Fiche du document numéro 22170

Num
22170
Date
Mercredi 24 septembre 1997
Amj
Taille
1307262
Titre
Interrogatoire de Jean Kambanda - Cassette # 7 [Les milices et l'auto-défense civile]
Nom cité
Nom cité
Source
Type
Audition judiciaire
Langue
FR
Citation
Face À de la cassette 7.
PD -Bon. Il est 15 heures 52, on reprend après avoir scellées la cassette À, la cassette B, dans une
enveloppe, puis il reste moi à signer le rabat, 15 heures 51, signé par tout le monde.

MD -Alors nous débutons la cassette numéro 7.

PD -C’est-tu à moi ou à toi le verre d’eau ?
MD -C’est à toi.
PD -A moi ? On nous a même apporté de l’eau. Marcel est allé nous chercher ça. Merci

beaucoup. On en était rendu à... On parlait que le MRND se voyait comme le seul opposant au FPR,
que ce soit le FPR forces armées, que ce soit le FPR parti politique, il se voyait seul face aux partis
d'opposition alliés au FPR, faisant un bloc contre lui sans avoir le contrôle sur les forces armées. A
ce moment-là là, est-ce que le MRND se voyait vraiment seul au volant du. de la barque
gouvernementale du pays, puis il voyait tous les autres partis politiques comme des opposants ?
JK -C’est...

PD -Ben excepté là peut-être le PDC, je crois qui était très près d’eux, ou plutôt la CDR ?

JK -Non, c’est... Oui. Mais c’est à dire que si on parle des partis politiques c’est surtout les partis
qui formaient le gouvernement. C’est par rapport aux partis politiques qui étaient au gouvernement.
Parce que, ce n’était peut-être pas un hasard si les autres partis politiques n’avaient pas été mis au
gouvernement, c’est parce qu’on les considérait comme d’une moindre importance.

PD -D'une moindre importance ou associés au FPR ?

JK -Pas nécessairement. Puisque la CDR n’y était pas.

MD -La CDR n'y était pas non plus ?

JK -Elle n’était pas dans le gouvernement.

PD -Est-ce que le fait que la CDR n’y soit pas ça a déjà fait partie de tractations ou de
recommandations ou est-ce qu’il y aurait eu lors de certains accords, qui auraient fait qu’on aurait
dit qu’il fallait pas que la CDR justement, dû au fait des paroles qu’ils avaient, que on...

JK -Non.

PD -Non?
JK -Je n’ai pas entendu ça à cette époque-là, quand on négociait le gouvernement.
PD -Plus tard est-ce que ce fut le cas ?



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JK -Plus tard, puisque le, le, il fut question de ne pas lui accorder un député au niveau du, de
l'assemblée nationale de transition, par le fait que, entre autres, ils se montraient, heu, extrémistes.
Par rapport aux Tutsi.

PD -Vous personnellement quels membres du parti avez-vous vus protégés par des Interahamwe?
JK -Je ne peux pas dire c’est tel ou tel, parce que je ne, à l’époque, ça ne m'a pas frappé, mais

Je savais que ça se faisait.

PD -Ok. C'était pas, c’est pas quelque chose que vous pouvez identifier, c’est quelque chose
que...

JK -Non.

PD -On voit ici, il y a juste une. si vous retournez au paragraphe qui est identifié 34, il y à, il

y a un mot que vous avez enlevé, qui est : “à partir d’avril 94, ce corps d'élite accueillera les jeunes
des autres partis politiques mais toujours au compte-goutte et sous contrôle. Suite aux contacts du
MRND avec certaines factions de partis politiques, anciennement de l’opposition...”, vous avez

enlevé quand vous avez heu... est-ce que c’est volontaire d’avoir enlevé ça ?

JK -Oui c’est volontaire d’avoir enlevé ça.
PD -Est-ce que, est-ce qu’il y a une raison ?
JK -Oui, parce que les, si il y a les partis politiques, ils sont de l’opposition, ils doivent être

considérés comme tels. Parce que les partis politiques sont faits pour ça.

PD -Mais, à ce moment-là, est-ce que le MRND se voit, parce que vous êtes regroupés à ce
moment-là sous le, par l'espèce d’association-là, qui vous permet de. de laisser des gens à, à savoir,
qu'on commence à vous laisser approcher du, des MRND, on vous laisse, on vous laisse commencer
à entraîner vos jeunes etc, etc. Vous êtes considérés, vous n'êtes plus considérés comme
anciennement de l’opposition, vous êtes toujours considérés comme de l’opposition ?

TK -Oui, je sais qu’on disait comme de l’opposition, puisque les, l’histoire que moi j’ai vécue,

m'a montré qu’on était toujours de l’opposition. Même si, il y avait eu cette association.

PD -C’était pas une association qui était formelle, c’était pas une association.
JK -C’était une association peut-être de circonstance, mais ce n’était pas une association.
PD -De fait ?



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JK -De fait.

PD -Ok. Les jeunes de ces deux partis, si on va au paragraphe 35, “les jeunes de ces deux partis
n'ayant reçu aucune formation, et seront formés par des commandants”, c’est qui qui les a formés,
le savez-vous ?

JK -J’ai, au niveau de Kigali, j'ai connu un seul, mais ça pouvait, je ne suis pas sûr que ce soit
le seul à avoir, heu, formé la jeunesse, j’ai enlevé “des commandants”, parce que peut-être que quand
je l’ai dis, j’ai dis que c’était, il avait un grade de commandant, quand il a quitté l’armée, alors je

voulais pas qu’il y ait de confusion.

PD -Ok, qui, heu, qui vous connaissez qui a formé les gens ?

JK -Twagirayezu Laurent [phonétique].

PD -Et, aujourd’hui ? On lui connaît quoi à ce Monsieur-là aujourd’hui ? Il est où, il fait quoi
?

JK -Je ne sais pas ce qu’il fait.

PD -Vous ne savez pas du tout ?

TK -Non.

PD -Qui était ministre de l’intérieur ou de la défense, qui présidait les, les commissions

gouvernementales concernant les besoins en armes et en munitions ?

JK -Donc, au...

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PD -A ce moment-là, à cette époque-là, qui était le ministre de l’intérieur ?

JK -Le ministre de l’intérieur c'était Munyazesa Faustin.

PD -Est-ce que c’est quelqu'un qui VOUS a suivi Ça ?

IK -Non. |

PD -Non. Puis le ministre de la défense ?

JK -Il y en a eu deux. Il y a eu Gasana James et puis Bizimana Augustin.

PD -Ok. Sont, ce sont donc des gens qui étaient avisés de, des besoins militaires, des besoins

militaires de la population civile ?
JK -Oui.
PD -Comment pouvez-vous expliquer ça ? Les besoins militaires d’une population civile ?



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JK -Comment voulez-vous que j’explique alors que c’est pas moi qui ait conçu ce projet ?
PD -Est-ce que le, ce projet-là c’est, c’est. a connu une suite lorsque vous vous étiez là ?
JK -Oui.

PD -Qui s’est appelée la défense civile ou.

