Fiche du document numéro 29712

Num
29712
Date
Avril 2021
Amj
Auteur
Fichier
Taille
19097384
Urlorg
Titre
Écrire l’histoire d’une controverse : les relations entre l’Église catholique rwandaise et le génocide des Tutsi au travers de la presse rwandaise (1994-2003)
Nom cité
Nom cité
Nom cité
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Mot-clé
Cote
n° 2, 2021, Sources de la violence: 45–140.
Résumé
The history and memory of the genocide against the Tutsi in Rwanda have been the subject of much controversy since 1994. In order to study it, academics gather various sources: interviews, public and private archives, and press sources. Each of these sources has its specificities that must be considered.
Although it is not much mobilized, the press is an essential primary source to write a history of post-genocide debates. In a context of still limited access to the public and private Rwandan archives, the press indeed allows us to establish a fine chronology and to identify the actors, their networks, and the circulation of their productions. However, these sources raise practical and methodological questions: where can they be found? What specific biases do they produce?
For this article, I chose to revisit the controversy that has surrounded the responsibility of the Catholic Church in the genocide against the Tutsi. The Rwandan Catholic Church has had a particular role in the intellectual and political history of the country since the colonial era, but also in the history of the media, as clergymen were behind many magazines and newspapers. After 1994, the new Rwandan authorities accused the Catholic Church of being responsible for the genocide against the Tutsi. Specific criticism targeted Catholic missionaries. Starting from a corpus of articles published in 1998-1999, I wish to shed light on the richness of the Rwandan press sources for the study of this controversy. I also aim to show how it can be used within an approach that mainly relates to the history of intellectuals. Such a methodological approach could be extended to other controversies and more broadly to the contemporary history of Rwanda.
Source
Type
Article de revue
Langue
FR
Citation
Au cours des vingt-cinq dernières années, des milliers d’articles scientifiques, thèses et ouvrages ont été produits sur le Rwanda. Ces publications portent sur le génocide des Tutsi de 1994, mais aussi, et surtout, sur la période ultérieure. Elles sont le fait d’universitaires de multiples disciplines : politistes, juristes, littéraires, spécialistes de la justice transitionnelle, plus rarement des historiens. S’il existe des controverses historiographiques fortes sur l’histoire du Rwanda et du génocide, ou encore sur des thématiques spécifiques, tel que le rôle de la France1, les débats portent bien plus exceptionnellement sur les questions épistémologiques, les modalités d’écriture de l’histoire du génocide et plus spécialement sur les sources mobilisées. De fait, les sources utilisées dans le cadre de travaux sur le Rwanda depuis le début des années 1990 sont principalement produites lors de terrains par entretiens et observations. Les universitaires ont aussi largement recours à de la littérature secondaire, ou grise, disponible de plus en plus facilement en ligne2. Plusieurs phénomènes viennent expliquer ce faible intérêt pour les sources primaires, en particulier les archives ou la presse, entre enjeux disciplinaires et difficultés d’accès supposées.

En 2018, Emma Hunter s’interrogeait sur les usages de la presse par les historiens de l’Afrique subsaharienne contemporaine (Hunter 2018, 134). Si son article propose un panorama général sur la question, la majorité des travaux mentionnés concerne les médias écrits de la période coloniale, beaucoup plus rarement la période post-indépendance. Stephen Ellis constatait en 2002 que l’histoire contemporaine de l’Afrique subsaharienne évitait très largement la période postcoloniale (Ellis 2002). La situation a cependant évolué au cours des deux dernières décennies. La revue History in Africa publie par exemple de façon régulière des articles portant sur les sources accessibles aux chercheurs travaillant sur l’histoire contemporaine en Afrique, en particulier sur les archives publiques et privées3. La presse postcoloniale est elle aussi utilisée comme source primaire ou secondaire dans de nombreux travaux récents4.

La recherche historienne sur le Rwanda s’inscrit dans une problématique similaire. Si les archives publiques et privées, les sources de presse, les entretiens avec les acteurs permettent d’écrire une histoire du temps présent, chaque type de source entraîne des formes d’écriture particulière. Dans le cadre de cet article, je souhaite revenir sur les enjeux soulevés par la mobilisation de la presse rwandaise en tant qu’historien au travers d’une étude de cas : les controverses sur le rôle de l’Église catholique rwandaise avant, pendant et après le génocide des Tutsi.

Après 1994, un conflit éclate entre la hiérarchie de l’Église catholique et les nouvelles autorités. Il porte tout d’abord sur le rôle de l’Église avant et au cours du génocide, cette dernière étant accusée de porter de lourdes responsabilités dans les massacres. La controverse concerne les actions de l’Église catholique depuis la colonisation, mais aussi pendant la période du génocide5. De fait, à l’échelle locale ou nationale, la violence a parfois été rendue possible par la participation de certains religieux. Des prêtres catholiques ont ainsi été condamnés dans le cadre de procès au Rwanda ou au Tribunal pénal international. Cependant, si des religieux ont bien participé à l’organisation de massacres, jusque dans leurs églises, bien plus nombreux sont ceux ayant été tués en 1994, le clergé étant très majoritairement constitué de prêtres tutsi6. Au cours de la période de transition politique entre 1994 et 2003, débats, controverses et conflits ouverts ont lieu dans la presse, en particulier autour du « bilan » de l’Église au Rwanda.

Le choix de mobiliser les journaux comme sources pour analyser cette controverse s’explique par les modalités mêmes de cette dernière, qui se déroule principalement dans la presse, alors source et objet d’étude. L’utilité de cette démarche est accentuée par l’histoire du champ médiatique rwandais, l’Église catholique ayant fondé les premières revues intellectuelles et journaux. Il faut aussi rappeler le poids spécifique de l’Église catholique dans la société rwandaise depuis l’époque coloniale. Ainsi, une majeure partie de l’élite politique et intellectuelle rwandaise a été formée dans des écoles catholiques, petits séminaires ou grands séminaires. Les controverses autour de l’Église catholique ont ainsi une portée plus générale sur l’histoire du Rwanda et de la colonisation. De plus, la nature de l’Église catholique, sous l’autorité du Saint-Siège, explique la dimension transnationale de la polémique. Elle rend également compte des débats sur la réécriture de l’histoire après 1994 ou encore sur l’évolution politique, sociale, culturelle et religieuse de la société.

Dans un contexte d’accès difficile aux archives publiques, les sources de presse présentent plusieurs avantages, tels que la régularité de parution ou la couverture étendue des débats publics. Elles représentent une source primaire pour étudier l’histoire des controverses après le génocide et plus largement pour l’histoire des intellectuels7. En l’absence de dépouillement massif de la presse rwandaise, il est encore difficile de présenter un corpus élargi, d’où le choix proposé ici d’une chronologie resserrée et d’un nombre restreint de publications. Quels sont cependant les apports spécifiques de la presse rwandaise pour une écriture de l’histoire de la période de transition, et plus spécialement pour rendre compte des processus de reconfiguration politique, culturelle et sociale qui se déroulent ? Qui sont les acteurs engagés dans les controverses mémorielles, quels récits produisent-ils et dans quels espaces ? Dans cet article, je montrerai que les sources de presse permettent de proposer une analyse sociologique des acteurs de la période de transition. Ces sources renseignent notamment sur la multipositionnalité des acteurs, qui peuvent être religieux et rescapés, membres du Front patriotique rwandais (FPR) et catholiques, de l’évolution de leurs positions dans le temps et selon les champs et espaces d’expression8. Il est enfin possible par le biais des sources de presse de documenter les enjeux mêmes de la controverse sur l’histoire et les récits divergents entre acteurs.

