.
PD -Lui son chemin l’a amené là. Et puis, au, ces jours-ci, lorsque vous, les dernières fois que

vous avez eu des nouvelles de lui c’est quand ?
TK -C’est quelques, quelques mois avant mon arrestation, où il devait se trouver encore à
Nairobi.

PD -Iise trouvait toujours à Nairobi ?

JK -Oui.

PD -Est-ce qu'il était prévu qu’il aille ailleurs ou si on le voyait toujours à Nairobi ?

TK -Je n’ai, je n’ai aucune idée.

PD -Est-ce que vous entreteniez des liens avec lui ?

TK -Non. Je n’ai pas, je n’entretenais pas de liens avec lui.

PD -Parce qu’on voit un peu dans le résumé que vous avez fait que, vous lui avez adressé certains

reproches alors ça devait être assez difficile de tenir des, des liens avec lui, à ce moment-là.
JK Mes relations étaient, je dirai, conflictuelles avec lui.

PD -Plutôt froides [rires], plutôt froides. Le, ce Monsieur-là est originaire de quelle préfecture?

JK -Il est originaire de Ruhengeri.

PD -Ruhengeri ?

JK -Oui.

PD -Ok. On, on lui a pas attribué de responsabilité de préfecture ou de secteur pendant le...

pendant les, les, la période génocidaire, étant lui plutôt affecté à des affaires extérieures.
JK -Je ne me rappelle pas s’il a été affecté à une préfecture, ça me surprendrait dans la mesure

où lui il a effectué plusieurs missions à l’extérieur pendant cette période.

PD -Est-ce que ces missions extérieures-là étaient une façon pour lui de manifester son
désaccord?
JK -Je ne crois pas.

PD -Vous ne croyez pas ?



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JK -Non, moi je crois que c’est, s’il a été choisi c’est parce que c'était la personne qui était
censée connaître le mieux les affaires extérieures donc au niveau du gouvernement. Le ministre des
affaires étrangères étant tout nouveau, et on avait besoin de quelqu'un qui avait servi au sein de ce
département et qui était censé connaître le, l'extérieur mieux que tout le monde. C’était lui. C’est

pour ces raisons qu’il a eu à effectuer des missions à l’extérieur.

PD -C’est comme ça qu’il lui a été attribué des, certaines choses ?
JK -Oui.
PD -Parce qu’on voit que le ministre des affaires extérieures, ou des affaires étrangères, est-ce

que c’est la même chose ? Oui ? Les affaires étrangères, les affaires extérieures.

JK -L'appellation officielle c’est le ministère des affaires étrangères et de la coopération
internationale.

PD -Ok. C’était Monsieur Jérôme qui était membre de votre parti.

JK -Oui.

PD -Mais lui aussi a obtenu des missions à l’étranger un peu, hein ?

JK -Oui.

PD -Ok. Est-ce qu’il y avait des gens pour qui le fait de voyager était une façon de manifester leur
désaccord à votre gouvernement ? Est-ce que c’est quelque chose que vous, vous avez vue ou que
vous avez interprétée comme ça ?

JK -Peut-être que la seule personne qui, que je peux interpréter comme ça c’est de la part du
ministre de, du tourisme, Ruhumuliza, qui après un voyage à l’extérieur est directement parti donc
il n’a plus, il n’est plus revenu dans au gouvernement. C’est la seule personne que je peux interpréter,
dont la mission aurait pu l’amener à, à, à se désolidariser disons de ce qui se passait dans le pays à

cette époque.

PD -Ok. Mais ça, on va revenir à Monsieur Gaspard, c’est le suivant.
JK -Oui.
PD -Alors, ce serait le seul que vous pouvez voir que la mission, les autres ce sont des missions

officielles, commandées par le gouvernement, faites pour le service du gouvernement.
TK -Oui.

PD -Ok. Vous n’avez pas, en aucun temps, jamais senti que des gens pouvaient, de toute façon



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ces gens-là, lorsqu'ils étaient à l'extérieur, est-ce que vous aviez un certain contrôle sur eux ?

JK -Un contrôle, non.

PD -Un contrôle non. Alors, s’ils n’avaient pas voulu, ou s’ils n’avaient pas désiré revenir au pays,
il y avait possibilité de pas revenir pour eux à ce moment-là ?

TK -Tout à fait.

PD -C’était, ceux qui sont revenus ils sont revenus de façon volontaire.

TK -De façon volontaire, il y avait aucun contrôle sur eux.

PD -Ok. Est-ce que la plupart de ces ministres-là, qui étaient du MRND, et des choses comme
ça, leurs familles étaient demeurées au pays ou si ce sont, ce sont des gens comme lui, que leur famille
a, ont eu la chance de quitter au début des conflits ?

JK _Il m'était difficile de savoir où sont leurs familles. Pour lui précisément je ne sais pas où était
sa famille. Je ne peux pas vous dire sa famille était à tel endroit à cette époque-là.

PD -Alors il était impossible pour le gouvernement de faire une pression sur les familles des gens,
si vous aviez, si vous ne saviez même pas où ils se trouvaient, il était difficile pour vous d’effectuer
une pression, les gens pourraient difficilement évoquer la pression sur la famille.

JK -Moi je, je ne sais pas où se trouve, personnellement je ne sais pas où se trouvait sa famille.
PD -Est-ce que c’est le cas pour la plupart des ministres que vous ne saviez pas où se trouvait leur
famille ?

JK Je n’ai, je me suis jamais occupé de, de savoir où se trouvaient les familles des ministres dans
la mesure où quand j’ai quitté Kigali je, je ne les ai pas vues. Et je sais que ils se sont retrouvés à un
certain moment dans un hôtel à Cyangugu, qui se trouve tout près de la frontière, ça s'appelle l’hôtel
du lac, à, tout près de Bukavu, venant de Bujumbura, après avoir été embarquée sur, par les, les
militaires français, de Kigali. C’est tout ce que j’ai su comme histoire concernant les familles des
ministres. Mais au-delà de ça, je ne peux pas donner de précisions.

PD -Juste, pour préciser, cette période-là ça doit pas être une période facile côté familial, vous
deviez pas pouvoir contacter vos familles de façon, de façon dont vous étiez habitué de le faire vous,
disons, comme directeur d’une institution bancaire ou, j'imagine que vous aviez, votre, votre,
vraiment votre port d’attache régulier c’était votre maison.

JK Oui.



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PD -Alors, vous, j'imagine que vous reveniez souvent à la maison chez vous ?

JK -Oui.

PD -C’était pas la situation à laquelle vous étiez confronté en 1994 ?

JK -Non.

PD -Votre famille pouvait-elle vous suivre à Gitarama ou s’il était difficile pour eux de le faire?
JK -C’était plutôt difficile dans la mesure où, à part peut-être le président et moi-même qui,

quelques semaines plus tard avons obtenu une maison où on pouvait vivre, les autres n’avaient qu’une
seule pièce, je vois pas comment ils auraient pu vivre avec leur famille à Gitarama.
PD -Alors, ces gens-là devaient plutôt procurer des lieux sécuritaires à leur famille, à l'extérieur

de Gitarama ?

TK -Oui.

PD -Qui étaient inconnus du gouvernement.

TK -Ce n’était pas dans, dans les préoccupations du gouvernement à cette époque-là.

PD En aucun moment, comme chef du gouvernement, vous avez demandé disons, heu, à obtenir

ces renseignements-là de votre service de renseignement ?

JK -En aucun moment.

PD -En aucun moment. Moi, heu, je peux poursuivre un petit peu, en disant, en demandant, quelle
était l'influence disons de cette personne-là au niveau du gouvernement, au niveau du MRND), est-ce
que c’était un personnage influent vraiment ?

TK -J'ai, je pense que au niveau du MRND c’est une personne qui devait avoir certaines
difficultés. Dans la mesure où, d’après ce que je sais, ce qui était prévu du gouvernement de transition
à base élargie au FPR, son nom n’avait pas été repris comme ministre du MRND.