JK -Oui.

PD -..Qui était les Interahamwe, appelés défense civile ?

JK -Oui.

PD -Est-ce que vous avez vu, vous avez pourvu vous aussi aux mêmes besoins ?

JK -Oui.

PD -Alors c est pour ça que Je vous demande ça. Comment vous pouvez m'expliquer ça ?

JK -Non, je l’ai déjà dit que.

PD -Les besoins militaires d’une défense civile, d’une population civile.

JK -Je ne peux pas expliquer ça dans la mesure où ce que j’ai vu était déjà programmé, je n’ai
pas eu à inventer ou à dire voilà on va inventer un concept. C’est que les gens avait déjà programmé
ça en haut.

PD -Ok. Vous comme gouvernement, ou vous comme individu, vous êtes vous opposé à ça,
l’achat d’armes et de munitions pour armer des civils ?

TK -Je ne me suis pas opposé à l’achat d'armes ou pour armer les civils.

PD -Ok. C'était quelque chose que vous saviez, que ces armes-là allaient, puis jamais, est-ce que,

est-ce que vous savez si il y a des gens à votre gouvernement qui se sont opposés à ça, à l’achat
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d’armes ?
JK -Je n’en ai pas vus.
PD -Il y a personne que vous avez vu, vous avez jamais entendu personne, il y a personne qui

est venu vous faire des recommandations en disant on ne devrait pas acheter ces armes-là ?

JK -Non, non.

PD -Il vous est jamais venu à l’esprit de dire “on ne devrait pas acheter des armes à une
population civile” ?

JK -Je n’ai pas, peut-être qu’à cette époque on n’a pas réfléchi à tout ça. Mais personne, ni moi,



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ni, ni les autres ministres, n’a jamais dit qu’il ne fallait pas acheter les armes pour les populations
civiles.
PD -Ok. Ça m’amène à peu près dans le même genre de question, vous avez eu la visite de, du

président du PSD, Monsieur François ?

JK -Oui.

PD -I! vous explique que dans sa commune c’est très grave.

JK -Oui.

PD -Il ya des massacres dans sa commune qui sont très graves.

JK -Oui, oui.

PD -Quelle a été la mesure prise, quelle mesure vous avez vous prise personnellement pour que

ces massacres-là cessent ?

JK -Je n’ai pris aucune mesure personnellement. Pour sa commune.

PD -Ok. Sa commune fait partie de quelle préfecture ?

JK -De la préfecture de Butare.

PD -De Butare. Est-ce que le ministre responsable de Butare, ou le ministre de Butare a... le
préfet de Butare, est-ce qu’il y a une autorité de Butare qui vous a demandé d’intervenir dans ce,

cette chose-là ?

JK -Non.

PD -Ok. Est-ce que vous vous avez demandé à ces gens-là d’intervenir ?

JK -Non. |

PD -Vous avez pas non plus fait descendre l’ascenseur jusque là ? [?]

TK -Non. |

PD -Alors c’est, vous, est-ce qu’il y a, est-ce que vous avez partagé cette information-là avec des

gens ? L'information que Monsieur François, le président du PSD, est venu vous colporter au début

d’avril si je me souviens bien ?

JK -Ouïi. Je ne me rappelle pas avoir partagé cette information avec d’autres.
PD -C'est pas une information que vous avez partagée ?
JK -Non.



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PD -C'’est une information qui vous a été confirmée par vos services de renseignement ?

JK -Oui.

PD -Qui de vos services de renseignement vous ont confirmé cette. ?

JK -C’est le responsable des services de renseignement qui me donnait toujours les rapports,

donc je ne négociais pas avec les gens, d’autres personnes au niveau du service de renseignement

que le responsable.

PD -Ok, il y avait une personne qui était chargée de vous rapporter les...
TK -Les infor. toutes les informations concernant le renseignement.
PD -A ce moment-là c'était Monsieur ?

TK -Alexis Nsabimana [phonétique].

PD -Nsabimana.

JK -Oui.

PD -Il était originaire de où lui ?

JK -De Gitarama.

PD -De Gitarama. Puis c’est, cette personne-là vous disait que par les renseignements qu’il avait
c'était véridique ce qui se passait là ?

JK -Oui.

PD -Ok. Marcel as-tu quelque chose à ajouter ?

MD -Oui. Moi je vais revenir à la, à la jeunesse, la jeunesse de votre parti. Vous savez, quand
vous avez demandé, quelles étaient les raisons exactes que vous avez demandées à ce que vos
hommes soient formés aussi, les jeunes de votre parti ?

JK -C’est pas moi qui ait fait directement la demande, donc disons c’est le parti ou les
responsables du parti qui ont fait la demande, je crois que au niveau des partis politiques, en un
certain moment ça a été une certaine course vers la formation militaire.

MD -Mais pourquoi ? Pourquoi qu’on voulait former les, pourquoi qu’on tenait tant à former des
jeunes là de notre parti, de les armer, de les entraîner militairement et de les armer ?

JK -Si Vous savez que votre voisin est en train de s'entraîner militairement et de s’armer, vous

ne pouvez que vous sentir insécurisé et inquiet. C’est ce que je crois, les responsables de mon parti



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politique, ont compris. Ou ont cru. Alors ils se sont dit si les autres partis politiques ont...

PD -Lorsque vous dites les responsables, dans le but de spécifier dans votre déclaration, c’est qui
ça les responsables ?

JK -Parce que la, le, j’ai donné la direction de mon parti politique.

PD -Ok. Mais les responsables, qui a pris cette décision-là que c’était important d’entraîner et
d’armer vos jeunes ?

JK -C’est Karamira, qui était le deuxième vice-président.

MD -De votre parti ?

JK -Oui.

MD -C’est lui, ça ça a été vraiment son projet à lui ça ?

JK -D’après ce que j’ai constaté, d’après ce que j’ai vu, c’est son projet puisque ça a pas été
discuté au niveau du bureau politique, ça a pas été discuté à d’autres niveaux, et puis on associait
même d’habitude la jeunesse du parti à sa personnalité.

MD -Vous nous avez dit tout à l’heure que le MRND dans leurs, dans leurs vues, quand ils ont
formé ce groupe, c’était pour la nation, pour protéger la nation. Quand ils ont, comment, quand ils
ont formé un groupe armé, ils avaient, ils ont, ils ont dit ou ils ont informé la population que c'était
pour protéger la nation ?

JK -Ils n’ont pas informé.
MD -Is n’ont pas informé ?
TK -Ils n’ont pas informé... |
MD -Mais comment là pouvez-vous dire, d’où vient cette information ?

JK -Donc l’information, moi, ce que je dis dans ce document ce n’est pas seulement
l'information c’est aussi l'analyse. Donc les situations telles que moi je les ai analysées. Et qui
peuvent être analysées différemment par une autre personne.

MD -D'accord. Oui parce que je lisais ici que, heu, “en créant une milice armée destinée
prioritairement à la protection des membres de leur parti”.

JK -Oui.

MD -Alors c'était.