Dans un premier temps, je proposerai un regard sur l’histoire des médias écrits au Rwanda depuis le début de l’époque coloniale, et reviendrai ensuite sur les usages et défis que rencontrent les chercheurs souhaitant utiliser la presse rwandaise. Je m’intéresserai dans un second temps à la controverse sur le rôle de l’Église catholique au Rwanda et montrerai l'apport des sources de presse à sa compréhension, notamment le cadrage sociologique qu’elle apporte.
La presse rwandaise comme source
Une histoire des médias encore lacunaire

L’histoire des premiers médias au Rwanda s’inscrit dans celle de la colonisation, de l’évangélisation et plus largement de l’arrivée de l’écriture (Bart 1982 ; 19809). Très rapidement apparaissent des journaux missionnaires et coloniaux. Le premier journal rwandais Kinyamateka est créé par l’Église catholique en 1933 et existe encore à ce jour (Munyakayanza 2013). Le tournant de l’indépendance s’accompagne de l’instauration de multiples publications. Tout d’abord la presse gouvernementale avec les publications de l’Office rwandais d’information (Orinfor), en particulier Imvaho et La Relève, mais aussi les publications ministérielles. S’ajoutent des parutions de clubs et centres culturels, ainsi que les revues universitaires et d’institutions scientifiques.

La presse religieuse, surtout catholique, se démultiplie dans les années 1960-1970 avec la création de bulletins diocésains, d’institutions religieuses ou paroissiennes, de revues d’écoles secondaires, de communautés, de séminaires. Notons entre autres les revues Urunana du grand séminaire de Nyakibanda et Foi et Culture (anciennement Cum Paraclito) du diocèse de Nyundo qui s’imposent comme des publications religieuses, intellectuelles et culturelles. S’ajoute encore Dialogue, revue d’intellectuels portée par des religieux catholiques10. Sa reconnaissance rapide dans le monde intellectuel s’explique par la qualité des écrits proposés, mais aussi par la langue utilisée, le français. De fait, la revue est un espace permettant au public non kinyarwandophone d’accéder à des débats de la société rwandaise, mais aussi, pour les intellectuels rwandais, de faire connaître leurs réflexions à un public plus large.

En octobre 1990 commence une guerre civile entre l’armée du Front patriotique rwandais (FPR), composé principalement d’exilés rwandais tutsi des années 1960-1970, et les Forces armées rwandaises, exclusivement hutu. Au cours de cette même période, le Rwanda s’ouvre au multipartisme, comme de nombreux pays africains dans un contexte de fin de guerre froide et de « troisième phrase de démocratisation ». On assiste ainsi à une libéralisation de la presse ainsi qu’au développement d’associations de droits de l’homme. Le multipartisme se traduit rapidement par une compétition politique violente, avec des mouvements de jeunesse devenant des milices. Dès le début de la guerre les autorités rwandaises réactivent un racisme anti-tutsi, en partie relayé par une presse extrémiste et certains hommes politiques. Apparaissent ainsi des journaux professant des idées racistes ou critiques à l’encontre des opposants à l’ancien parti unique, le Mouvement révolutionnaire national pour le développement (MRND) ou à la Coalition pour la défense de la République (CDR), un parti raciste anti-tutsi. Le journal Kangura reste le plus connu à ce jour, mais plusieurs dizaines de titres sont alors diffusés.

Le rôle des médias extrémistes au cours de la guerre civile est très tôt discuté dans le monde universitaire (Chrétien 1991). Cet intérêt est redoublé après la création de la Radio-télévision libre des Mille Collines (RTLM) en 1993. Dès l’été 1994, à l’issue du génocide, une recherche est menée sur la responsabilité des « médias de la haine », financée par l’association Reporters sans frontières. Plusieurs universitaires y participent, parmi lesquels Jean-Pierre Chrétien ou encore Marcel Kabanda. Ce travail aboutit à la publication en 1995 d’un ouvrage sur les « médias du génocide » (Chrétien 1995), qui a constitué un premier jalon essentiel à ces débats. Cependant, il a aussi indirectement conduit à des effets de source. La presse démocrate ou non extrémiste de la période 1990-1994 n’a ainsi été que très peu étudiée. La violence politique du début des années 1990 est discutée sous le seul angle des médias de la haine, déconnectés de la presse écrite dans son ensemble. Le « procès des médias » au Tribunal pénal international pour le Rwanda mène aussi à une numérisation et valorisation particulière de la presse extrémiste. Un tel processus aboutit indirectement à une « recherche pilotée par les investissements » et entraîne une curiosité moindre pour les sources non numérisées (Lagrou 2013).

Concernant la presse post-génocide, la situation apparaît encore plus paradoxale. En effet, celle-ci n’a fait à ce jour l’objet que d’un nombre très limité de publications, le plus souvent dans le champ de l’histoire des médias (Deguine 2001 ; Frère 2017). Pourtant, quantitativement, la littérature universitaire sur le Rwanda porte principalement, depuis la fin des années 1990, sur l’après-génocide plutôt que sur le génocide et la période qui le précède. La faible mobilisation de la presse rwandaise de la période de transition par les chercheurs non rwandais ne peut donc pas s’expliquer par un biais de numérisation, mais par une méthode de recherche11.

Au cours de la période de transition, si la presse extrémiste est interdite, certains journaux tels que Kangura continuent à être publiés en dehors des frontières. De leur côté, les nouvelles autorités rwandaises reprennent les journaux distribués par l’Orinfor en changeant simplement le nom (La Nouvelle Relève et Imvaho Nshya). Certaines publications créées après 1990 perdurent, comme Imboni ou Le Tribun du Peuple, d’autres apparaissent après 1994 (Goboka, Urwatubyaye, Rwanda Libération, etc.). À cette presse principalement en kinyarwanda et en français s’ajoutent enfin de nouveaux titres en anglais, par exemple The New Times à partir de 1995. Émergent aussi des revues, comme les Cahiers Lumière et Société portés par le dominicain Bernardin Muzungu, qui porte sur des thématiques politiques, culturelles et religieuses. La revue Dialogue continue en Belgique ses activités « momentanément en exil »12.