PD -Ok. .

JK -On lui avait préféré quelqu’un d’autre au niveau de la préfecture de Ruhengeri. Donc il
n’était pas repris comme ministre du MRND au niveau de la préfecture de Ruhengeri. Ce qui pouvait
être une indication de la difficulté politique qu’il éprouvait avec le parti à cette époque-là.

PD -Ok. Le nom Bizimungu, est porté par d’autres personnes aussi qui ont, qui ont été actifs,
hein, je crois qu’au ministère de la défense, il y a pas quelqu'un aussi qui s'appelle Bizimungu, au

Rwanda ?



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JK -C’est, c’est le chef d’Etat-major de...

PD -Le chef d’Etat-major. Est-ce que c’est la même façon de l’écrire ?
JK -C’est la même façon de l’écrire.
PD -Chez nous ça pourrait présumer que ces gens-là ont un lien de parenté. Chez vous ça n’a

aucun lien ?

TK -Aucun lien de parenté.

PD -Aucun lien de parenté. Alors, quand vous dites que cette personne-là a pas... a pas un, on
voit ici là vous dites qu’elle a pas une, au niveau des militaires, vous ne lui connaissez pas, puis je
crois pas puis elle a pas d’information concernant ses relations avec les militaires pendant cette
période. C’est que vous vous ne sentiez pas que cette personne-là pouvait être trés influente auprès
des militaires.

JK -Je ne l’ai pas senti, je ne l’ai pas vu.

PD -Ok.

MD -A quel moment a-t-il été muté à la santé, a-t-il été appelé au ministère ?

JK -Je n’ai pas les dates exactes, mais je pense que c’est quand il y a eu le... le gouvernement qui
a été mis en place en 92, mais Je peux me tromper.

MD -En92. Est-ce qu’il avait des. quelle est sa formation, de quelle formation est-il, est-ce qu'il
est médecin, est-ce qu’il a un... ?

JK -C’est un médecin de formation.

MD -C’est un médecin de formation. Connaissez-vous les circonstances, on fait, on fait référence
à des paroles, peut-être imprudentes qu’il avait prononcées, est-ce que vous connaissez des
circonstances de ce, de cette, de ces paroles-là, dans quel, dans quel contexte, c’était dans des
négociations ? Quand il avait qualifié de, les soldats du FPR de vagabonds ?

TK -Non c’est que il, il, je, le contexte c’est que il justifiait à la radio nationale, à l’époque, que
le FPR n’occupait aucun, aucun morceau du territoire rwandais et pour le faire il a dit que c’est en
se promenant dans les zones soi-disant contrôlées par le FPR qu'ils ont vu des restes de so... des
restes de maïs, et que c’était tout probablement parce que ces vagabonds ne mangent que du, du, des
restes des épis de maïs, qu’ils ont laissés là-bas avant de partir chez eux.

MD -CGa, c’est dans ce sens-là.



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JK -Dans ce sens-là qu’il a prononcé ces paroles.

MD -Mais c'était pas relié avec le, les, les négociations, les ac. parce qu’on dit ici que pendant,
il a négocié les accords de cessez-le-feu. Est-ce que c’était durant cette période-là ?

TK -C’est durant de cette période-là, c’est pour cela que justement le, lui devait justifier qu'ils
n’occupent aucun territoire pour peut-être, disons, avoir un poids ou un point à introduire au niveau
des négociations, disant, vous, de tout façon, vous n’occupez aucun morceau de territoire sur notre,
au Rwanda. Donc vous devez accepter nos conditions, des choses comme ça.

MD -Est-ce qu’il y avait des, des conséquences directes de ça, de cette déclaration-là, est-ce que
vous vous souvenez ?

JK -Je m’en souviens pas mais je sais que les, personnellement j’ai jugé malheureux une telle
déclaration de la part d’un responsable politique.

PD -C’est pas quelque chose qui va rendre la solution plus facile.

TK -Même en dehors de ça, c’est maladroit quoi comme propos, ce sont des propos que, de mon
point de vue, les politiciens ne doivent pas tenir.

MD -Surtout pour un ministre des affaires extérieures, étrangères.

PD -Oui.
MD -Oui.
PD -C’est ça qui a fait que on a, par la suite, il devient d’une prudence extrême en mesurant

chaque mot de ses discours.

TK -Oui, puisque les, tout le monde s’est, c’est un, une histoire connue, tout le monde en parlait,
chaque fois qu’on parlait du FPR, on disait, on va poser la question à, au Docteur Casimir pour lui
demander comment ils sont, et il disait ce sont des vagabonds, oui des vagabonds nous chassent, oui,
les vagabonds sont plus forts que nous, des choses comme ça...

MD -Ah oui, même après. Alors vous, vous l’avez connu, quand vous l’avez connu au
gouvernement, il était ministre de la santé.

TK Oui.

MD -Et, à ce moment-là, il y avait, il devint, il était d’une prudence extrême là.

JK -Oui.

MD -Quand vous vous l’avez connu là.



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JK -Oui.

MD -Mais, même à cette période-là, là, ça, les propos-là que vous mentionnez les ont suivi, ces
phrases-là l’ont toujours suivi ?

JK -Mais les gens, oui. A l’extérieur les gens, pour rigoler, en disant, ah vous savez, ces
vagabonds-là ils sont, ils sont assez forts, ils nous chassent maintenant de Kigali.

MD -Euh.. au conseil des ministres est-ce qu’il était, il rapportait avec la même prudence qu’il
avait recueilli auprès des missions étrangères, heu, est-ce que vous, auprès des missions étrangères,
comme ministre de la santé est-ce qu’il était appelé à faire plusieurs missions ?

JK -C’est ce que je viens d’expliquer, en tant que quelqu'un qui avait de l’expérience comme ancien ministre des affaires étrangères, il avait la plus grande expérience à ce niveau, il a eu à faire beaucoup de missions à l’extérieur, notamment au niveau du Zaïre. Il nous avait rapporté que il était bien connu du président Mobutu et il a reçu, il a eu à faire beaucoup de visites à Kinshasa.
MD -Mais ça, ça ne faisait peur là, les, les imprudences ou les mots qu’il avait, heu, qu'il avait
laissés échapper, heu, est-ce que vous aviez pas peur qu’il soit, qu’il tienne des propos là qui puissent
plutôt, heu, défaire que faire, qui puissent causer plus de tort que de bien ? Est-ce que, parce que si
ça, sa réputation le suivait, que, cette chose-là l’a suivi toujours. Alors, on a quand, on s’est quand
même servi de lui, on l’avait enlevé des affaires extérieures, on s’est quand même servi de lui pour
l'envoyer en mission.

JK -Mais on pensait que il a retenu la leçon. Si vous voulez mon point de vue.

MD -Il a appris la leçon ?

JK -Oui.

PD -Etant quelqu'un là qui a justement eu une grande leçon dans sa vie, des discours politiques,
on peut dire que c’est une grande leçon quand 5 ans, 6 ans, 10 ans après, les gens te reprochent
toujours tes mêmes propos, ça veut dire que c’est, c’est quelque chose qui est remarquable, on se
rappelle, est-ce qu’il incitait les gens, les ministres à être prudents dans leurs discours, est-ce que c’en
est un ça qui a, qui a justement pris la parole au conseil des ministres puis dit “Je suis l'exemple vivant
des conséquences d’un discours” ou “faites attention” ou... les gens, je ne sais pas moi, les
inexpérimentés, essayer de faire profiter les autres de son expérience, est-ce qu'il a fait ça ?

JK -Il ne l’a pas fait, mais ça me surprendrait de sa part parce que je ne crois pas, ça c’est une



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attitude pour quelqu'un de très modeste, qui accepte que, de se repentir, mais je n’ai pas eu
l'impression que c’était son, son genre.

MD -De se repentir.