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JK -Parce que ils considéraient que les membres de leur parti étaient les plus menacés, sinon les
gens menacés, que les autres n’étaient pas menacés puisqu'ils étaient censés être associés au FPR.
MD -A quel moment ils avaient appris là que c’était pour la nation ? Est-ce que c’est au moment
où vous avez été les voir pour leur dire “nous aussi nos jeunes on veut qu’ils soient entraînés, on veut
que nos jeunes à nous soient entraînés aussi”, et puis ils vous ont, la première fois si je me souviens
bien, on vous a répondu “Nous là, on s’en occupe de ça”, parce que vous étiez considéré comme des
ennemis alors il était pas question qu’on entraîne vos jeunes ?

JK -Oui.

MD -Le MRND a refusé de, de, d’entraîner vos jeunes.

JK -Non, il n’a pas refusé comme tel, il a dit “il faut apprendre à vous connaître, à mieux vous

connaître, si on vous connaît mieux, on pourra ouvrir les portes.”

PD -Ça c'est déjà dans un stade un petit peu plus avancé.

TK -Oui.

PD -Sion retourne à la case départ, est-ce qu’il est même question que vous entraîniez vos jeunes
avec eux ?

JK -Quand ?

PD -Au tout début. Vous commencez, vous savez qu’il y a le MRND), vous de votre côté, germe

l'esprit dans, vous nous dites c’est Karamira..

JK -Oui.

PD qui arrive avec l’idée que, bon, faut nous aussi avoir une jeunesse de parti armée, faut nous
aussi avoir un élément de pouvoir, à ce moment-là le fait que vous veuillez avoir ça, et que vous
veuillez les faire faire entraîner par le MRND, le seul fait que vous pensiez, c’était pas pour, entre
partis, c'était si. il devait y avoir un ennemi commun là, vous deviez avoir identifié un ennemi
commun à ce moment-là, parce que si vous, comme parti, vous décider de faire entraîner vos jeunes
par le MRND, c’est sûrement pas pour combattre la jeunesse du MRND ?

JK -Non, les, les informations que moi j’ai reçues, qui ne sont pas vérifiées, c’est que, au niveau des partis qui étaient dans l’opposition, il y a eu des débats internes, donc au niveau des chefs des partis de l’opposition, il y a eu des débats internes, de savoir si, militairement ils se rallient ou pas



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au MRND ou FPR. C'est en partie ce qui explique la formation disons de, la, la volonté de chaque parti d’avoir sa milice ou alors la scission à l’intérieur des partis politiques. Puisque la scission interne des partis politiques n’est pas, il n'y a pas un seul élément qui a déclenché ça, il y a plusieurs éléments à la fois. Et ces informations, je ne peux pas les vérifier, mais ça m’a été rapporté. Et que les gens ont dit, certains, au niveau des partis politiques, ont dit “nous au niveau de l’opposition, nous n’avons pas besoin d’autres alliances, nous avons une alliance militaire avec le FPR”, c’est à ce moment-là que certains ont dit “non, nous ne sommes pas d'accord, avec cette alliance, soit nous nous rallions au MRND, ou alors nous formons notre armée pour avoir une armée au centre, d’une part le MRND avec son armée, le FPR avec son armée, et une armée au niveau des partis politiques de l’opposition”. Ces débats-là auraient eu lieu, mais là je n’ai pas, je ne peux pas confirmer.

MD -Moi il y a une chose, une chose que vous avez dit tout à l’heure là, que vous venez de dire, que j'essaie, que j'essaie de voir, vous dites, vous avez dit “quand votre ennemi est en train de s’armer”, quand je vous ai demandé quel était le but de, de, de...

JK -Quand votre voisin.

MD -Quand votre voisin, alors votre voisin-là, votre voisin c'était le MRND ?

JK -Oui.

MD -Est-ce que vous l’avez, est-ce que vous le voyiez comme un ennemi, si vous voulez vous
armer contre le MRND), ça veut dire que, en principe, vous croyez qu’à un moment donné vous allez,
vous formez une confrontation avec eux ?

JK -C’est, c’est, c’est ce que je viens d'expliquer. J'ai dit que, il y eut un niveau où les partis

politiques de l'opposition se sont crus dans l’obligation d’avoir leur propre armée. Mais ils ne sont

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pas parvenus à se mettre d’accord entre eux pour avoir leur propre armée. Et certains ont dit “Non,
il n’est pas bon de créer une armée au niveau des partis de l’opposition, il vaut peut-être mieux
chercher des alliances” et, dans ces groupes, les uns ont dit “Notre allié naturel c’est le FPR en tant
que une organisation déjà de l'opposition”, d’autres ont dit “Non, nous nous ne pouvons pas nous
rallier en aucun cas au FPR”, mais ça, comme je le dis, c’est des informations que j'ai reçues non-
vérifiées, je ne peux pas confirmer.

PD -Chez vous est-ce que c’est ça qui explique la scission ?



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JK -En partie. Puisque on va retrouver, au niveau des comportements ces deux tendances, en
disant “nous nous allons nous rallier au FPR”, “Nous nous allons nous rallier au MRND”.

MD -Ok. finaudible] …

PD -Quelle est la nécessité, à ce moment-là, de continuer à penser à armer cette jeunesse ? Si
vous avez, si Vous vous ralliez, eux ont déjà un groupe armé, pourquoi jugez vous que votre parti
doit aussi avoir un groupe armé ?

JK -Sauf si le parti, il y a pas eu une fusion entre le MRND...

PD -Il ya pas eu une fusion mais par contre les MRND ne sont pas dans votre tête, ne sont pas
des gens qui peuvent, qui vont vous attaquer ?

JK -Non, je ne peux pas répondre, disons, à la place des autres. Si le MRND ne peut pas nous
attaquer en tant que parti, mais 1l vaut peut-être mieux avoir notre groupe armé à nous. La preuve
c’est que quand l’occasion se présentera on les formera.

MD -Oui mais vous avez été formés avec le MRND.

JK -Oui.

MD -C'’est eux qui vont vous les entraîner. Qui vont entraîner vos jeunes.

TK -Oui.

MD -C'est ça ?

TK -Oui. ‘

MD -C'est à dire, c’est le MRND qui va entraîner vos jeunes.

IK Oui. |

PD -Puis vos jeunes à ce moment-là ne seront pas identifiés à votre parti.

MD -Quelle est la nécessité, quelle est la nécessité, c’est certainement de grossir un groupe, qui
était contrôlé par le MRND, de grossir un groupe armé, qui est, qui va servir à quoi, moi j’ai de la
difficulté à voir le raisonnement, pourquoi continuer à armer des gens, des civils, des jeunes, pour
combattre qui ? Combattre qui ?

JK -La, la, la, scis.. la...