La production, la circulation et les usages de ces médias n’ont jusqu’ici pas été étudiés. En bien des points, la presse de la période de transition renseigne pourtant sur les enjeux politiques, sociaux et culturels du moment. La violence reste très largement visible dans les mots utilisés, les caricatures politiques ou encore les multiples photos, du fait des guerres au Congo ou de la guerre des Infiltrés13. Lorsque se termine la période de transition en 2003, la majorité des titres de presse a disparu tant pour des raisons financières que politiques.
Mobiliser la presse rwandaise en historien : défis et usages

En 2020, les universitaires sont encore loin de pouvoir feuilleter la presse rwandaise « par giga-octets », du fait de l’absence de numérisation des principaux journaux passés et existants (Gaillard 2018). Cependant, la difficulté ne réside pas uniquement dans un accès à des collections numérisées, mais aussi papier14. À l’exception de collections privées, rarement déposées dans les centres archivistiques ou les bibliothèques, il n’existe pas en France de fonds de presse rwandaise15. Ensuite, il est difficile de trouver des fonds de presse au Rwanda, en l’absence de guide des sources ou de catalogue en ligne disponible pour les bibliothèques rwandaises16. Au début de mes recherches au Rwanda, l’identification de lieux possédant des fonds de presse relevait d’un savoir largement informel entre universitaires étrangers et rwandais, qui a considérablement progressé au cours des dix dernières années17. S’il n’existe pas de lieu possédant des collections complètes, il est possible d’avoir accès à un vaste type de publications par la fréquentation de multiples bibliothèques : Université du Rwanda, Académie rwandaise de la Culture et de la Langue, Bibliothèque nationale, Centre de documentation et de recherche pastorale des dominicains, Parlement rwandais. Le morcellement des collections de presse rend cependant délicat (et très long) un dépouillement intégral de journaux spécifiques18.

Une autre difficulté dans l’étude de la presse rwandaise concerne la question linguistique. Si le kinyarwanda est la langue nationale, parlée par tous les Rwandais, le français a été la langue d’enseignement dans les établissements du secondaire et le monde universitaire jusqu’à la fin des années 2000, marquées ensuite par un tournant anglophone. Selon le public visé, mais aussi selon les rédacteurs, la presse rwandaise est principalement en kinyarwanda et en français. Pour la majorité des chercheurs non rwandais, le dépouillement de la presse en kinyarwanda prend plus de temps et nécessite un travail de traduction qui est chronophage et coûteux, lorsque l’aide d’un assistant de recherche est indispensable19. Cette situation explique la forte visibilité dans les publications universitaires de la revue Dialogue, qui rend compte de débats politiques, culturels et religieux rwandais en français.

Les rares universitaires non rwandais qui utilisent la presse rwandaise post-génocide comme source sont des chercheurs ayant vécu au Rwanda au cours des années 1970-1980, avec des réseaux leur permettant d’y avoir accès20. De leur côté, les universitaires rwandais écrivent régulièrement à partir de la presse rwandaise en kinyarwanda. Leurs travaux sont cependant souvent publiés dans des ouvrages ou revues mal distribuées en dehors des frontières du Rwanda. La situation aboutit à un paradoxe : les universitaires rwandais mobilisent la presse rwandaise de la période de transition, mais cela est invisibilisé par les conditions de production et de diffusion de leurs travaux. Notons encore que divers mémoires étudiants de l’Université nationale portent sur l’histoire des médias ou la presse comme source21.

La focale sur les titres de presse francophone dans la littérature universitaire non rwandaise conduit à des effets de source évidents. Cela est d’autant plus regrettable que l’étude de la presse permet de s’intéresser au vocabulaire utilisé, en kinyarwanda ou en français, sur les questions mémorielles. L’enjeu est particulièrement important au cours de la période de transition, avant qu’un vocabulaire officiel de la mémoire ne soit véritablement institué dans les années 200022.

L’usage de la presse rwandaise comme source pose ainsi un certain nombre de défis, avec de multiples usages possibles. Deux dimensions peuvent être ici soulignées, à partir du cas de la controverse sur le rôle de l’Église catholique lors du génocide des Tutsi. Tout d’abord, la constitution d’un corpus de presse et de revues permet de cartographier les acteurs de la controverse : journalistes, religieux, intellectuels, mais aussi politiques. Une telle étude rend compte d’une logique générale de réponses et contre-réponses, de tribunes et pétitions interposées, à l’échelle d’un même journal, entre différents journaux rwandais ou entre des publications rwandaises et étrangères23.

Ensuite, utiliser la presse rwandaise comme source permet d’appréhender la circulation de la controverse au niveau international en rendant compte de la circulation d’une documentation provenant de milieux militants, français en particulier. C’est particulièrement le cas pour les débats relatifs au rôle de la France au Rwanda, mais aussi celui de l’Église catholique. Au sein de ces débats, la revue catholique française de gauche Golias devient une référence dès 1995 : des articles publiés dans cette revue inspirent des journalistes rwandais ou sont repris in extenso dans des journaux rwandais, y compris le journal gouvernemental, La Nouvelle Relève.

La circulation fonctionne aussi dans l’autre sens, Golias pouvant reproduire des articles de la presse rwandaise24. Cette circulation entre la presse francophone et la presse rwandaise, mais aussi au sein de la presse rwandaise s’accompagne d’une multitude de modifications des textes : du français au kinyarwanda ou du kinyarwanda au français, textes qui sont parfois résumés25. Un journal comme La Nouvelle Relève utilise largement les publications militantes françaises de l’association Survie, des articles de la presse belge ou française, ainsi que des travaux universitaires français. De fait, pour comprendre cette circulation, il est nécessaire de différencier les récits rwando-rwandais des récits rwando-français ou franco-rwandais.

Dès lors, on voit que la recherche sur le Rwanda s'enrichirait d'un usage plus systématique des sources de presse rwandaise. Leur faible mobilisation s'explique pour l’instant par le manque d’histoire des médias, de guide des sources ainsi qu'à des défis méthodologiques et linguistiques. Lorsque ces difficultés sont résolues, il est possible de proposer de nouvelles approches pour l'étude des controverses.
Un débat mémoriel : l’Église catholique rwandaise et le génocide des Tutsi
Sociologie et cartographie des acteurs de la controverse

L’histoire du rôle de l’Église catholique dans le génocide des Tutsi a fait l’objet d’un nombre particulièrement élevé de publications universitaires depuis 199426. Les sources mobilisées sont multiples, notamment entretiens, rapports, articles de presse. L’usage des archives publiques ou privées, en particulier de l’Église catholique, est extrêmement restreint pour la période contemporaine, depuis les années 1980. Les sources de presse rwandaise sont principalement utilisées par les universitaires rwandais, comme l’historien Paul Rutayisire qui a publié plusieurs articles et chapitres d’ouvrages majeurs sur la controverse, malheureusement peu accessibles hors du Rwanda27. L’historien Philippe Denis a également mené un travail d'ampleur sur l’Église catholique post-génocide et l’Église presbytérienne à partir d’une vaste enquête d’histoire orale, d’archives, et de sources de presse (Denis 2019, et plus particulièrement Denis 2018).