TK -De, de dire “voilà, j’ai commis une erreur à cette époque-là”, je ne crois pas que c’est, je n’ai
pas eu l'impression que c’était son genre de reconnaître que c'était une erreur.

MD -Est-ce qu’il a fait beaucoup de missions pour votre gouvernement ?

JK -Il a fait beaucoup de missions pour notre gouvernement.

MD -Il a fait beaucoup de missions.

JK -Surtout au niveau du Zaïre.

MD -Surtout au niveau du Zaïre. Est-ce qu’il en a fait dans d’autres pays aussi ?

TK -Je m’en rappelle pas, mais je pense que oui, il n’est pas possible qu’il ne se soit pas rendu
ailleurs, mais je n’ai pas en tête.

MD -Et le critère c’était son expérience ?

JK -C’était son expérience, je dirai avoir, profiter de son expérience, du fait que on nous rapportait que lui il avait vu à plusieurs reprises le président Mobutu qui était une pièce-clé de cette période-là.

PD -Avez-vous en mémoire le, le but réel de ces visites ?
TK -Je n’ai pas, je ne peux pas en dire plus que je vous le dis. Tout ce que je sais, là je l’ai appris

par mes propres sources, c’est que, quand il était là, il négociait pour lui-même, pour son personnage,

qu’on, on le hisse un peu au-dessus de tout le monde, c'était, c’est ça qui m’a été rapporté.

PD -C’est ce que vous rapportez. Est-ce que là vous, est-ce que vous lui demandiez...

TK -Il soignaïit son image.

PD -Est-ce que vous lui demandiez d’acheter des.

JK -Pour montrer que c’est la seule personne qui est à la hauteur, que tous les autres sont soit des apprentis politiciens, comme les nouveaux ministres, ou alors des gens qui étaient hostiles à l’ami de Mobutu, Habyarimana, des choses comme ça, c’est comme ça qu’on me l’a présenté.

PD -Ok. Est-ce que vous comme, comme gouvernement, au conseil des ministres, est-ce que
vous, lui, l’envoyez au Zaïre pour acheter des armes ?

TK -Non.



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de

PD -C’était pas pour des armes ?

JK -C’était pour des négociations de type politique.

PD -Vous ne savez pas si c’est.
JK -Le soutien politique et ce n’était pas pour acheter des armes.
PD -Est-ce qu'il était possible, à ce moment-là, que vous demandiez à Monsieur Mobutu de vous,

de vous assister ?

TK -Oui.
PD -C'’était une assistance militaire que vous désiriez ?
TK -Assistance militaire, une assistance politique, c’est une assistance multiforme, donc tout, tout,

on pensait que Mobutu était capable de tout faire.

PD -Mais, en fait Mobutu avait une grosse armée à ce moment-là.

TK -Oui. On le croyait.

PD -Est-ce que, effectivement, ces négociations, je crois pas hein, on voit que ces négociations,

vous vous avez, est-ce que vous avez vu un résultat à ces négociations ?

JK -J’ai bien dit que je n’ai pas vu de résultat.
PD -Vous avez jamais vu de résultat. Il allait demander, et il revenait, et puis c’était négatif ?
TK -Non, il disait pas que c’était négatif, il disait que c’était en cours.

PD -C'était en cours.
JK -Oui.
PD -Ok. Puis là, pardon, j’ai déplacé ma chaise, le, il vous deman... comme, le conseil des

ministres était avisé du type de mission qu'il allait faire ?

JK -Oui.
PD -A ce moment-là, vous saviez que vous demandiez à un autre pays de s’adjoindre au conflit?
JK -Non, on ne demand... je ne dis pas que le... on allait demander spécifiquement pour nous

adjoindre aux pays, il y a d’abord eu la négociation pour faire transiter les armes dans, au niveau du
Zaïre, donc il a fallut que, il y ait eu cet, il y ait cet accord. Il y a eu la négociation pour que les, vers
la fin, pour que les gens puissent se réfugier de ce côté, ça fait tout, tout, tout ce contexte, il n’y avait
pas qu’un point qui était négocié, il y a pas eu à négocier, amenez-nous des militaires. Comme point

essentiel.



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PD -Ok. Puis c’est une des demandes ?
JK -C’est une des demandes possibles, je, je, je crois il avait le champ large. Connaissant la
situation, et l’ayant vécue, depuis 90, il avait le champ large pour négocier tout ce qu’il pouvait

négocier avec Mobutu.

PD -Tout ce qu’il pouvait obtenir.

K -Oui.

PD -Autrement dit, vous lui donniez carte blanche comme gouvernement ?

JK -Oui.

PD -Et les rapports qu’il vous faisait c’était toujours, la situation progresse 9

TK -Il a eu... il a été reçu, qu’il a rendez-vous avec untel à telle date, c’est ça les rapports que moi
j'ai reçus.

PD -Ah bon, bon, bon...

MD -Mais la procédure là, c’était, il était, il était désigné, sa mission était approuvée par le conseil
des ministres ?

JK -Oui.

MD -Et est-ce qu’il devait, est-ce que son rapport devait être fait au conseil des ministres, est-ce
qu’il avait un rapport à faire, à son retour est-ce qu’il devait présenter un rapport ?

JK -Il, il, il a eu à s’expliquer sur son voyage, mais c'est ce rapport-là dont je parle, qu’il nous disait, à telle date j’ai été reçu par le président Mobutu, je lui ai exposé les difficultés que nous avions, et il a promis qu'il allait voir. Des choses comme ça, c’était le genre de rapport que moi j’ai reçu.

MD -Mais il a continué, même si vous aviez pas de, de, de faits concrets, même si les résultats
étaient plutôt mitigés, il a, il a quand même fait plusieurs missions.

TK Je ne crois pas que ça dépendait tout à fait, l’histoire le démontra, ça dépendait pas tout à
fait de, de, de sa position, je crois que ça dépendait également de ce qui, de ce qui, de la réalité du
Zaïre.

MD -Quel genre de mission qu’il avait.

JK Donc de la réalité du gouvernement du Zaïre, à cette époque-là, si on avait peut-être su ce
qu’on a su après, avec les événements du Zaïre, on aurait pu comprendre pourquoi ils ne nous

sauvaient pas, et quelque fois il ne pouvait pas recevoir de réponse.



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. enr
À . &BL94

MD -Oui, mais le fait, comme vous rapportez, le fait que, il, il s’attachait plutôt à soigner son

JK -C’est plus tard. Beaucoup plus tard.

MD -Alors, c’est après que vous avez eu connaissance.

JK -Beaucoup plus tard.

MD -Après que vous avez appris cette chose-là.

TK -Oui. C’est pas à ce moment-là, c’est beaucoup plus tard, puisque j’ai, j’ai quand même
cherché à savoir qu’est-ce qu’il a fait pendant cette période-là. Pourquoi on n’a jamais rien eu,
pourquoi on n’a jamais eu de réponse.

PD -Les, ses voyages, ses dépenses, est-ce que, est-ce qu’il y a, un ministre qui partait en mission
comme ça, ses dépenses étaient approuvées, est-ce qu’il y avait un budget spécifique ou est-ce qu’il
y avait un montant d’argent spécifique qui lui était alloué pour ces, ces... ?

K -Oui, il y avait des budgets pour les frais de mission.

PD -Mais est-ce que c’était comme, lui pour partir pour une mission, est-ce qu’il y avait un
montant qui était déterminé avant son départ ou à son retour il, il faisait des demandes de
remboursement ?

JK -Il y avait des règles que moi je ne connaissais pas, qui, qui allouait une indemnité forfaitaire
journalière, et on multipliait par le nombre de jours probables pour une mission donnée, et, avant le
départ il avait cet argent, plus les billets d’avion bien entendu.

MD -Il avait cet argent avant ?

JK -Oui.

MD -Et, est-ce qu’il faisait rapport, pour les dépenses c’était la même chose ? Qui contrôlait les
dépenses à ce moment-là ?