MD -Au niveau des partis politiques, on voit qu’il y a un rapprochement, alors il y a plus, il y a
plus cette nécessité de, de, de, d’avoir à se protéger contre l’autre, parce que l’autre est, il est prêt

à nous prendre avec lui, il dit ok viens t’en Là, il vous prend sous son aile, c’est le plus puissant, le



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MRND. Quand vous rappelez que vous êtes sous l’aile du MRND, vous avez plus à avoir peur des
autres, des partis politiques, c’est eux le pouvoir, c’est eux le pouvoir. Pourquoi continuer à ce
moment-là à vouloir former ces jeunes-là ? C’est ça que j'ai de la difficulté à voir le pourquoi on
veut continuer à former des Jeunes, à avoir notre propre défense civile ? Il en existe déjà une là.
MRND ils en ont déjà des gens armés, qui vont vous protéger si [inaudible} , mais au moins on pense
pas qu’ils vont vous attaquer, qu'ils devraient nous attaquer. Est-ce que c’était dans le but de, de, de
grossir un, un groupe, un groupe armé ? Qui pourrait servir dans des circonstances comme celles

qu’on finaudible] ? Est-ce qu’on avait pensé à ça ?

JK -Moi je n'ai pas eu d’information qui me ferait croire que c'était ça qui était pensé.
PD -Est-ce que ça a pu être une conséquence ?
JK -Peut-être une conséquence.

PD -Ok, parce qu’on passe...

MD -Est-ce qu’effectivement.….

PD -On passe d’une armée de 6 000 hommes à 40 000 hommes, puis en plus on sent le besoin
de donner des armes, des munitions, des entraînements, des treillis à des gens, à des civils.

MD -Avant qu'on ne... avant que quoi que ce soit se produise-là. On est bien avant là que les
troubles arrivent.

PD -Tous ces, tous ces gens-là ont une chose en commun, ils sont associés au MRND), fidèles
plus où moins au MRND), entraînés plus ou moins par le MRND), tous rattachés plus ou moins de
coeur ou de pensée au MRND. Vous, votre parti comme vous, vous avez demandé au MRND
d'entraîner vos jeunes, il y a une raison, vous savez, c’est parce que vous partagez un peu leurs vues,
vous partagez un peu leur, selon moi, c’est parce que vous partagez un peu leurs vues, c’est parce
que vous partagez un peu leur idéologie, si vous demandez à quelqu’un d’entraîner vos jeunes, c’est,
il y à une raison à ça là.

JK -Non, parce que ce que j’ai expliqué, au départ, pour la formation des jeunes, c'était dans la
mesure où les accords d’Arusha ne permettraient plus de contrôler l’armée.

PD -Oui, effectivement, il permettra plus au, à un parti politique spécifique de contrôler l’armée
mais va permettre au gouvernement mis en place de contrôler l’armée. Exact ?

JK -C'estexact..



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PD -Le gouvernement démocratique mis en place pourra toujours contrôler son armée.
JK -Oui.
PD -Ok. Alors expliquez moi le besoin d’avoir une, des forces armées civiles ? Puis là, là moi

j'insiste toujours c’est civil, c’est pas, c’est pas une force armée reconnue.

JK -Non j'ai.

MD -Combien pouvait représenter, MRND là c'était quoi la force, l’Interahamwe c'était, combien
qu’ils pouvaient avoir, quel est le nombre ?

TK -Je ne connais pas le nombre, je l’ai dit que je ne connais pas le nombre, je sais qu’il y avait
des gens qui étaient armés, je sais que il y avait des gens qui avaient été entraînés mais je ne peux

pas dire c’était tel nombre.

PD -Sauf qu’on a déjà dit c’était par milliers.

TK -Oui.

PD -C’estça.

JK -Ils étaient nombreux c’est vrai, mais …

PD -Très nombreux.

JK -. je ne peux pas dire c’est deux mille, trois mille, dix mille, je ne connais pas le nombre.
PD -Ok. On ne peut pas mettre une proportion, chez vous non plus j'imagine qu’on peut pas le
faire ?

TK -Heu, moi je ne connais pas combien de gens ont été entraînés par la suite.

PD -Ok. |

MD -Quelle était la proportion approximativement selon vos chiffres-là, de Tutsi dans votre
Jeunesse ? .

JK -Je n’ai aucune idée.

MD -Quel serait, avez vous une idée, combien de Tutsi ont été entraînés, ont joint la défense
civile de votre parti et ont été entraînés par le MRND ?

JK -Je ne crois pas qu’il y en ait.

MD -Vous croyez pas qu’il y en ait.

JK -Non.

MD -Alors c'était, la sélection s’est faite de façon ethnique ?



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JK -Sur le constat, oui.

MD -Sur les constats, oui. Et ça là, vous identifiez là Karamira comme étant responsable de.
JK -Pour notre parti.

MD -Pour votre parti.

JK -Oui.

MD -Est-ce que vous savez de quelle façon que la sélection se faisait ?

JK -Je n’ai aucune idée.

MD -Dans les applications, de quelle façon qu’on demandait, on allait changer, on allait dans des

membres, fallait déjà être membre de votre parti ou … ?

JK -Je n’ai aucune idée, je ne sais pas comment ça s’est fait. Je les ai vus sur place, ils étaient
là.

MD -Ok, c'était déjà fait ?

JK -Oui.

MD -Est-ce qu’à votre connaissance, ces gens-là ont, il y a eu un corps actif, une part active dans
les massacres après le, après la, après le 6 avril ?

JK -Oui ils ont eu une part active dans les massacres.

MD -Ils ont eu une part active.

PD -Est-ce que la défense civile au Rwanda regroupait les Interahamwe ? Est-ce que ça incluait
des Interahamwe ?

JK -Oui.

PD -Est-ce qu'effectivement ça, ça incluait les Interahamwe ? Est-ce qu’à partir du moment où
vous avez établi la défense civile, c'est votre gouvernement qui a établi la défense civile ?

JK -Officiellement, puisque les, c’est à partir de ce moment que les gens ont su qu’il y avait une
défense civile, mais comme je l’ai dit les structures existaient déjà auparavant.

PD -Ce que vous avez fait, c’est que vous avez légiféré sur une situation existante ?

JK -Donc on a rendu publique une situation qui était déjà en place.

PD -Et opérationnelle ?

JK -Opérationnelle dans la mesure où certains avaient déjà reçus une formation militaire et que

eux ils étaient déjà prêts. Pour le 6 avril 94.



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PD -Est-ce que vous confondez défense civile et Interahamwe ?
TK -Qui ?

PD -Vous.

JK -Personnellement je ne les confonds pas.

PD -Vous ne les confondez pas ?

JK -Non.

MD -Est-ce que votre gouvernement les confondait ?

JK -Non c’est à dire que les, les gens qui n’ont pas eu le temps ou qui n’ont pas pu, puisque moi-
même l’analyse je l’ai faite après, ont confondu ça.

MD -Mais vous dites que vous avez fait l’analyse après.

JK - Après.

MD -Donc il est possible pour un bout de temps qu’il y avait une certaine confusion aussi ?

JK -Une confusion dans la mesure où, où les, la défense civile était censée inclure tous les partis politiques, et
où les Interahamwe, ça tout le monde savait, ça n’incluait que les
jeunesses du MRND et de la CDR.

MD -Mais heu...