L’étude de la presse rwandaise de la période de transition et la constitution d’un corpus permettent une cartographie des acteurs publiant sur les controverses mémorielles, en particularité ici concernant le rôle de l’Église catholique. Celui-ci permet de nuancer le positionnement censé être homogène des acteurs, leur évolution dans le temps, mais aussi selon l’organe médiatique dans lequel ils s’expriment. Le fait qu’un document soit signé par tous les évêques rwandais ne signifie en effet pas un consensus dans les représentations de ces derniers. Le journal Kinyamateka publiait en 1997 une série d’entretiens rendant compte de cette diversité d’opinions chez les évêques28. En outre, le discours des évêques rwandais change selon qu’il est adressé à un journaliste, un homme politique ou à un missionnaire ou encore en fonction du contexte d’énonciation, en particulier dans une période de guerre civile avec des épisodes de violence et de massacres jusqu’au début des années 2000.

L’analyse des sources de presse permet de proposer une typologie des acteurs de la controverse sur le rôle de l’Église catholique et de distinguer trois grandes tendances : les dénonciateurs, les partisans d’un « droit d’inventaire » et les défenseurs (plus ou moins intégraux) de l’Église. Tous ces acteurs se connaissent, pour certains ont étudié et travaillé ensemble. De nombreux articles sur le rôle de l’Église catholique font écho à des publications passées avec lesquelles ils s’inscrivent en continuité ou en opposition. Cette logique de réponse et contre-réponse peut aussi se situer à un niveau individuel avec une personnification des débats (par exemple Rutumbu 1997 ; Bizimana 1997).

Les dénonciateurs produisent les analyses les plus critiques sur le bilan de l’Église catholique, considérée comme un acteur à part entière du génocide. Ces idées se retrouvent le plus régulièrement dans la presse officielle, La Nouvelle Relève ou Imvaho Nshya, ou des journaux tenus par des intellectuels proches du FPR29. Elles trouvent rapidement un écho favorable en Europe, en particulier auprès d’universitaires ou de personnalités critiques de l’Église en général. La revue Golias, située à Lyon, a ainsi joué un rôle majeur dans l’étude et la dénonciation des responsabilités de l’Église catholique au cours du génocide30. C’est d’ailleurs en France que démarre dès 1995 une polémique concernant Wenceslas Munyeshyaka, ancien prêtre de l’église Sainte-Famille à Kigali, accusé d’avoir participé au génocide. Dans le contexte commémoratif du cinquantenaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, cette histoire est considérée par ces militants, et une partie de la presse française, comme un équivalent de l’affaire Touvier. Les nombreuses publications de Golias ont servi de support à d’autres productions, dont des films documentaires récents31.

De leur côté, les partisans du droit d’inventaire s’interrogent sur le rôle historique de l’Église au Rwanda dans une approche critique, mais ils se veulent aussi force de proposition. Cette approche est principalement portée par d’anciens religieux ou des religieux en exercice après 1994. Les revues catholiques telles Urunana, les Cahiers Lumière et Société et dans une moindre mesure Dialogue se font l’écho de ces opinions après 1994. Certains ecclésiastiques sont particulièrement engagés, tels le dominicain Bernardin Muzungu ou encore le jésuite Octave Ugirashebuja. Des réunions de prêtres ont également lieu au niveau national afin d’évaluer les conséquences du génocide pour l’Église et appellent à une nouvelle pastorale. Concrètement, des prêtres espèrent une réflexion théologique en lien avec le génocide ainsi qu’une évolution des organisations catholiques, exhortant au repentir de l’Église pour certaines de ses actions passées. Les plus importantes rencontres se déroulent au Centre Christus en mai et novembre 1995. Siège des jésuites, ce lieu est symbolique, ayant été l’un des premiers sites de massacres contre des religieux à Kigali en avril 1994. Ces réunions conduisent à la création de l’assemblée des prêtres rwandais (APRERWA), qui essaie régulièrement d’opérer un bilan critique de l’histoire de l’institution catholique32.

Enfin, les défenseurs de l’Église se recrutent majoritairement chez des religieux rwandais hutu en exil ou des missionnaires et laïcs ayant vécu au Rwanda jusqu’en 1994. La revue Dialogue, « momentanément » basée à Bruxelles après le génocide, sert en partie de caisse de résonance à ces thèses ainsi que les publications missionnaires. De nombreux Pères blancs se font les défenseurs du « bilan intégral » de l’Église au Rwanda, tels Guy Theunis (figure historique de la revue Dialogue) ou encore Serge Desouter (proches de réseaux flamands et président du Comité des Instituts missionnaires en Belgique). Ces positions sont appuyées par des organismes et individus catholiques en Europe, engagés sur la cause rwandaise, le plus souvent avant 1994. En France, Madeleine Raffin, missionnaire laïque au Rwanda de 1968 jusqu’à son expulsion en 1997 et proche de Mgr Misago, participe à la circulation de documents et de rapports critiques à l’égard des nouvelles autorités au sein des organismes missionnaires33.

Si les controverses sont multiples après 1994, elles prennent une ampleur particulièrement grande en 1998 et 1999. Au cours de cette période, le pays est en effet marqué par diverses évolutions politiques, culturelles et sociales, dans un contexte économique et géopolitique très tendu, avec la Deuxième Guerre du Congo. Parmi ces évolutions, notons l’organisation des débats nationaux à la Présidence de la République sur les orientations des politiques publiques, mais aussi de plusieurs colloques et séminaires à l’Université nationale en vue de la « réécriture de l’histoire du Rwanda34 ». Ce moment de « grand déballage » concerne là aussi le bilan de l’Église catholique.
L’Église catholique rwandaise et les missionnaires en procès : 1998-1999

L’année 1998 est marquée par une longue suite de tensions diplomatiques entre le Saint-Siège, l’Église catholique rwandaise et le gouvernement rwandais qui se déroule principalement dans la presse rwandaise et internationale35. Elle commence après un communiqué de presse commun des Conférences épiscopales rwandaise et burundaise du 17 février 1998 appelant à la « responsabilité des chrétiens pour la restauration de la paix dans nos deux pays ensanglantés par les massacres massifs de population et le génocide entre ethnies », qui est très mal reçu par les autorités rwandaises (Ndorimana 2001). Ce texte est suivi rapidement d’une réponse par un groupe de religieux et intellectuels rwandais qui dénoncent ces propos et l’utilisation de l’expression « génocide entre ethnies », considérée comme une variante de la thèse du double génocide36. Les signataires regrettent qu’au « moment où les tribunaux rwandais commencent à condamner des membres du clergé à la peine capitale pour crime de génocide, nos Églises devraient réviser leurs discours et éviter toute position partisane, susceptible de compromettre ou discréditer leur autorité morale dans la société » (Ndorimana 2001, 16137).

La tension montante entre l’Église et l’État s’explique aussi par le sort de plusieurs religieux au cours du premier semestre de l’année 1998. Le père Vjeko Curic est assassiné à Kigali à la fin du mois de janvier 1998 dans des conditions troubles. L’abbé André Sibomana, harcelé par les responsables politiques et militaires pour ses positions critiques, meurt de maladie peu de temps après, le 9 mars 199838. Enfin, vient s’ajouter la condamnation à mort en avril 1998 des prêtres Édouard Nturiye et Jean-François Emmanuel Kayiranga pour participation au génocide dans les paroisses de Nyundo et de Nyange.