TK -Moi je me suis jamais occupé des, du contrôle financier.

MD _-Non mais votre gouvernement, est-ce qu’il y avait dans les, dans les...

JK -C’était le ministre des finances qui, qui devait s’en occuper.

MD -Qui devait contrôler cette partie là.

PD -Si on va au niveau de la, je sais pas si t’as terminé là-dessus ?

MD -Oui, oui.



T2k7#28 du 01/10/97. -15 janvier 1998 (13h56) 14
+

Ç

PD -Comme vous l’avez jamais vu avec une arme et non plus... dans sa mission, ça n’a jamais été d’acheter des armes, à tout le moins dans l’implication des armes c’est peut-être d’avoir demandé au gouvernement de Monsieur Mobutu l’autorisation de peut-être livrer les armes chez lui, c’est ça ?

JK C’est, je ne sais pas si cette demande a été faite, c’est pour ça que je ne l’ai pas signalée, je ne sais pas si cette demande a été faite par lui ou par quelqu’un d’autre, parce qu’il y a eu tellement de missions dans, au Zaïre, que je ne peux pas préciser c’est lui qui a obtenu ça. Maïs, lui il avait, comme vous l’avez dit, carte blanche, surtout négocier tout ce qu’il pouvait négocier avec le président Mobutu.

PD -Jamais il vous est revenu effectivement en disant “J’ai réussi à obtenir l’autorisation de...”

JK -Non, non.

PD -Ok. Les armes qui ont été livrées là, vous savez pas comment l’autorisation a été obtenue?

JK -Heu, moi je ne, le, l’autorisation je présume que ça a été obtenu par les gens qui les ont ramenées, parce que je ne sais, je sais qu’ils ont dû payer des pots-de-vin pour obtenir ces autorisations, donc ce sont eux qui, qui, pour moi qui ont négocié directement pour avoir les autorisations.

PD -Ok. C'était qui, ça, qui a réussi à rentrer des armes au Zaïre ?

JK -C’est, il y a Bagosora, et puis il y a heu, Nzirorera.

PD -Ça venait de... l’Afrique du Sud, celles-là ?

JK -Heu, oui.

PD -Oui, ça rentrait, ça rentrait par Goma ?

TK -Ça rentrait par Goma.

PD -Ok.

MD -Mais par quelle... ça rentrait par avion ?

JK -Oui, ça rentrait par avion.

MD _-Est-ce que les, est-ce que c’était des avions que vous aviez à..., est-ce que c'était des avions
que vous aviez analysés [?] ou... ou c’était fait par la personne qui, qui faisait, qui vendait les armes,
est-ce que c’était vous qui aviez la responsabilité de, de, d’organiser votre propre transport ?

JK -Non, ça je ne peux pas, je ne peux pas répondre, la personne qui allait acheter des armes s’organisait pour qu’on ait les armes, donc le reste c'était son affaire. C’était lui qui s’organisait avec



T2K7#28 du 01/10/97. -15 janvier 1998 (13h56) 15
4.485690

le, la personne qui avait les armes, c’était lui qui pouvait éventuellement chercher la personne qui assurait le transport, pour le gouvernement ce qui comptait c’était d’avoir les armes, c’était pas le trafic.

PD -Mais les trafiquants d’armes ou les, les vendeurs d’armes là, appelons-les comme ça, c’est pas nécessairement qu’ils vendent une cargaison livrée, ou s’ils vendent une cargaison livrée ça a un prix, s’ils la vendent non-livrée ça a un autre prix. Vous savez, soit qu’on s’occupe du transport, ou, si on s’en occupe c’est, c’est moins cher, si on s’en occupe pas c’est plus cher, c’est comme n'importe quoi.

JK -Les informations que j’ai, compte-tenu de la difficulté que nous avions, ce sont les trafiquants d’armes qui se sont chargés en même temps de chercher les compagnies de transport. Donc eux, ils paient, ils livraient.…

PD -Vendues livrées ?

JK -Vendues, ils vendaient et étaient payés pour la livraison à Goma.

PD -Ok.

MD -Est-ce que vous savez quelle compagnie de transport avait été...

PD -Ça, je pense qu’on a un chapitre complet qui, qui parle de l’achat, de la vente, le transport, on a tout en détail, les compagnies aussi qui ont fait livraison, les aéroports...

MD -Oui c’est vrai.

PD -Avez-vous besoin de vous absenter ?

JK -Non.

PD -Non. On va tout simplement tourner le ruban et reprendre. Il est 15 heures 14, 35.

Fin de la face A de la cassette # 28



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co

ALLAS

1

AA
52 7

Face B de la cassette # 28
PD -15 heures 14, 52. Toujours le 30 sept. le 1er octobre, on reprend. Si on va au niveau de la
connaissance de cet homme-là, des massacres et des, des événements de 94, il assistait comme les

autres ministres au, à la présentation des préfets du 11 avril.

JK -Oui.

PD -Ses missions, à ce moment-là, à l’extérieur, étaient pas commencées ?

JK -Elles ont commencées quand nous sommes arrivés à Gitarama.

PD -Ok. Comme ministre de la santé, il était informé de l’existence de trop nombreux cadavres au centre hospitalier de Kigali. Est-ce qu’il s’agit de la même situation que vous avez décrite hier ?

JK -Oui, quand il a fallut ensevelir les corps qu’on, que la Croix-Rouge nous avait signalés dans
la-ville de Kigali, en particulier dans l’hôpital CHK.

MD -Son rôle à lui c'était, c'était quoi [inaudible] ?

JK -C’est le ministre de la santé, c’est lui qui avait l’hygiène dans ses attributions, donc il, il n’est
pas normal, ou il ne serait pas logique qu’on ait fait ce travail sans que le ministre de, qui a l’hygiène
dans ses attributions ne soit informé.

-Qui contrôlait ces, ces opérations, est-ce que c’est, est-ce que c’était lui qui contrôlait ?
-C’est la Croix-Rouge internationale, puisque c’est elle qui avait pris l'initiative.

-C'’était via Monsieur... Gaillard, hein ?

-Monsieur Gaillard.

-Et le, et le... le Rwanda prêtait les, il fournissait le, la main d’oeuvre, le transport.

-La main d’oeuvre et le transport et le matériel.

-Mais au niveau du gouvernement, est-ce que c’était le ministre de la santé qui était.

-Je ne m’en souviens pas mais logiquement ça devrait être lui.

-Ça devrait être lui.

-Mais je m’en souviens pas.

SRERERERSRE

-On avait mis à contribution, si on se rappelle les propos tenus hier ou avant-hier, divers
ministères, hein ?
TK -Oui.

PD -Il ya eu divers ministres qui ont eu, dont vous, vous avez été informé, vous avez... demandé



T2k7#28 du 01/10/97. -15 janvier 1998 (13h56) 17
à Monsieur Hyacinthe, qu’on utilise ses camions, je crois ?
XK -Oui.

PD -Puis Monsieur aussi, qui lui avait la responsabilité de l’hygiène, alors, plusieurs personnes
au niveau du conseil des ministres.

TK -Non, je sais qu’il a participé à cette activité.

MD -Dans ce, dans ce cas-là en particulier, mais est-ce qu’il y a eu d’autres occasions aussi que,
dans le pays, est-ce que c’est arrivé que, la même situation se présentait où c’est qu’il aurait eu à
intervenir ?

JK -Non, je ne suis pas, je n’ai pas d’information où il aurait eu à intervenir pour
l’ensevelissement de corps. A part à Kigali à ce moment-là.

MD -Mais est-ce que le, est-ce qu’il y a pas eu des, des risques de, de contamination ou
d’épidémie, ou de... durant cette période, où il a dû prendre des mesures, parce qu’il y avait des
corps, parce qu’il y en avait partout dans le pays là, là on parle de Kigali, mais ailleurs ? Est-ce que
il y a eu à prendre des mesures spéciales pour ça ?