PD -Puis effectivement, en réalité les Interahamwe c'était MRND, CDR et ceux entraînés par

eux des autres partis ?
JK -Oui.

MD -Parce que tout le monde s’est joint ensemble.

TK -Oui.

MD -Ilya les jeunes là, même les membres de votre parti.
JK -Oui.

MD -...qui ont été, ça a fait une force.

JK -Ils se sont joints à eux.

MD -Ils se sont tous joints.
PD -Alors le, l’identification c’est les Interahamwe.
JK -De toute façon on ne pouvait pas les identifier autrement dans la mesure où eux ils étaient

déjà là. Et que les autres se sont greffés.



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PD -Comme gouvernement quand vous avez mis en place ou légiféré sur la défense civile, est-ce
que c’est parce que vous pouviez pas dire, légiférer sur les Interahamwe ? Est-ce que c'était, est-ce
que tout simplement, à ce moment-là, à partir du moment où vous comme gouvernement, quelle date
exactement avez-vous mis en place la défense civile ?

JK -Je n’ai pas le, la date en tête.

PD Est-ce qu’approximativement, est-ce que vous êtes capable, est-ce que vous êtes capable de
situer un mois ?

JK -Je n’ai pas la date en tête, [inaudible]

PD -Est-ce que c’est à Gitarama ?

JK -C’est à Gitarama.

PD -C’est à Gitarama. Vous étiez pas à Cyangugu ni à Gisenyi ni, vous êtes ni à Kigali, donc

c’est, donc après le 12 avril ?

JK -Oui.
PD -Et avant le début juin ?
JK -Oui.

PD -C'est, c'est dans cette période-là ?
JK -Oui.
PD -J’ai des documents ici qui me montrent le 25 mai, je sais pas, vous les...

JK -Je n’ai pas...

PD -Vous les vérifierez avec moi.
TK -Je n’ai pas la date en tête mais...
PD -Non mais j'ai ici des documents qui parlent du 25 mai, vous allez voir, je vais vous les

montrer, ça va être la première fois que vous allez avoir la chance de les voir. On les observera
tantôt. Si vous voulez, pendant la pause, je vois que le ruban achève, il y a 28 minutes de faites, alors
vous pourrez les regardez pendant la pause. Ce sont des choses, heu. vous quand vous avez dit,
comme gouvernement, on, on crée la défense civile, c’est un constat qu’il existait dans votre pays,
à ce moment-là des gens civils armés qui procédaient à toutes sortes de manoeuvres, de massacres,

de pillages et de. des activités paramilitaires et autres ?

JK -Oui.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 15


PD - Vous avez identifié tout ce groupe-là sous un vocable et reconnu tout ce groupe-là sous un

vocable de défense civile ?

JK -Oui.

PD -Mais ce groupe-là est toujours demeuré identifié Interahamwe ?

JK -Ce groupe-là a toujours été, dans la tête des gens, identifié comme Interahamwe.

PD -Est-ce que c’est juste au sein du gouvernement que c’est devenu la défense civile ?

JK -Je crois que c’est, ça a été au niveau du gouvernement et des autorités mais au niveau de

l’opinion ça a été considéré comme Interahamwe.
PD -Que ce soit l’opinion nationale.

MD -Comme Interahamwe ?

JK -Oui.

PD -Que ce soit l'opinion nationale c’était des Interahamwe.

JK -Oui.

PD -Que ce soit l’opinion internationale c'était aussi des Interahamwe.

JK -Oui.

PD -Puis je pense qu’on peut dire sans se tromper que c'était des Interahamwe. C’est ça ?

JK -Non, dans la mesure où ce sont eux les meneurs, disons les gens qui étaient à la tête, les

autres n'étaient... ils, c'était des citoyens de seconde zone si on peut les qualifier ainsi, parce que les,
les, si vous, vous vous adjoignez à quelqu'un qui a déjà reçu une formation, qui est déjà entraîné,
qui sait déjà ce qu'il a à faire, et que, bon, vous, vous recevez une arme, vous n'êtes pas, vous n’êtes
pas sur la même longueur d’onde que lui.

MD -Mais les autres, on peut dire que les autres se sont fondus dans ce groupe-là, c’est, toute,

toute, toutes les autres-là, les autres jeunesses ?

JK -Ils se sont fondus, ils se sont fondus à l’Interahamwe.

PD -Ils ont été inclus dans les Interahamwe.

JK -Is se sont inclus.

PD -Qui, qui, le gouvernement a fait, je vais vous donner la directive au premier ministre et aux

préfets pour l’organisation de la défense civile qui date du 25 mai, ça porte le numéro 024-0273 je

crois, je vais vous donner ça, vous allez pouvoir en prendre connaissance, parce que là je sens que



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 16
h 47784

le ruban est à la veille de nous laisser. Vous allez en prendre connaissance, on va en profiter pour
prendre une petite pause. Puis on reprendra après, il est, il est, il est, un instant, j’ai 16 h 23 moi.

Fin de la face À de la cassette 7.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 17
Face B de la cassette 7.

PD -Ok, 16 heures 27 minutes. On recommence l’interrogatoire. Est-ce qu’effectivement le, la
missive datée du 25 mai 94, qui s’appelle “Directive du premier ministre aux préfets pour
l’organisation de l’auto-défense civile” est la directive visant à la formation de... C’est de vous ?
JK -Oui.

PD -Je pense qu’il y a pas mieux que l’auteur pour la lire, voulez-vous la lire s’il vous plaît ?
MD -Durant la pause, on a, on a réalisé qu’on était sans électricité.

PD -Oui.

MD -Alors on est maintenant sur le...

PD -La génératrice.

MD -La génératrice.

PD -On va tenter de poursuivre comme ça, mais je sais pas comment, qu'est-ce que ça va faire.
JK -Les directives du premier ministre aux préfets pour l’organisation de l’auto-défense civile.
Monsieur le préfet, entre parenthèse tous, conformément à nos recommandations antérieures, nous
vous communiquons ci-après les directives pour l’auto-défense civile. En ouvrant les hostilités après
l’assassinat du président de la république, le FPR a encore une fois montré qu’il n’a pas renoncé à
la logique de guerre pour atteindre ses desseins. Notre pays étant attaqué, tout rwandais a le devoir
de le défendre, selon ses aptitudes et dans la mesure de ses moyens. Chaque rwandais doit contribuer
à la défense de son peuple, de sa famille et de ses biens. Il est également de son devoir de protéger
les infrastructures et les biens d’intérêt public. La guerre du FPR risque de durer c’est pourquoi nous
devons nous y préparer en conséquence. Pour que notre entreprise de défense de la patrie soit
couronnée de succès, 1l s’avère nécessaire d’appuyer avec toute notre énergie nos forces armées qui
combattent vaillamment l’ennemi. L’ennemi est soutenu par certains gouvernements étrangers qui
fournissent des appuis en hommes et en matériel, pour le convaincre il devient un des... pour le
convaincre [vaincre] il devient impérieux de mobiliser notre arme la plus efficace c’est à dire le
peuple rwandais qui n’a cessé de montrer son appui indéfectible au gouvernement actuel pour la
défense de la patrie en danger. Pour ce faire la population est appelée à se joindre à son armée pour

lutter contre l’ennemi. La force du peuple ne peut se matérialiser que s’il est organisé, entraîné à se



