Fiche du document numéro 31961

Num
31961
Date
Mardi 4 avril 2023
Amj
Auteur
Fichier
Taille
23560
Titre
Génocide au Rwanda : la colère d’un officier français qui ne fut pas écouté en haut lieu
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Nom cité
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Fils et petit-fils de militaires, lui-même ancien de la guerre d’Algérie, le général Jean Varret a la nuque raide et il n’a rien oublié de son éducation à Saint Cyr, dont les instructeurs avaient fait la guerre d’Indochine. Lui-même, sortant de Saumur avec le grade de major, a choisi le 1er régiment de hussard parachutiste, une unité combattante qui se retrouve en Algérie. Là, il s’agit de combattre les « fellaghas », un mot arabe qui signifie bandits et que, entre eux, les Français désignent comme « HLL », hors la loi. Détruire une rébellion menée par les communistes supposés, tout faire, en première ligne, pour que l’Algérie reste française lui apparaît comme son devoir. Lorsqu’il croit que le général de Gaulle l’envoie au combat pour défendre une Algérie rattachée à la France, il le suit sans hésiter, regrettant seulement que l’armée française abandonne aux chacals les dépouilles de ses ennemis. Poussé dans ses retranchements par les questions du journaliste Laurent Larcher, Jean Vallet [Varret] reconnaît qu’il est opposé à l’usage de la torture, mais qu’il ignorait tout de la pratique des viols.

Lorsque le général de Gaulle accorde finalement l’indépendance à l’Algérie, l’officier supérieur exprime son indignation devant ce qu’il estime être un « lâchage ». Sa brillante carrière militaire le mènera cependant à diriger la coopération militaire française en Afrique, sur le conseil du président Mitterrand lui-même. L’officier suit donc 26 Etats, avec une attention particulière pour les pays dits du « champ », c’est-à-dire les anciennes colonies en Afrique.

Nommé par le chef de l’Etat, il est donc d’une loyauté à toute épreuve mais découvre qu’avec le Tchad, le Rwanda consomme près de la moitié du budget de la coopération militaire. C’est dire si son témoignage pèse, venant d’un homme que tout devrait rapprocher du général Huchon, son ancien adjoint, de l’amiral Lanxade, du général Quesnot, acteurs clés de l’engagement militaire français au Rwanda ! Cependant, dès son premier voyage au Rwanda, le général Varret bascule, lorsque le colonel Galinié, attaché de défense auprès de l’ambassade de France à Kigali, l’informe de l’existence d’une hiérarchie parallèle au sein de l’armée rwandaise, liée au lieutenant-colonel Canovas et soutenant directement les extrémistes hostiles aux Tutsis gravitant autour de l’épouse du président Habyarimana, Agathe Kanziga. Autrement dit cet officier droit dans ses bottes, sûr de son autorité et de ses états de service, est bel et bien doublé par des hommes qui échappent à son autorité et mènent une politique directement inspirée par l’Elysée !

Tenu à l’écart des réunions, s’étant vu retirer le commandement du Dami, (département des opérations militaires à l’étranger), outré parce que ses mises en garde ne sont pas prises en compte et qu’il est tenu à l’écart des réunions, Jean Varret décide de démissionner car, dit-il « je veux me désolidariser d’une équipe qui accepte le risque d’un massacre à grande échelle ».

Cette colère, pas encore éteinte et ces souvenirs confiés à Laurent Larcher, nourrissent un document irremplaçable, plus « pointu » que le volumineux rapport de la Commission Duclert qui a conclu aux responsabilités de la France. Publié trois décennies après le génocide des Tutsis, ce témoignage suscite toujours effarement et colère…

Général Jean Varret, Souviens toi ! Mémoire à l’usage des générations futures, Editions Les Arènes.
Haut

fgtquery v.1.9, 9 février 2024