JK -Je ne m’en souviens pas.

MD -Parce que c'était. c'était quelque chose qui, la situation des cadavres, heu, on a vu par
exemple dans la rivière, heu, et le long des routes, qui avait la responsabilité de les ensevelir ?

JK -Je, je n’ai, je n’ai pas, à part cette discussion que j’ai eue avec Monsieur Gaillard,
personnellement, quand, quand il avait demander à me rencontrer, et qu’il y a, donc de la suite dont
j'ai parlé, je n’ai, je ne me suis pas, par la suite, occupé de...

MD -C'’est pas devenu un problème-là dans le pays, le, le, le problème des cadavres qui étaient là
et qui menaçaient [inaudible] ?

JK -Certainement que c’était un problème mais peut-être qu’il était résolu par d’autres que moi.
Donc ce n’est pas...

MD -Oui mais lui au niveau de, comme, ça ça aurait été sa responsabilité à lui, il était le ministre
de la santé ?

JK -Je ne peux pas, je ne peux pas le, disons, le spécifier puisque je n’ai, je n’ai pas en mémoire
un seul cas ou un seul endroît où il serait intervenu en tant que ministre de la santé.

MD -Il aurait dû, heu, est-ce que vous, à votre connaissance, il aurait voyagé à travers le pays



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‘ A . . [, LS HG RT7 A:
pour, justement pour contrôler cette situation ? RL U&GoOo



JK -Je m'en souviens pas, je ne crois pas qu’il ait voyagé à travers le pays pour contrôler cette
situation, je crois qu’il était plus, comme je lai dit, versé à, aux relations extérieures que au
département de la santé comme tel.

MD -Qu’à la santé comme telle. Est-ce qu’effectivement il y a eu des problèmes de santé d’ailleurs,
durant cette période ?

K -Certainement.

MD -Oui. Mais pas d’épidémie, pas quelque chose qui a été apporté à votre gouvernement, que
vous avez dû prendre des mesures ?

JK -Non, non.

MD -Ça a pas été assez sérieux, ça a pas été...

TK -Assez sérieux, peut-être oui, mais ça a pas été porté à ma connaissance.
PD -C’était pas la priorité du moment ?
TK -Non.

PD -Dans sa lettre de démission, au mois d’août, il vous fait, heu, il reproche au gouvernement,
dont il faisait partie.

JK -Oui.

PD -même à cette époque, au mois d’août, est-ce qu’il était, juste avant sa lettre, il était pas
démissionné, il était toujours actif, il faisait encore des missions à l’extérieur pour le pays ?

JK -Oui.

PD -Ok. Il vous reproche, et se reproche à lui en même temps, la non-intervention dans les
massacres des populations rwandaises. Donc, il reconnaît par le fait même, quand vous avez lu cette
lettre-là, vous avez dû. vous avez dû dire “mais qu’est-ce qu’il fait là, il se reproche à lui-même de
pas être intervenu dans les massacres de populations”, il reconnait qu’il y a des massacres, il
reconnait, je sais pas si il reconnait là-dedans que les Interahamwe ont participé aux massacres, mais
il reconnait qu’il y a des massacres puis il vous reproche de pas, il se reproche de pas être intervenu.
Est-ce que vous lui avez fait cette remarque-là, est-ce que c’est une remarque que vous lui avez
soulignée ?

TK -Je le lui ai dit, je lui ai dit “vous, vous pouvez me le reprocher à moi, je suis d’accord et c’est
>] P



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vrai, mais, vous, vous êtes un ministre d'expérience, vous êtes un ancien ministre des affaires
extérieures, qu'est-ce que vos connaissances et vos relations avec l’extérieur nous, nous ont permis
au cours de cette période et qui, quel a été votre apport au cours de cette période en tant que ancien
ministre des affaires extérieures pour ne pas faire ce que nous avons fait ? Deuxièmement, vous avez,
vous étiez ministre dans le gouvernement, est-ce que vous êtes intervenu, ça je lui ai dit, au moins une
fois, pour prendre la parole et nous demander, et nous donner conseil de ce qu'il fallait faire et on a
refusé, pour que aujourd’hui vous puissiez nous reprocher de n’avoir rien fait ? Quand vous dites que
nous avons une image négative par rapport à l'opinion internationale, est-ce que vous, vous croyez
que vous avez une image propre et positive en tant que quelqu’un qui était dans ce gouvernement et
peut-être plus ancien que les autres ?”. Il nous reprochait également de, d’avoir, de, disons la
mauvaise gestion des deniers publics pendant cette période, c’est à ce moment-là que j’ai dit “Mais
vous avez-vous même eu à gérer 50 millions de francs rwandais pour l’achat des médicaments, j’ai,
j'ai pas eu de rapport, donc vous pouvez nous reprocher au gouvernement, sans que vous puissiez
vous-même justifier”, et de toutes ces interrogations, il a répondu à cette dernière, effectivement dans
mes documents, il se trouve une justification des dépenses sur les 50 millions de dollars [?] qu’il a eu
à gérer, pour l’achat des médicaments.

PD -Ok, mais jamais, il s’est. 50 millions de francs ?

TK -50 millions de francs, 50 millions de francs rwandais.

PD -Ok. Ça peut faire combien de millions de dollars, ça à peu près, avez-vous... à cette époque-

là, est-ce que vous avez la conversion ?

JK -J’ai aucune idée.

PD -Vous avez aucune idée. Le... c’est ça qui vous amène à dire qu’il avait une ligne de conduite
hypocrite ?

JK -Oui.

PD -Il était, dans le fond il était inconséquent avec les propos qu’il a tenus ou sa lettre de

démission qu’il a tenue par rapport à ses actions à lui qu’il a faites.
TK -Oui.
PD -Ok.

MD -Il n’a jamais pris la parole pour faire des interventions dans ce sens ? En aucun temps ?



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kL 48537
JK -C’était ça mon reproche, parce que s’il avait, de ça s’il l’avait prise, il, il m’au…., dans la
lettre, puisque il m’a répondu, moi je n’avais pas écrit, j'avais eu, le message lui avait été transmis
verbalement, si, si, s’il avait fait quelque chose, je crois il n’aurait pas manqué de le dire. Dans la lettre
de réponse qu’il m’a envoyée il n’a pas mis ça. Mais il a quand même souligné que je l’ai, entre
guillemets, injurié.
MD -Ah oui ? Dans la lettre il y avait.
JK -Oui.
MD -Il avait fait mention dans la lettre ?
JK -Dans la lettre qu'il...
MD -Dans quelles circonstances ?
JK -Vous l’avez dans, vous l’avez dans les documents que vous avez saisis.
MD -Dans quelles circonstances que vous l’auriez injurié ? A quel, à quel moment ?
JK -C’est à l’occasion de cette lettre-là, qu’il avait, moi je ne l’ai pas injurié, j'ai pas l’habitude
d’injurier les gens. Mais j’ai dit la vérité.
PD Il a trouvé ça injurieux que vous lui souligniez que il était membre du gouvernement puis
qu’il vous reproche, en tant que membre du gouvernement, d’avoir laissé, cautionner les massacres.
JK -Oui.
PD -Puis ça ça l’a injurié ?
JK -Oui. Et dans la lettre que vous, dans les documents que vous avez saisis, cette lettre-réponse
se trouve dedans.
MD -La réponse que, vous lui avez répondu...
JK -Que lui, il a …
MD -Ok.
JK -Mais moi je lui ai pas écrit. J'ai dit verbalement ce que je pensais. Quand il a envoyé la lettre
de démission.
MD -Oui. Pourtant, pourtant il y a, si quelqu'un, si il y a quelqu’un qui aurait pu, qui aurait eu
l’occasion d’intervenir quand il, heu, j’imagine qu’il devait informer le gouvernement sur, par
exemple, dans les opérations d’ensevelissement et, il était, il était bien conscient là de tout, de tous

les massacres qui avaient eu lieu, s’il y en a un qui était conscient, les cadavres il les voyait, lui, il était



T2k7#28 du 01/10/97. -15 janvier 1998 (13h56) 21
AL 485314
responsable de les ensevelir. Et jamais il a profité de ces occasions pour, pour sensibiliser le
gouvernement sur, sur cette situation.