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 18
+

À 47788

n]

vu,

défendre efficacement contre toute agression. C’est pourquoi les autorités communales et
préfectorales doivent tout faire pour que d'ici 15 jours les premières actions de mobilisation,
d'organisation et d'entraînement soient déjà terminées. Pour l'efficacité et l'efficience de la stratégie
d’auto-défense civile, les principes suivants doivent être tenus en considération: l’organisation
tactique et stratégique de la résistance populaire doit être la plus secrète possible. L'encadrement de
la formation physique, morale, idéologique et du maniement des armes, discipline, 4, armement et
logistique, utilisation minutieuse des armes et des munitions. Les membres du comité d’auto-défense
civile, au niveau de chaque secteur sont élus au cours d’une réunion des représentants des cellules.
Ces représentants qui sont au nombre de 5 par cellules sont élus lors d’une réunion des habitants de
la cellule convoquée par le responsable du comité de cellule. Le comité de coordination du secteur
est composé de quatre personnes, dont trois sont élues. Le conseiller de secteur est d'office membre
et joue le rôle de superviseur. Il préside également les réunions de comité. Un coordinateur élu,
responsable du renseignement, de la communication et de l'information, il rapporte les réunions du
comité. Un coordinateur adjoint, élu, de préférence un réserviste, chargé des opérations. Un
responsable élu chargé des moyens logistiques et du personnel, les membres du, des groupes d’auto-
défense civile. Le mandat des membres élus des comités de secteur et de une année renouvelable.
Au niveau communal, le comité de coordination pour l’auto-défense civile est composé de quatre
personnes, dont trois sont élues par les membres du conseil communal d’auto-défense civile, dont
la composition et le mandat sont décrits au point 8. 5, le bourgmestre de la commune est d’office
membre et joue le rôle de superviseur. H préside les réunions du comité communal de coordination
de l’auto-défense civile, ainsi que celles du conseil communal d’auto-défense civile. Un coordinateur
élu est responsable du renseignement, de la communication et de l’information. Il est également
rapporteur des réunions présidées par le bourgmestre dans le cadre de l’auto-défense civile. Il préside
ces réunions quand celui-ci est empêché. Un coordinateur adjoint, élu, chargé des opérations, de
préférence un réserviste, sous-officier ou officier, ou si possible un militaire actif de même catégorie.
Un responsable élu, chargé des moyens logistiques et du personnel. Les membres élus du comité
communal de coordination ont un mandat d’une année renouvelable. Un, un coordinateur adjoint est
responsable du bureau chargé des activités de renseignement, de communication et d’information.

Un cadre civil expérimenté. Un responsable du bureau chargé du personnel, un cadre civil juriste.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 19
k 47789

Un responsable du bureau chargé des opérations, un major. Un responsable du bureau chargé
[inaudible] logistiques et financiers. [inaudible] en économie ou en comptabilité. Ce comité est
chargé de : élaborer les plans globaux de l’auto-défense civile, entreprendre les démarches utiles
pour trouver et mobiliser des moyens requis pour l’auto-défense civile, superviser et évaluer
globalement les activités d’auto-défense civile. Le premier ministre, Kambanda Jean, copie pour
information, son Excellence monsieur le Président de la République rwandaise, Madame et monsieur

les ministres, tous, Kigali.

PD -Ça c’est la directive qui a été votée par le gouvernement ?
JK -Oui.
PD -OK. Qui a, qui a travaillé à l’élaboration de cette directive ?

TK -Je ne me rappelle plus.

PD -Vous vous rappelez plus ?

TK -Non. Mais je sais que les, toutes les informations qui sont contenues là étaient dans la
directive antérieure, dans les di... dans les documents antérieurs que moi j’ai vus après.

MD -Quelle était la nécessité ? De faire un tel, une telle directive ?

JK -Là je ne peux pas dire, c'était telle nécessité, disons que l'objectif est tel qu’il est décrit 1à-
bas.
PD -Bon, rému..., résumez-nous, s'il vous plaît, l’objectif qui vous a...

MD -Amené à...

PD -Amené à publier une directive le 25 mai 1994. Qui, on voit ici, a été diffusée vers le 8 du
6 94 c’est ça ? Date d’entrée 8-6-94 ? |

IK -Oui. |

PD -Alors on peut voir que ça a été diffusé en, en début juin.

JK -Oui.

PD -Expliquez-nous le, le but du gouvernement d'émettre cette directive-là ?

JK -Donc au niveau du gouvernement, le...

PD -En perdant pas l’idée que on sait à ce moment-là que ce sont les Interahamwe qui contrôlent

tout ce qui est défense civile.

JK -Oui.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 20
h. 877 on

PD -Ok.

JK -Donc quand le gouvernement a été mis en place, il y avait déjà une défense civile ou les Interahamwe comme je l’ai dit, qui existaient sur les barrières et qui existaient dans certaines zones du pays. Dans d’autres Zones, notamment les zones qui étaient, qui avaient été considérées comme ne devant pas, heu, n'étant pas susceptibles d’être attaquées, il n’y avait rien qui avait été prévu. Des groupes d’auto-défense se sont créés. D’auto-défense comme on les appelait, ou les groupes, les milices, ce sont créées, les gens qui se sont organisés pour aller faire notamment les massacres, dans toutes les communes, comme celles que j’ai développées pour la commune de Cyanda [phonétique] par exemple, déjà où j’ai posé la question “est-ce qu’il y a des Interahamwe dans votre commune ?”, “Non.”, mais où il m’a expliqué qu’il y a quand même des gens qui, qui massacrent les Tutsi. Alors, c’est dans la discussion que nos avons eu au niveau du gouvernement pour la legisla.. pour les, la responsabilisation au niveau des barrières, il était prévu de le faire également pour la défense civile.

PD -On va peut-être attendre un petit peu là, parce que je sais pas si... [inaudible].

MD - finaudible] vient de l'aéroport.

PD -Ok, ça semble s’amoindrir là, probablement qu’on va être bon pour reprendre le duo, allez-y.

JK -Donc, quand on a mis les, la directive pour le, ramener la sécurité dans le pays, plus communément appelée la pacification, pour la pacification, il était question également de s'occuper de la défense civile dans la mesure où la, les ministres issus des régions qui n’avaient pas été inclues dans la défense civile, au départ, réclamaient pour que eux aussi aient une défense civile chez eux. À cette époque, les, la, l’instruction sur la défense civile n’a pas, n’est pas passée au même moment que on faisait la directive sur la, le retour de la sécurité.

PD -N'’est pas passée, pouvez m’expliquez “n’est pas passée” c’est quoi ?

JK -Au niveau des discussions, au niveau des discussions dans le gouvernement, cette partie-là,
il a été décidé que cette partie-là face l’objet d’une instruction particulière et non pas d’une même
instruction.