Cette peine capitale provoque un vif émoi dans l’Église à l’échelle internationale, dans un contexte où se préparent dans différents lieux du Rwanda les premières exécutions de condamnés pour génocide. L’annonce par le gouvernement rwandais des exécutions à venir est accompagnée de nombreuses réactions diplomatiques, à commencer par celle du Saint-Siège. Les critiques redoublent d’intensité dans les milieux missionnaires après les exécutions publiques de vingt-deux condamnés à mort à Kigali et dans plusieurs préfectures, le 24 avril 199839. La publication par l’Agence missionnaire MISNA (Missionary International Service News Agency) d’un texte virulent envers le gouvernement est suivie d’une réponse sèche du ministre des Affaires étrangères, qui fait mention des mauvaises relations entre l’Église et le gouvernement rwandais40. La conférence épiscopale s’étonne ouvertement de ces déclarations, rappelant les nombreuses activités communes qui sont menées41.

À la fin du printemps et à l’été 1998, une série d’articles de presse et de communiqués reviennent sur le bilan de l’Église catholique au Rwanda. La presse officielle rwandaise, La Nouvelle Relève en tête, dénonce le rôle de l’Église dans le génocide. L’ONG African Rights appuie ces critiques en écrivant une lettre ouverte au pape (African Rights 1998). Des organes de presse missionnaires accusent par la suite le gouvernement rwandais ainsi que l’ONG African Rights (MISNA 1998). Des articles parus dans La Nouvelle Relève sont analysés par certains missionnaires comme la volonté des autorités de mettre en place une « Église patriotique », sur le modèle chinois42. L’agence vaticane Fides reprend la même argumentation, dénonçant une campagne gouvernementale visant à créer une « Église nationale ». Peu de temps après, l’APRERWA (association des prêtres rwandais) tient ses assises à Kabgayi du 16 au 18 juin et appelle à étudier le rôle historique de l’Église catholique Rutazibwa (2009, 171).

Plusieurs textes sont publiés dans la presse à l’encontre des missionnaires, par exemple le 30 juin 1998 dans le journal gouvernemental La Nouvelle Relève. Deux articles peuvent être ici mentionnés spécifiquement. Tout d’abord, une note de « chrétiens rwandais » adressée aux missionnaires d’Afrique, qui s’inscrit dans la longue histoire des tribunes collectives et pétitions signées par des acteurs mémoriels et/ou religieux, critiques du rôle de l’Église catholique à l’époque coloniale, sous le Rwanda indépendant et en particulier au moment du génocide (Collectif 1996). Les auteurs condamnent aussi les missionnaires pour avoir protégé des religieux accusés de génocide ou refusé de faire leur autocritique. Ils concluent :

Il importe que votre présent chapitre général considère la présence des Pères Blancs au Rwanda comme une question importante, très importante, à examiner avec une attention particulière. Nous vous suggérons de vous retirer momentanément de ce pays, quitte à revenir plus tard avec un personnel ayant l’avantage de n’avoir jamais été mêlé au drame rwandais.

Document 1. Collectif, « Note des chrétiens rwandais au chapitre des Missionnaires d’Afrique (Pères Blancs) »

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La Nouvelle Relève, n° 362, 30 juin 1998 : 5.
Identifiant permanent : https://doi.org/10.34847/nkl.fa64e60h.
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Transcription : https://api.nakala.fr/data/10.34847/nkl.c4a9av22/6907b7528723ea0c9cc3bdf6d10ab95ab20e9ad8.

Comme pour toute tribune ou pétition, il est difficile d’affirmer avec certitude que les signataires indiqués ont réellement eu connaissance du texte, ou ont réellement approuvé le document43. De plus, on peut remarquer ici que les noms de signataires incluent avant tout des députés du FPR (comme Tito Rutaremara), mais aussi de divers partis politiques critiques vis-à-vis de l’Église catholique tels que Médard Rutijanwa (président du Parti socialiste rwandais), Antoine Somayire, Adrien Rangira (président de l’Union démocratique du peuple rwandais), Protais Mitari (Parti libéral) ou Deus Kagiraneza. S’ajoutent des journalistes tels que Ephrem Rugiriza et Goretti Uwibambe qui travaillent alors pour La Nouvelle Relève. On peut encore signaler le cas particulier de Jean-Baptiste Rucibigango, député du Parti socialiste rwandais et administrateur du journal La Nouvelle Relève, dont la trajectoire révèle la multipositionnalité des acteurs de cette controverse.

Dans le même journal du 30 juin 1998 est publiée une lettre ouverte de Privat Rutazibwa, ancien religieux catholique et auteur d’un des premiers ouvrages édités après le génocide au Rwanda (Rutazibwa 1995). Dans ce texte, il étudie et dénonce les prises de positions de Pères blancs au cours de la période coloniale, de la guerre civile et du génocide des Tutsi, avec un constat d’échec sans appel :

Le négationnisme rampant, la complicité objective et la profonde sympathie envers les génocidaires, la diabolisation constante du FPR associé aux Tutsi et au pouvoir actuel constituent des indices d’un immense dépit de nombreux missionnaires viscéralement hostiles au nouvel ordre politique et frustrés de voir que la restauration de l’ancien ordre n’est pas chose évidente. Le choix du 7 avril, date de commémoration du génocide pour publier votre lettre qui appelle au dialogue avec les génocidaires n’est pas du tout innocent. On se souvient également du deuil et de la rage dans lesquels de nombreux missionnaires ont été plongés par l’exécution de 22 génocidaires. (…) Tout porte donc à croire que pour nombre de missionnaires, la victoire du FPR contre les forces du génocide constitue la catastrophe majeure dans l’histoire politique dans notre pays.

Document 2. Privat Rutazibwa, « Missionnaires de l’évangile ou apôtres de la haine : Lettre ouverte aux responsables de l’ASUMA/Rwanda » (première page)

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La Nouvelle Relève, n° 362, 30 juin 1998 : 12-16.
Document complet :
Identifiant permanent : https://doi.org/10.34847/nkl.b8dd88pw.
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La montée des tensions au cours de l’année 1998 se déroule principalement par articles de presse interposés et déclarations publiques. Nouvellement nommé dans le diocèse de Ruhengeri, l’évêque Kizito Bahujimihigo défend ainsi le travail des missionnaires, rares étrangers à rester dans des conditions difficiles auprès des populations au nord du Rwanda44 (Bahujimihigo 1998b).