JK -Je ne me souviens pas d’une action particulière qu’il aurait faite pour ça.

MD -On a parlé des voyages tout à l’heure, il nous Justifiait ses itinéraires et ses agendas, alors,
surtout ce qu’il justifiait en fait c’était qu’il avait rencontré effectivement des personnes, qu’il avait
eu des rencontres, qu’il avait été reçu.

JK -Oui.

MD -Et, heu, tout ce qu’il y avait, toutes les personnes qu’il avait rencontrées durant son voyage,
les interventions qu’il avait faites, c’était ça qui, c’était ses justifications ?

JK -Oui.

PD -Quand vous dites qu’un voyage peut servir à préparer des alibis, c’est quoi ça ?

JK -Des, je, je, je me base sur cette lettre de démission. Puisque lui, je crois qu’il s’est mis, il s’est
retiré du lot et puis il s’est mis au-dessus de tout le monde, j'imagine que le fait qu’il ait voyagé
pendant que les massacres se commettaient pouvait servir d’argument pour lui, en disant “écoutez,
je n’étais pas là, moi je, je, on m’a mis dans les missions à l'extérieur, je les ai accomplies du mieux
que j’ai pu, mais je ne suis, je n’ai rien à voir avec les massacres”.

PD -Effectivement, est-ce que c’est quelqu’un qui a siégé au conseil des ministres ?

JK -Oui, quand il était là.

PD -On peut dire, si vous..., si vous essayez de mettre une, de quantifier sa présence, est-ce que
il a été fréquemment, très peu fréquemment, la moitié du temps.

JK -Oui, la plupart du temps il était à l’extérieur. Il a été très peu fréquemment dans les réunions,
mais quand il était dans le pays, il était, il assistait aux réunions. Et les réunions c’était, il y avait
beaucoup de réunions donc, les occasions de faire des réunions, ce n’était pas ça qui manquait, parce
que à un certain moment, à Gitarama on faisait peut-être une réunion tous les deux jours.

PD -Ok. Puis lui, à Gitarama, il était là ?

TK -Oui.

PD -A Gisenyi aussi ?

JK -À Gisenyi aussi.

MD -Quandil a démissionné, vous étiez où ? Le gouvernement était rendu où ?



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LE
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UT
Cl
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TK -Lui il était, lui il était à Goma, et moi j'étais à Bukavu.

MD -A Bukavu. Est-ce qu’il a eu un rôle à jouer pour le, les, les négociations avec le
gouvernement zaïrien [sic] pour le, pour le, votre exil, pour laisser entrer le, les.

TK -Je m'en souviens pas, mais, je ne crois pas qu’il ait eu une mission spécialement pour ce
dossier, c’est plutôt le président du MRND, dont je me souviens qu’il a fait cette négociation.

MD -Cest le président du MRND qui se serait rendu au Zaïre pour négocier ?

JK -Oui.

MD -Les heu...

JK -L'’exil.

MD -L’exil de la population, des militaires et du gouvernement ?

XK -Oui.

MD -Etest-ce que c’est lui qui s’est occupé pour tous les niveaux ?

JK -H y a pas eu plusieurs niveaux. Il y a, il y a eu l’exil.

MD -Oui mais quand même...

TK -C’était…

MD -On a, on a vu qu’il y a le, les militaires ont quand même eu, heu, une place spéciale pour
passer, le gouvernement, vous avez été quand même accueilli d’une certaine façon.

TK -Il y eut... les militaires je crois que c’est, si ils ont une place spéciale ce n’était... c'était par
le fait même qu’ils n'étaient, ils étaient quand même des gens particuliers. Ils avaient des armes, ils
étaient habillés, ils étaient en uniforme, on ne devait pas les mélanger avec la population civile.
MD -Mais c’est pas quelque chose qui était négocié ?

JK -C’est pas quelque chose qui a été négocié à part ou en particulier.

MD -Alors ça, les négociations, ces négociations-là ont été faites par le président du MRND.
JK -Oui. J'avais déjà signalé.

MD -Oui. C’est tout.

PD -Moi j'ai pas besoin de poursuivre plus à fond avec ce Monsieur-là, là, on voit son
importance. On pourrait peut-être aller à Monsieur Gaspard heu…

JK -Ruhumuliza Gaspard. Au niveau du discours, des armes, des treillis et de l'aspect militaire, je n’ai pas côtoyé ce ministre. Il a choisi de fuir à son retour de Suisse. Concernant sa connaissance,



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- er f
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il a assisté à la réunion du 11 avril 94 avec les préfets. Il a traversé deux préfectures, soit celle de Gitarama et celle de Gisenyi lorsqu'il a pu s’enfuir par la suite. Mais je n’en suis pas certain, je ne sais pas exactement par quel endroit il est passé. Mais dans tous les cas, il a dû traverser des préfectures pour prendre son avion. Au niveau de la ligne de conduite, il s’est laissé utiliser, étant un ancien préfet du MRND à Kibuye, il accepta un poste de ministre sous la bannière du PDC, pour laisser croire au multipartisme. Il n’a pas été reconduit au gouvernement de transition à base élargie. Il s’était laissé mettre en place par le comité militaire de crise, même s’il savait qu’il ne représentait pas l'interlocuteur disons de ce parti. Il se savait exclu d’office du gouvernement à base élargie.

PD -Monsieur Gaspard, là, c’était le ministre de l’environnement et du tourisme ?

JK -Oui.

PD -A ce moment-là, ça devait pas être quelque chose de très, très important ?

JK -Non.

PD -C’était pas un ministère très important. Ok. On l’a situé, qu’il était le, un ministre du PDC,
qui a, antérieurement, il a déjà occupé cette fonction-là aussi.

JK -Oui.

PD -C’est lui qui a servi au président Habyarimana de, de, en disant Habyarimana, en disant que effectivement il y avait le multipartisme et la démocratie au Rwanda.

JK -Oui.

PD -C’est lui ça ?

JK -Oui.

PD -Qui avait été placé là comme seul, il y avait 19 et 1, c’est ça ?

JK -Oui, c’est ça.

PD -C'était le 1, lui ?

JK -C’est ça.

PD -[rire] Ok. Bon. Ce Monsieur-là, on voit selon les notes que j'ai faites, qu’il aurait suivi le gouvernement à Kigali et à Gitarama.

JK -Oui.
PD -Avez-vous une idée approximative de la date où il aurait quitté Gitarama ?
TK -Il a quitté Gitarama dans les premières semaines, quand nous étions rendus à Gitarama, il a



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11468537
peut-être assisté à une ou deux réunions, et puis après il est parti. C’est dans les premières semaines,

j'ai, je crois [inaudible]|.

PD -A tout le moins, vous le voyez à la réunion avec les préfets à Kigali.

JK -Oui.

PD -Et, vous savez qu’il suit le gouvernement.

TK Oui. Et puis, puisqu'il m’en a parlé avant de partir, je sais qu’il est parti dans les premières

semaines, quand nous sommes arrivés à Gitarama.

PD -OK, c’est dans les premières semaines. Quand vous dites qu'il a, que vous êtes pas certain,
de mettre présentement là [?], du trajet qu'il a pris, à ce moment-là quel aéroport pouvait être
disponible, s’il n’a pas pris l’avion vers Gisenyi, il a pu prendre l’avion vers. ?

IK. -Iya des gens qui, qui sont partis vers Bukavu ou Bujumbura, si on veut on peut, il peut, il
se sent... il pouvait se sentir en sécurité dans ces pays. Gisenyi c’était, disons, la voie officielle, mais
il y a des gens qui sont partis à l’extérieur, en partant de Bujumbura ou en partant de Bukavu, au
Zaïre.