PD -Alors c'était, c'était discuté en même temps que vous parliez de pacification vous discutiez
aussi de la défense civile ?

TK -Oui.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 21


K 7791

“ .

si

PD -Qui a proposé, qui a amené ça, ce sujet-là de la défense civile ? Ça a été fait comment cette proposition-là de, de, de revoir ça, ou de, de, d’en discuter dans le but de la, de la rendre officielle, de l’officialiser.

JK -Non, je ne peux pas dire c’est une telle personne ou untel ou un tel individu qui a amené ça.
Je peux dire que c’est, ça a été un sujet qui a été débattu au niveau du gouvernement.

MD -Qui avait intérêt à ce que la défense civile devienne officiellement...

PD -Un organisme gouvernemental.

MD -Un organisme gouvernemental ou tout au moins qui était [inaudible] …

PD -Cautionné ?

MD -Qui était cautionné par le gouvernement ?

JK -Je crois que tout le monde pouvait avoir intérêt à ça. Dans la mesure où ceux qui avaient déjà une défense civile ou les, pour parler plus ouvertement, les responsables du MRND qui avaient déjà formés les Interahamwe militairement avaient certainement un intérêt à ce que cette, heu, défense civile soit endossée par le gouvernement. Là c’est sûr qu’ils avaient un intérêt évident dans le fait que c’est une défense civile qui ne les regarde plus, ça regarde le gouvernement, c'est une affaire du gouvernement. Mais, les, au niveau du gouvernement, d’autres ministres qui ne sont pas nécessairement du MRND pouvaient avoir intérêt sur deux plans. Le premier c’est de l’organisation, peut-être du chaos qu’on constatait au niveau des, des préfectures. Il y avait des gens qui pouvaient avoir intérêt, disant “écoutez, puisque nous on ne sait pas arrêter la machine, au moins qu'on l’organise”, ou alors des gens qui avaient été frustrés quand la décision avait été prise de, d’armer militairement certaines parties du pays, de dire nous aussi il est grand temps que dans nos régions les gens soient armés. C'était les gens qui avaient, les trois groupes de gens qui pouvaient avoir intérêt à ce que la directive [inaudible] …

PD -Ok. Ça c’est des gens qui ont intérêt à ce que la directive apparaisse.
JK -Oui.
PD -Mais là, ce que vous nous avez expliqué, c’est que suite à une réunion des préfets avec votre

gouvernement, si je me trompe vous me corrigerez, le 12 avril ?

JK -Oui. Non le 11.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 22


“3
I
Le
D

PD -Oh,le 11 avril, et parut une directive beaucoup plus tard en avril.
JK -Oui.
PD -Vous dites qu'il y a plein de gens qui ont intérêt à ce que ça devienne, à ce que ce soit inclus

dans cette directive-là.…

JK -Oui.

PD -Mais d’un autre côté vous nous dites que les gens se sont opposés à ce que ce soit inclus
dans cette directive-là.

JK -Oui.

PD -Puis on voit que la directive ici n’est arrivé que le 25 mai 94. Est-ce que vous pouvez
m'expliquer ça ?

JK -Non j'ai pas d'explication.

PD -Il y a pas d'explication ?

TK -….particulière, j'ai, je, parce que j’ai pas en tête une explication particulière pour.

PD -Est-ce que vous avez rencontré de l’opposition à faire émettre cette directive-là, est-ce qu'il
y a des gens qui, heu...

JK -Oui il y a eu beaucoup de débats sur cette directive-là. Sinon on ne l’aurait pas retirée du
texte.

MD -Qui, qui, qui surtout, à quel niveau ça se fait...

PD -Quelle faction s’opposait à ce qu’il existe une directive, vous personnellement, est-ce que
vous vous objectiez à ce qu’il y ait une directive concernant l’organisation de l’auto-défense civile?
JK -Non, moi personnellement je, je ne peux pas dire que j’avais une objection, parce que je ne
VOIS pas pourquoi je me serai opposé à ce qu’il y ait une directive officielle.

MD -Alors vous aviez pas de raison de le faire.

JK -Non.

MD -Alors qui pouvait en avoir des raisons de le faire ? Qui pouvait avoir des raisons de
s'opposer dans votre gouvernement ? Qui pouvait avoir des raisons de s’opposer à ce que la défense
civile devienne officiellement là...

PD -Est-ce que votre parti s’est opposé à ça ?

TK -Je n’ai pas, çeux, de, disons, en mémoire que mon parti se soit opposé, en tout cas ils ne



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 23
m'ont, même si ils se seraient opposés, ils ne m’ont pas demandé de m'opposer…

MD -Non mais est-ce qu'ils l’ont fait effectivement là, pas si, disons, est-ce qu’effectivement
quelqu'un de votre parti s’est opposé ?

JK -Non.

MD -[inaudible]

JK -Je n’ai pas, je ne connais pas, je ne [inaudible].

MD -Est-ce qu’il y a quelqu'un du MRND qui s’est opposé ?

JK -Je ne, je ne vois pas qui, qui a pu s'opposer mais je sais que, au niveau du gouvernement,
il y a eu des oppositions.

PD -Ok, c’est assez simple. Il y a vous, qui représentez les ministres.

MD _-Il y a MRND, il y a MDR, au niveau du PSD ?

PD -Est-ce que le PSD s'oppose à ça ?

JK -Non.…..

MD -Les membres du PSD ?

JK -La di... la, la directive n’a pas été discutée au niveau des partis, elle a été discuté au niveau
du gouvernement.

MD -De votre gouvernement, quand on parle de, des partis, on parle des représentants de ces
partis-là qui siègent au gouvernement.

JK -Oui.

MD -Parce que quelqu'un là c'était... parce que si, si ça avait.

JK -Non, je ne peux pas identifier une personne dans le gouvernement, qui se serait opposée, la
méthode que j’ai utilisée pour diriger les, les débats ne me permet pas de dire c’est untel, untel ou
untel qui s’est opposé.

MD -Mais il y a eu l'opposition ?

JK -Il y a eu de l’opposition.

MD -Elle devait pas être forte.

JK -Elle était forte.

MD Elle devait pas être forte, elle devait pas être forte parce qu’on est rendu là, on est rendu au

PL puis au PDC. A date les premiers partis là, on établi, on est pas mal sûr là que il y a pas personne



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 24
4. 47794

qui s’est opposé, les deux plus forts, dont le MRND. Si le MRND ne s’oppose pas, si le MDR ne
s'oppose pas, si le suivant, qui est le, qui est le PSD ne s’oppose pas, je vois très mal les deux autres
partis commencer à dire “un instant, on n’est pas d’accord”. Je vois très très très très très mal. Ça
prendrait là, à moins qu’il y avait quelqu'un là qui avait vraiment un goût de suicide, là qui était, qui
voulait en finir. Comment peut-on supposer que quelqu'un de ces partis-là aurait osé s’opposer à
un projet qui, de toute vraisemblance, est un, a été accouché par le MRND), ce sont eux en principe
qui avaient les meilleures raisons de le faire, en tout cas qui le cautionnaient. On peut, on peut croire
entièrement. Moi j’ai de la difficulté à voir d’où l’opposition pouvait venir. Je peux pas voir.