La controverse prend une tournure encore plus forte en 1999. La cinquième commémoration du génocide est organisée le 7 avril 1999, sur le site de l’église de Kibeho. Au cours de la cérémonie, l’évêque de Gikongoro Mgr Augustin Misago est ouvertement accusé par des rescapés d’avoir joué un rôle dans les massacres. Le président de la République, Pasteur Bizimungu, réitère ces accusations lors de son discours indiquant que « même s’il est prouvé que Mgr Misago est innocent, nous demandons aux responsables de l’Église de le muter ailleurs » (Vidal 2001, 36). Quelques jours après, le prélat est arrêté. Commence à ce moment-là une nouvelle phase de cette controverse, portant sur la situation de Mgr Misago, la patrimonialisation des églises sites de massacre et, de façon plus générale, sur le rôle de l’Église catholique au Rwanda. En quelques mois, plusieurs centaines d’articles sont publiés dans la presse rwandaise et internationale. À la fin du mois de mai 1999, une violente charge contre l’État rwandais est publiée par L’Osservatore Romano, le journal officiel du Vatican. Anonyme, cet article est signé de trois astérisques, ce qui indique qu’il émane d’un département de la Curie romaine et non d’un journaliste45. Ce texte est un indice de la colère et l’engagement de certains religieux au Saint-Siège sur la question rwandaise, de la circulation des articles sur une dimension transnationale ainsi que la personnification des débats, comme le montre l’extrait suivant :

La campagne de dénigrement a commencé il y a quelques années. Parmi les principaux organisateurs, on trouve Privat Rutazibwa, un ancien prêtre qui est directeur d’une agence de presse gouvernementale. Il soutient que « l’Église catholique est trop dépendante de Rome » et qu’il est nécessaire de « créer une Église nationale rwandaise ». D’autres organes d’information – comme la revue La Nouvelle Relève – ont affirmé que les missionnaires ne sont plus nécessaires au Rwanda, et ils souhaitent la naissance d’une Église nationale. Dans une lettre ouverte, le même Privat Rutazibwa a qualifié les missionnaires d’« apôtres de la haine » (…).

Cet article critique plus spécifiquement le projet de « transformer un certain nombre d’églises catholiques en mausolées du génocide » et indique que le « Saint-Siège s’est opposé à cette intention en soulignant que les églises sont un lieu de culte et de réconciliation pour toute la communauté et qu’elles ne peuvent être monopolisées comme ossuaires par une partie de la population ». Il est aussi suggéré que le gouvernement rwandais contraint la population à ne célébrer qu’un seul souvenir à Nyamata : celui des défunts tutsi. Surtout, l’article dénonce une « vérité oubliée », celle d’un deuxième génocide commis contre les Hutu par les Tutsi :

Les églises, mémorial du génocide ?
De ce projet fait partie la volonté qu’ont exprimée les Autorités de transformer un certain nombre d’églises catholiques en « mausolées » du génocide. Cela laisse transparaître l’intention de graver et de lier dans la mémoire des citoyens rwandais les deux mots : génocide-Église. Le Saint-Siège s’est opposé à cette prétention, soulignant que les églises sont un lieu de culte et de réconciliation pour toute la communauté (tutsie et hutue) et ne peuvent pas être monopolisées comme ossuaires par une partie de la population. En juillet 1997, le gouvernement a pourtant réquisitionné l’église de Nyamata, avec obligation que toute célébration dans le sanctuaire soit une célébration pour les défunts et seulement pour les défunts tutsis massacrés en 1994. (…)
Un aspect inexploré de l’affaire : le double génocide
Actuellement, l’attention de la population est polarisée sur le génocide de 1994. En réalité, il faut sans cesse préciser qu’il y a eu un double génocide au Rwanda : celui contre les Tutsis (et certains Hutus modérés), perpétré après le 6 avril 1994, qui a fait plus de 500 000 victimes, et celui contre les Hutus, à partir d’octobre 1990 jusqu’à la prise du pouvoir par le Front patriotique Rwandais (FPR), tutsi, en juillet 1994. Ce génocide des Hutus a continué ensuite dans la forêt zaïroise, où les fugitifs hutus furent massacrés pendant des mois, sans même bénéficier de la protection de la communauté internationale. Le nombre des victimes hutues se monte à près d’un million. Chacun de ces génocides a été horrible et tous deux doivent être rappelés, d’une manière autre que celle à laquelle s’essaye une propagande unilatérale.

Document 3. « Génocide rwandais : dernier acte »

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L’Osservatore Romano n° 21, 25 mai 1999 : 2.
Identifiant permanent : https://doi.org/10.34847/nkl.c4a9av22.
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Transcription : https://api.nakala.fr/data/10.34847/nkl.c4a9av22/26737f4f4f85bf82b86ece50b41257334c202def.

Fait remarquable, la Conférence épiscopale du Rwanda publie peu de temps après un communiqué critiquant ces positions vaticanes, dans le journal catholique Kinyamateka. Celui-ci est signé par tous les évêques du Rwanda, à l’exception de Mgr Misago alors emprisonné. Ces derniers reconnaissent une « campagne diffamatoire contre l’Église » et regrettent les conditions d’arrestation de Mgr Misago. Cependant, ils remettent aussi en cause la réquisition des églises sites de massacre par l’État, rappelant l’existence d’une commission mixte ayant statué sur cette question. Enfin, les évêques critiquent, poliment, l’affirmation avancée d’un double génocide :

Quant à l’affirmation d’un double génocide, elle devrait être étayée par des arguments autres que des estimations approximatives de tueries dont il faudrait en outre prouver la planification. Nous pensons que l’article a indéniablement le mérite d’aborder un sujet de grande actualité comme celui de l’arrestation et l’incarcération d’un Évêque. Il insiste sur la gravité déjà soulignée par le Saint-Siège. Il nous a paru cependant opportun d’émettre ces quelques observations qui aideraient à mieux percevoir la réalité d’une situation complexe.

Document 4. Conférence des évêques catholiques du Rwanda. « Observations à propos de l’article intitulé “Génocide Rwandais : dernier acte” »

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Kinyamateka n° 1526, juillet 1999 : 8.
Identifiant permanent : https://doi.org/10.34847/nkl.9b847g14.
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Du côté de la presse gouvernementale, les critiques se concentrent sur certaines figures missionnaires historiques, en particulier Mgr Perraudin, qui fête son jubilé en Suisse en avril 1999. Archevêque du Rwanda au tournant de l’indépendance, il est alors considéré par une partie des autorités et intellectuels rwandais comme un théoricien des idées extrémistes, ayant mené au génocide (Byanafashe 2004). Pour nombre de ces intellectuels, les débats des années 1990 trouvent leur source dans la période coloniale :

Rome a eu la main heureuse en choisissant Mgr Bigirumwami, personnalité de haute stature qui, par l’exemple, a clairement montré qu’on peut être à la fois profondément rwandais et chrétien. Il avait rassemblé au tour de lui des Rwandais de toutes origines, prêtres et laïcs ainsi que des missionnaires, religieux et laïcs, avec lesquels il avait formé des équipes solides qui ont longtemps opposé au couple contre nature du colon et du missionnaire. L’union de ce couple diabolique, représenté au tournant des années 1960 par André Perraudin et le tandem Harroy-Logiest donnera un fruit maudit qui depuis lors n’a cessé d’empoisonner les Rwandais et leurs voisins et divisé le monde en Hutu et Tutsi, considérés, pour les besoins de la cause comme ennemis. Les succès de cette alliance a porté un coup sévère non seulement à la Nation rwandaise mais également à l’Église catholique du Rwanda qu’elle a engagée dans une zone de tempêtes. L’Église évitera de répéter l’erreur commise en recrutant une personnalité aussi incontrôlable que Mgr. Bigirumwami : on recrutera désormais des personnages essentiellement ternes, médiocres, dociles et parfaitement à l’aise dans le PARMEHUTU de Kayibanda et l’équilibre ethnique et régional de Habyarimana. Théories et pratiques racistes et donc en contradiction avec les préceptes de l’évangile que l’Église prêche publiquement : on n’y verra aucune contradiction !