PD -Ce qui les obligeait à traverser des préfectures aussi, s’ils allaient au Burundi ils traversaient
comme on l’a dit, le, Butare..

JK -Dans tous les cas.

PD -..Butare et Gitarama, puis s’il allait à Bukavu il traversait…

JK -Buütare, Gikongoro et Cyangugu.

PD -Alors où il était visible de voir le.

JK -Oui.

PD -Où c'était facile de voir. La même chose. Ce Monsieur-là, sa fuite en Suisse a été faite
comme, sous le couvert de quoi ?

JK -Il avait une association dont je ne me rappelle plus le nom, heu, que lui représentait, qui a été

invitée à une réunion en Suisse.

PD -Oui.

JK -Donc c’était une association qui n’avait rien à voir avec le gouvernement.

PD -Oui.

JK -Il m'a, il a demandé une autorisation de se rendre représenter son association, son



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CC
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D

organisation à lui.

PD -Oui. Privément [sic], ça avait pas à faire avec.
JK -Privément, c'était, tout, une affaire privée.

PD -Il a même pas demandé au gouvernement “pouvez-vous me défrayer un voyage-là ?”
JK -Non. Non.

PD -C'’est vraiment un voyage privé.

JK -Même si on l’a fait, ça serait contre les règles, mais c’était un voyage privé.

PD -OKk.

JK -Tout ce que là il pouvait obtenir c’est l’autorisation disons de, un congé si vous voulez. Il est allé là-bas, il a fait ses contacts ou il a fait sa réunion. Il n’avait pas de comptes à rendre au gouvernement. Il est revenu. Quand il est revenu, moi je l’ai vu. Et puis, deux ou trois jours après il a disparu. Donc je ne sais pas où. Et comment. Tout ce que j’ai su, c’est que son beau-père est venu me demander si je savais où son gendre pouvait être. C’est, ce qui me laisse croire qu’il n’a dit à personne où il allait.

PD -Ok. Est-ce que vous savez s’il est parti avec sa famille à ce moment-là ou est-ce qu’il, vous avez eu des informations.

JK -Je n’ai aucune idée.

PD -Vous avez aucune idée. Vous avez aucune information sur son départ ?

JK -Non.

PD -Est-ce que... est-ce que cet homme-là a pu être assassiné ?

TK -Non.

PD -Il a pas été assassiné ?

JK -Non, il n’a pas été assassiné.

PD -Ça vous aurait été rapporté s’il avait été assassiné ?

JK -Oui. Si ça avait été assassiné, en tant que ministre je crois que je l’aurai su ou on, ça, on aurait eu des échos.

PD Donc à son retour l’évaluation, pardon, l’évaluation que vous en avez fait c’est que c'était normal qu’il s’en aïlle, c’est ça, les, est-ce qu’il semblait désintéressé un petit peu de la situation ?

JK -Pas que il soyait [sic] ou que il soit désintéressé mais je ne vois pas pourquoi il serait resté.



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in, On &
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De toute façon si la guerre s’était terminée, lui il n’était pas ministrable entre guillemets. Comme on dit. Puisqu’il ne, n’était pas repris sur la liste des ministres de son parti, pour la mise en place des institutions de transition à base élargie.

PD -C’est ça, quand, ça c’est la partie que vous, vous êtes en train de nous expliquer la partie où il s’était laissé mettre en place par le comité militaire de crise.

JK -Oui.

PD -Même s’il savait qu’il ne représentait l’interlocuteur de, désigné de ce parti.

JK -Oui.

PD -Qui était à ce moment-là ?

JK -Jean Népomuscène Nayezire [phonétique]

PD -Comment, comment, comment avez-vous expliqué, ou comment, avec les observations que vous avez faites par la suite, qu’il en était venu à nommer Monsieur, Monsieur Gaspard ?

JK -Je n'ai jamais été informé, donc je me suis dit peut-être que, comme il habitait tout près de l’endroit où ils ont fait la réunion, c’est peut-être par facilité qu’ils l’ont pris, il était juste en face de l’école supérieure militaire.

MD -Ça aurait été un critère-là, selon vous, vous croyez que ça aurait pu être ça ?

TK -Non, je ne, je ne peux que dire ça, parce que je n’ai pas d’autres raisons.

MD -Est-ce que vous lui connaissez d’autres, d’autres relations au sein du gouvernement ? Est-ce
qu’il y avait, est-ce qu’il pouvait connaître quelqu'un au sein du gouvernement, ou au sein du comité
de crise ?

JK -Au sein du gouvernement, oui, puisque c’est quand même quelqu’un qui a fait, qui venait de
faire trois ou quatre ans au niveau du gouvernement, donc c’est quelqu’un..

MD -OK, alors est-ce qu’il aurait pu être recommandé par quelqu’un, selon vous ?

JK -Je n’ai aucune idée.

PD -C’est pas quelque chose qui vous... lui il a été appelé au comité militaire de crise ?

JK -Oui, en tant que représentant du parti PDC.

PD -C'est ça, on lui a appelé, c’est lui qu’on a appelé.

JK -Oui, oui.

PD -Puis alors là, en profitant probable... pas probablement, en prof... étant la personne appelée



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il a été aussi la personne nommée. it 48540

JK -Oui.

PD -Bon, ok.

MD -Alors quand il a quitté, il savait qu’il quittait pas grand chose, il représentait pas personne
en fait, c’est pour ça que lui avait pas vraiment d’intérêt de demeurer, de demeurer plus longtemps.
JK -C’est ce que je me dis, et puis je peux me tromper.

PD -Est-ce que cette personne-là, est, ayant disons accepté de jouer un rôle, aidant le MRND
dans le passé, était bien vue des autres ministres du MRND ? Est-ce que c’est plutôt quelqu'un qu’on

pouvait reconnaître en association avec les ministres du MRND ?

JK -Oui.
PD -Ou?
u' -Pour nous, de l’extérieur, on, nous pensions qu’il était toujours du MRND), puisque...

PD -C’était un ministre du MRND.

JK -Oui. Si on sait comment il a été nommé ministre, on..., et comment il..., on l’a présenté
comme quelqu’un du PDC, et si on sait d’où était venu le parti PDC, on ne voit pas ce qu’il pouvait
être d’autre.

PD -Est-ce que il s’est déjà, au gouvernement, opposé à une, à une discussion ou imposé dans
une discussion en demandant que vous, vous, vous établissiez quelque chose pour faire cesser les

massacres ?

JK -J’ai pas en mémoire...

PD -Vous avez pas en mémoire.

JK -.. une intervention de ce genre.

PD -Aucune intervention. Est-ce que vous avez en mémoire une de ses interventions ?
TK -Non.

PD -Il était plutôt du type discret ?

TK -Non. Non, c'était quelqu'un qui parlait beaucoup.

PD -Oui?

K -C’est pas, c’est pas quelqu'un qui ne parlait pas, il parlait. On discutait.

PD -I] discutait ?