Document 5. Mwaniwabo, « Église catholique du Rwanda : de la tornade à la tourmente » (première page)

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La Nouvelle Relève, n° 385, 15 juin 1999 : 15-16.
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L’année 1999 est marquée principalement par l’affaire de l’évêque Misago et le début de son procès. Le journal catholique Kinyamateka propose ainsi un compte rendu régulier des audiences. En l’absence d’accès aux archives judiciaires, le travail mené par Kinyamateka est une source du procès de premier ordre46. L’article suivant rend compte de l’audience du 14 septembre 1999. Les journalistes de Kinyamateka essaient de décrire objectivement les enjeux lors des audiences (Rwagahirima 1999) :

Jeudi le 14 septembre, le procès de Monseigneur Augustin Misago, commencé le 20 août 1999, s’est poursuivi à la Chambre Spécialisée du Tribunal de Première Instance de Kigali. Le Président du Siège a omis de donner lecture des 5 chefs d’accusations retenues contre Mgr Misago puisque cela avait été fait au début du procès, lui demandant de produire ses moyens par rapport à sa part présumée de responsabilité dans l’assassinat des trois abbés Canisius Mulinzi, Irenée Nyamwasa et Musoni Aloys (deuxième chef d’accusation). Suite à un questionnement des juges, Monseigneur Augustin Misago a précisé qu’il connaissait effectivement les trois prêtres mais n’avait pas de détails des circonstances de leur assassinat, hormis certains incidents ayant précédé leur arrestation et dont il a fait le récit suivant : « Au début des tribulations de 94, ces prêtres ont pris refuge chez-moi à l’évêché, je les ai accueillis, je me suis occupé d’eux comme j’ai pu (…). Par exemple en date du 21 avril 1994, alors que l’évêché de Gikongoro fut l’objet de deux attaques, avant et après midi, d’hommes armés qui voulaient qu’on leur livre les prêtres et les laïcs qui s’étaient cachés dans les enceintes de l’évêché, j’ai affronté seul les agresseurs, les autorités alertées n’intervenant pas, ou pas à temps (…). »

Document 6. A. Rwagahirima, « Monseigneur Misago nie toute responsabilité dans la mort des trois abbés »

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Kinyamateka n° 1533, septembre 1999 : 8.
Identifiant permanent : https://doi.org/10.34847/nkl.3c211fvv.
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De son côté, la presse gouvernementale diffuse des articles à charge contre l’évêque et de façon plus large sur l’histoire de l’Église catholique rwandaise. Pour exemple, la Présidence de la République publie en août 1999 un texte de quatre pages, proposant une histoire très critique de l’Église catholique au Rwanda, qui se concentre principalement sur son rôle à l’époque coloniale. Après trois pages consacrées à une description historique du rôle de l’Église catholique à l’époque coloniale, l’article conclut :

Comme on le voit dans tout ce qui précède, l’église catholique joua un rôle terriblement destructeur d’un bout à l’autre de l’histoire douloureuse du Rwanda. Elle sema les grains de haine et de destruction dont le génocide n’a été que l’aboutissement direct. Dans ce qui précède aussi, nous avons largement laissé la place aux autres pour raconter la mise à mort de la nation rwandaise. En ne répétant que ce que les autres ont dit ou écrit avec autorité comme le fait le gouvernement rwandais aujourd’hui, comment pouvons-nous être accusé de diffamation envers l’église catholique ? Malheureusement celle-ci n’est pas encore revenue de ses errements passés (…).
Quant à la théorie du double génocide, en le répétant, le Vatican ne fait que ressasser les outrances de François Mitterrand proférés dès le début des tueries en 1994 pour brouiller la réalité. Nul ne doute que le Vatican, tout comme F. Mitterrand n’est pas loin de penser aussi que ce génocide sur les Africains est un “génocide sans importance”. Vu tout son passé chargé au Rwanda, on ne s’en n’étonnera pas. Avant, durant et après le génocide, l’Église catholique au Rwanda affiche une continuité et un acharnement sans faille : de quoi pleurer pour ce pays.

Document 7. Département chargé de la politique et administration du territoire à la Présidence de la République rwandaise, « Le rôle de l’Église catholique » (première page)

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La Nouvelle Relève, n° 388, 15 août 1999 : 8-11.
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Identifiant permanent : https://doi.org/10.34847/nkl.9cbc1j04.
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Passé très largement inaperçu, ce document rend compte de l’évolution politique rwandaise au cours de la période de transition, marquée par une véritable laïcisation. Au-delà de la controverse entre l’Église et l’État, il indique l’apparition d’une politique publique de l’histoire, portée amplement depuis 1998 par la Présidence. La référence finale au rôle de la France vient rappeler la dimension croisée des controverses, à ce jour encore non étudiée. En effet, les acteurs engagés dans les controverses sur la responsabilité de la France et de l’Église catholique au Rwanda sont très souvent les mêmes au Rwanda, mais aussi en France.

Enfin, notons que si les articles de la presse rwandaise sont parfois dénonciateurs à l’encontre de religieux rwandais ou missionnaires, des intellectuels mobilisent également des analyses particulièrement fines des débats, en particuliers théologiques. Par exemple, Jean-Pierre Karegeye revient à la fin du mois de mai 1999 – en pleine affaire Misago – sur les enjeux liturgiques de la controverse dans le journal gouvernemental La Nouvelle Relève, concernant notamment la profanation des églises au cours du génocide :

Le débat devient éthique et théologique lorsqu’on sait que le défunt baptisé, pour les chrétiens, continue à faire partie de la communauté des croyants peu importe l’état du corps. Les os des nôtres sont dans une certaine mesure des objets sacramentels. Par ce fait, d’après le canon 1176, les funérailles ecclésiastiques est une obligation ; l’inhumation est un droit social et un devoir religieux rendu au défunt.

Il ajoute :

La célébration liturgique du génocide, d’une part, rend honneur aux restes de corps et d’autre part, est nécessaire pour le bien de nos frères défunts. Les rescapés qui ont perdu les leurs se retrouvent pour confesseur leur foi en la résurrection. La prière de l’Église leur apporte consolation et espérance.