T2k7#28 du 01/10/97. -15 janvier 1998 (13h56) 28
hu 46541
JK -Oui, il parlait, en tout cas dans les conversations privées, c’est pas quelqu'un qui, qui ne
par. qui ne disait rien.
PD -Est-ce qu’il émettait une opinion dans les discussions privées ou si c'était des discussions...
TK -Je ne sais pas, moi je ne le connaissais pas mais je crois qu’il y avait des groupes de gens qui
discutaient, je voyais qu’il parlait, qu’il devait.
PD -En sous-groupe au gouvernement, il était, il était actif, c’est ça ?
JK -Oui.
PD -Ce sous-groupe là, il faisait partie du sous-groupe identifié au ministres du MRND ?
JK -Peut-être, je ne sais pas si c’est le sous-groupe identifié aux ministres du MRND, dans la
mesure où de toute façon ils étaient les plus nombreux. Lui, il n’avait pas de sous-groupe du PDC
puisqu'il était tout seul. Donc.
PD -Non frires]. Lui il avait le choix. [rires], le choix il était seul, il pouvait aller parler à qui il
voulait.
MD -Quandil prenait position, est-ce qu’il prenait position dans...
JK -Non. Il a assisté à très peu de réunions, je n’ai pas en mémoire le, ses interventions, sa
personnalité, ses, sa façon d'aborder, puisque je venais d’arriver, je le voyais comme ministre, j’ai pas
eu l’occasion de le connaître. C’est ce que j’essaye d’expliquer.
MD -Mais vous avez pas entendu de, de, d’intervention, qui aurait pu le situer ?
JK -Non. Même s’il l’a fait je n’ai pas retenu ça. Parce que je ne... moi-même je n’étais pas
encore tout à fait fixé à cette époque.
PD -[était.… est-ce que vous savez c’était quoi, quelle était sa fonction auparavant, avant d’être
ministre, cet homme-là ?
JK -J'ai dit qu’il était préfet à Kibuye.
PD -Oui, c'était sa fonction à plein temps, il était. il a toujours été préfet ?
JK -Non, je, c’est tout ce que je sais.
PD -Auparavant, vous ça s’arrête à préfet.
TK -Ça s’arrête à préfet à Kibuye
PD -Ok. Parfait. Moi j'ai pas besoin de plus d’information sur celui-là, je sais pas Marcel, toi, si

t’as quelque chose. Aimeriez-vous ajouter quelque chose sur cet individu-là ?



T2k7#28 du 01/10/97. -15 janvier 1998 (13h56) 29
JK -Non. KL E8SA4?
PD -Le ministre suivant...

JK -C’est Pauline Nyiramasuhuko. Au niveau des discours, j’ai dit que si il fallait juger une personne par le discours qu’elle tient, elle serait la personne qui aurait éliminé tous les Tutsi du Rwanda. C’est du moins le discours qu’elle tenait en privé. Mes collaborateurs, Alexis, Nsabimana et Padoli [phonétique], Marc Nsabim.. Marc Twagiramukiza et le docteur Murego, entre autres, sont venus m’avertir que les propos qu’elle tenait pouvaient m'être associés et reprochés dû à l’association que j’avais avec elle. Ceci me confirme qu’elle tenait publiquement et privément [sic] des propos semblables. Je n’ai jamais assisté à aucun de ses discours. Privément, dans sa vision, elle disait que si nous éliminions tous les Tutsi notre problème serait réglé. C’est ce genre de raisonnement qui était considéré comme simpliste par mes collaborateurs. Avec moi elle se limitait à ce genre de propos, ne poursuivant pas plus loin ses exposés. Ils démontraient que j’avais de la peine à croire que quelqu’un puisse avoir la conviction que la solution pouvait passer par un tel cheminement. Au conseil des ministres elle tenait exactement le même langage. Au niveau des armes, elle était armée d’un petit pistolet qui lui avait été remis par le gouvernement précédent. Et elle s’est plainte à moi, en disant “pourquoi les femmes ont de si petites armes ?”, elle me disait qu’elle s’était rendue dans la forêt tirer avec, ne croyant pas qu’une si petite arme pouvait faire, faire du bruit et encore moins tuer quelqu'un. Elle a demandé des armes au conseil des ministres, prétextant vouloir se défendre contre les attaques du FPR venant du Burundi. Au niveau des treillis, elle revêtait un treillis militaire lors de ses sorties autour de Gitarama. Côté militaire, elle n’a pas de passé militaire, je ne lui connais pas d’association particulière avec ceux-ci. Connaissance : elle assiste aux conseils des ministres dont celui du 11 avril 94. Au niveau des visites : elle visite les préfectures de Kigali, Gitarama, Butare, Gisenyi et Gikongoro, pendant que les massacres de la population tutsie et les pillages avaient lieu. Une barrière était érigée devant chez elle et des gens m’ont rapporté que des personnes y avaient été assassinées. Elle s’est occupé des déplacés autour de Butare, pour les installer à Mububano [phonétique]. Elle a appuyé le remplacement du préfet Habyarimana Jean-Baptiste sur de faux rapports, alors qu’elle s’était personnellement rendue chez elle, elle a dû constater que les reproches contenus dans ce rapport étaient sans fondement, tel que le démontra les vérifications que j'ai faites moi-même auprès de Félix Semwaga [phonétique] et des membres de ma famille. Elle


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a appuyé aussi le remplacement de Sylvain Nsabimana sur de faux prétextes, tels que le fait qu’il ne se rendait pas suffisamment dans les communes et qu’il n’en était pas informé. Alors que le vrai reproche était qu’il avait envoyé une famille de Butare dans un convoi d’orphelins alors qu’on, qu’on a suspecté, donc, alors qu’on a suspecté que le PL soit au front avec le FPR. Elle connaissait l’existence du camp de déplacés tutsis de Kabgwayi. Lors des déplacements que j’ai faits avec elle en juin à Kibayi [phonétique], les autorités de la commune nous ont montré à Pauline Nyiramasuhuko et à moi, une fosse commune camouflée dans un champ de patates douces où des Tutsi massacrés dans les bureaux communaux avaient été ensevelis. Les murs des bureaux communaux étaient tachés de sang et les dossiers incendiés rendaient la place inutilisable. Je sais que des réfugiés tutsis étaient gardés à Butare. Mes informations me disaient qu’ils étaient gardés soit à l’école primaire protestante, soit à la préfecture. Mais que de toute façon, les extractions [?] ayant été faites, comme responsable de Butare, elle devait être informée de ces faits. Au niveau de la ligne de conduite, je la trouvais irréaliste, elle idéalisait les buts politiques du MRND. Elle le défendait sans comprendre les vrais buts de certains responsables de ce parti.

PD -Ce qui termine la partie écrite de Madame Pauline.
MD -{inaudible]
PD -Tu enchaînes par les. où est mon petit graphique ? Ah, ici. J'avais oublié de vous demander,
l’age approximatif de Monsieur Casimir Bizimungu, puis l’age approximatif de Monsieur Gaspard.
JK -Je ne connais pas.
PD -C’est des gens, ce que je veux dire, c’est les situer par décennies, c’est de gens de la
cinquantaine, des gens de la quarantaine ?
JK -Disons, Casimir devrait être autour de la cinquantaine, Gaspard peut-être un peu moins,

quarante-deux, quarante-trois, des choses comme ça.

PD -Madame Pauline, était la ministre de la famille et de la promotion féminine ?
K -Oui.

PD -Ok. Cette personne-là était. ministre du MRND ?

JK -Oui.

PD -Depuis, quelques années déjà ?

JK -Depuis 92.



T2k7#28 du 01/10/07. -15 janvier 1998 (13h56) 31
KL &RLAA
PD -Depuis 92 ? TT
JK -Oui.
PD -Ok. Elle était responsable de Butare ?
JK -Oui.
PD -Elle assistait, elle originait [sic], elle originait de Butare ?
XK -Oui.
PD -Cette Madame-là vous a suivi, a suivi les déplacements du gouvernement, le, jusqu’à Bukavu,
c’est ça ?
JK -Oui.
PD -Ok. Moi j'aurai besoin de m’absenter. Je sais pas si les autres en ont besoin, je pourrai aussi
peut-être faire la faveur d’apporter un café, s’il y en a qui en veulent.
JK -Oui.
PD -Oui?
MD -Moi je pense que...
PD -Oui?
MD -Oui. J'irai pour le café moi aussi.
PD -Bon, alors je vais. on va s’arrêter, on va préparer le café puis on va revenir. Sceller aussi,

on va devoir sceller. Alors il est 15 heures 44, le ler octobre. On va prendre une petite pause, puis
on va revenir.

Fin de la face B de la cassette # 28.



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