Document 8. Jean-Pierre Karegeye, « Génocide et liturgie » (première page)

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La Nouvelle Relève n° 384, 30 mai 1999 : 11-12.
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Identifiant permanent : https://doi.org/10.34847/nkl.36ccu7ss.
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Par ces mots, il vient rappeler qu’il ne s’agit pas d’un débat portant uniquement sur la laïcisation de la mémoire du génocide ou d’un conflit entre l’Église et l’État, mais aussi d’une discussion sur le sens de l’événement au sein de l’Église catholique et de la communauté des croyants.
Conclusion

Les sources de presse contemporaine ont des atouts spécifiques dans des contextes où la consultation d’archives publiques et privées est peu aisée et en l’absence d’outils permettant d’identifier les intellectuels47.

Dans le cas du Rwanda, il rend compte de leur intérêt spécifique pour la construction d’une histoire intellectuelle de la période post-génocide, en particulier concernant les controverses mémorielles. Si la presse mentionne les événements se déroulant en société, elle est aussi l’espace même des débats, avec un nombre particulièrement élevé de tribunes, notes, pétitions lettres ouvertes, réponses et contre-réponses. L’étude de ces multiples publications permet de cartographier les acteurs, leur sociabilité, les récits qu’ils déploient dans le temps et selon les espaces de publication. Au-delà des acteurs et des récits, une pluralité de mémoires et leur discussion s’observent ainsi dans la presse de transition, ce qui disparaît ultérieurement.

Les débats relatifs au rôle de l’Église catholique au Rwanda évoluent très largement au début des années 2000. L’élection en mars 2000 à la présidence de la République de Paul Kagame est suivie de multiples transformations. Mgr Misago est acquitté le 15 juin 2000. Quant aux relations entre l’Église et l’État, elles s’améliorent avec la fin du contentieux concernant les églises sites de massacre. Cette dynamique s’inscrit de façon générale dans une volonté de déconflictualiser la situation politique, avec notamment l’arrêt de la Deuxième Guerre au Congo et de la « guerre des Infiltrés », le vote d’une nouvelle Constitution et le passage à la Troisième République en 2003. Enfin, commence au cours de cette même période les procès Gacaca.

Du point de vue des médias, le contexte évolue également rapidement. Le nombre de publications de presse écrite diminue radicalement en raison de pressions financières et politiques. Ne résistent ainsi que les journaux gouvernementaux, le journal catholique Kinyamateka ou encore le journal anglophone The New Times. Surtout, l’autorisation en 2004 des radios privées conduit à l’apparition de nouveaux médias. Pour l’historien, l’accès aux archives radio reste difficile, voire impossible lorsqu’il n’existe pas d’enregistrement des émissions48. Les difficultés de transcription et traduction sont aussi accrues pour ce type de sources, ce qui constitue des défis majeurs pour les historiens. Enfin, les autorités rwandaises, qui utilisent la presse gouvernementale ou pro-gouvernementale dans les années 1990 comme lieu d’expression de leurs choix politiques, commencent à publier de façon plus importante à la fin des années 2000. De fait, les espaces de controverses se sont aujourd’hui largement déplacés, de la presse aux sites internet et maintenant aux réseaux sociaux.

L’étude de la presse de la décennie 1990 permet toutefois d’éclairer et de complexifier les controverses mémorielles post-génocide. Entre histoire des médias et source pour l’histoire, elle apparaît comme un enjeu majeur pour les universitaires travaillant sur les premiers débats mémoriels, et de manière générale sur les enjeux politiques et sociaux de la période post-génocide. Au niveau méthodologique, ces sources de presse peuvent être considérées comme une porte d’entrée pour la recherche d’archives et la conduite d’entretiens49. Elles mériteraient ainsi d’être intégrées dans une réflexion plus large sur l’histoire des médias, avec une étude de la diffusion et circulation de la presse (combien d’exemplaires imprimés, vendus, disponibles dans des centres), mais aussi la réception par le public (combien de lecteurs et quelle participation au courrier des lecteurs etc.). Il serait nécessaire de proposer des travaux complémentaires sur les revues rwandaises, en particulier Dialogue ou les Cahiers Lumière et Société50.

Du point de vue de l’histoire des intellectuels, les sources de presse sont une entrée majeure. Elles forment un « observatoire de premier plan de la sociabilité de microcosmes intellectuels, [et] sont un espace précieux pour l’analyse du mouvement des idées »51. Plusieurs approches pourraient néanmoins être systématisées : l’analyse de réseaux, la démarche prosopographique ou encore l’étude de discours. Les sources de presse facilitent l’étude des réseaux de sociabilité intellectuelle, politique et religieuse qui se déploient à l’échelle nationale, mais aussi régionale. Croisée avec des entretiens et des archives, la presse simplifie une recherche biographique et la réalisation d’itinéraires individuels. Enfin, en mobilisant un corpus d’articles de presse bien plus large, il serait possible de proposer une analyse lexicométrique, une étude du vocabulaire mémoriel et plus généralement des controverses dans un contexte multilingue52. Ces différentes réflexions méthodologiques supposent cependant la création préalable d’instruments de travail (tables de journaux, index analytiques, inventaires, etc.) qui sont chronophages à l’échelle d’un chercheur seul.

Bibliographie

Documents

Document 1 : « Note des chrétiens rwandais au chapitre des Missionnaires d’Afrique (Pères blancs) », La Nouvelle Relève, n° 362, 30 juin 1998, p. 5. https://doi.org/10.34847/nkl.fa64e60h.

Document 2 : Privat Rutazibwa, « Missionnaires de l’évangile ou apôtres de la haine : Lettre ouverte aux responsables de l’ASUMA/Rwanda », La Nouvelle Relève, n° 362, 30 juin 1998, p. 12-16. https://doi.org/10.34847/nkl.b8dd88pw.

Document 3 : « Génocide rwandais : dernier acte », L’Osservatore Romano, n° 21, 25 mai 1999, p. 2. http://doi.org/10.34847/nkl.c4a9av22.

Document 4 : Conférence épiscopale du Rwanda, « Observations à propos de l’article intitulé “Génocide Rwandais : dernier acte” », Kinyamateka, n° 1526, juillet 1999, p. 8. https://doi.org/10.34847/nkl.9b847g14.

Document 5 : Mwaniwabo, « Église catholique du Rwanda : de la tornade à la tourmente », La Nouvelle Relève, n° 385, 15 juin 1999, p. 15-16. https://doi.org/10.34847/nkl.77ac2sda.

Document 6 : A.Rwagahirima, « Monseigneur Misago nie toute responsabilité dans la mort des trois abbés », Kinyamateka, n° 1533, septembre 1999, p. 8. https://doi.org/10.34847/nkl.3c211fvv.

Document 7 : Département chargé de la politique et administration du territoire à la Présidence de la République rwandaise, « Le rôle de l’Église catholique », La Nouvelle Relève, n° 388, 15 août 1999, p. 8-11. https://doi.org/10.34847/nkl.9cbc1j04.

Document 8 : Jean-Pierre Karegeye, « Génocide et liturgie », La Nouvelle Relève, n° 384, 30 mai 1999, p. 11-12. https://doi.org/10.34847/nkl.36ccu7ss.


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