JK -J’ai dit que dans le gouvernement, dans la réunion que nous, dans les réunions que nous
avons tenus sur ce [inaudible}, il y a eu de l’opposition. Mais je ne suis pas à même de dire c’est

untel où untel ou untel qui s’est opposé.

PD -Ok. Premièrement il y a eu de l’opposition à l’inclure à même la directive.
JK -Oui.
PD émise aux préfets concernant les mesures visant à remettre la sécurité dans le pays.

JK -C’est ça, oui.

PD -Bon, est-ce que c'était une opposition de faire reconnaître par le gouvernement sa
responsabilité dans la défense civile ou si c’était l’opposition à l’inclure dans cette directive-là ?
JK -À l’époque c'est, c'était présenté comme non-opportun de le présenter en même temps que
l'instruction sur la, le retour de la sécurité. Parce que les arguments qui étaient donnés c’était c’est
deux sujets différents.

PD -Ok.

MD -finaudible]

PD -Donc c'est, c’est, ça c’est ça. Par la suite, est-ce que, là il y a plus, il y en a plus Ià de chose
là, là il y a plus, il y a plus de discussion possible, on s’en va directement vers une directive qui
concerne une chose qui est l’organisation de l’auto-défense civile.

JK -Oui.

PD -Est-ce que vous avez éprouvé de la difficulté à faire émettre cette directive-là au niveau du
gouvernement ?

JK -A cette époque-là non, j’ai pas eu de difficulté.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 25


47795

PD -Ok. Les difficultés que vous avez rencontrées c’est lors de tenter de l’inclure dans l’autre.
JK -De l’inclure dans l’autre.
PD -Ok. Maïs quand vous avez demandé pour la faire paraître, sous sa forme unique, ça vous

avez pas eu de difficulté ?
JK -Non, je, il ny a, je, je n’ai pas entendu quelqu'un qui se dit, qui a dit qu’il était opposé à ce

que cette instruction sorte.

PD -Est-ce que tout le monde était heureux qu’il y ait cette directive-là ?

JK -Je crois que tout le monde était heureux qu’il y ait cette directive.

PD -Est-ce qu’y en a qui interprétaient ça comme une, un cautionnement ?

TK -Même s'ils ne l’ont pas dit, mais je crois que ça ne pouvait être que ça. Moi,

personnellement j’ai, je sais que c’était un cautionnement.

PD -Quand vous avez fait ça vous saviez que vous cautionniez les gestes posés jusqu’à ce jour...
TK -Je savais.

PD -Par des civils armés.

JK -Je savais.

PD -Qu’on appelait Interahamwe.
JK -Oui, je savais.

MD -Mais vous pouviez pas. !

PD -Puis vous changiez le nom à ce moment-la pour défense civile, quel était le but du
gouvernement de changer le nom des Interahamwe pour défense civile ? Expliquez moi pourquoi
le gouvernement y en a un qui a pensé à changer ça, que c’était pas plutôt “directive du premier
ministre aux préfets pour l'orgarisation des Interahamwe” ?

JK -Je ne, je, ça ne pouvait pas passer de cette manière dans la mesure où même avant il n’a
jamais été dit que on organisait les Interahamwe. Ça a toujours été dit qu’on organisait la défense
civile.

PD -OK, mais on s’est entendu tantôt qu’au niveau national, au niveau international, au niveau,

partout, les Interahamwe tout le monde savait que c’était les Interahamwe.

MD -La défense civile c’était les Interahamwe.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 26
TK -Vous comprenez que à tous ces niveaux peut-être que c'était comme ça, mais si déjà la
perception que les gens avaient des Interahamwe c'était une perception négative, ça ne pouvait pas
être la même perception qu’il fallait dire “écoutez, organisez les Interahamwe”. Parce que de toute
façon, en mai, je crois que les gens connaissaient les Interahamwe, connaissaient ce que font les
Interahamwe.

PD -Ok. Quand on parle de, du 8 de juin 94, est-ce que vous êtes en mesure de me chiffrer, me
quantifier le, la quantité de personnes qui ont perdues la vie au Rwanda à cette époque-là, allez
jusqu’à cette époque-là. Si on commence le 6 avril, on prend la période de deux mois, les soixante-et
quelques jours là, couverts par ça. Pouvez-vous me quantifier à peu près le nombre de personnes qui,

de victimes qui ont.

JK -Quand ?

PD -Mais là j'aimerai que vous me situiez, avant la parution de ça.

TK -Oui.

PD -Avant le cautionnement.

JK -Oui.

PD -il ya eu combien de, combien de personnes ?

JK -Donc je peux dire que après la parution de, de cette instruction, il y avait pratiquement plus

de massacres, c'était déjà.

MD -C'était déjà terminé.

JK -C’était déjà terminé oui.

PD -Comment….

MD -Vas-y continues.

PD -Non, non, non.

MD -Ok. On connaît les fonctions, on connaît le rôle que les Interahamwe ou défense civile, les,
ce groupe-là, a joué dans les massacres. Le gouvernement sait exactement ce que ces gens-là ont fait,
comment peut-on, comment peut-on comme gouvernement officialiser un groupe de meurtriers qui
viennent de massacrer une population et en faire, les officialiser comme étant une partie du
gouvernement ? Comment peut-on, quelle justification un gouvernement peut-il trouver pour prendre

un groupe de, d’assassins et d’en faire un, d’en faire, de les officialiser comme étant, faisant partie



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 27
k 47797

du gouvernement ? Quelle était votre raisonnement ? Est-ce que c’était là, rendu à cette période-là
là, on savait exactement ce que ces gens-là avaient fait ?

JK -Oui.

MD -Quel, comment, pourquoi, pourquoi que le gouvernement voulait s’associer, voulait
cautionner ce groupe-là, au point d’en faire un groupe officiel ? C’est, c'était... Moi là, j'aimerai que
vous m'expliquiez là quel était le raisonnement, pourquoi un gouvernement en est venu à faire ce
document, cette proposition sachant tout ce que ces gens-là avaient fait dans le passé, leur réputation.

On voulait en venir à quoi ? On voulait en venir à quoi ?

PD -1, vous vous reconnaissiez les Interahamwe coupables de quoi à cette date-là ?
JK -Coupable de. moi comme individu ?

PD -Oui, oui, oui, vous comme individu.

JK -Je reconnaissais les Interahamwe coupables des massacres sur les barrières.
PD -Coupables des massacres sur les barrières.

TK -Oui.

PD -Ils massacraient qui sur les barrières ?

TK -Ils massacraient les Tutsi.

PD -Is massacraient les Tutsi. Sur base quoi ?

JK -Sur une base ethnique.

PD -Sur une base ethnique, c'était.

MD -C'était clair.

PD -.…. la base ethnique qu justifiait l'élimination de ces personnes-là.
JK -Oui.
PD -Ok. Comme gouvernement, si on prend la même question que Marcel vient de poser, vous

savez à ce moment-là que les, les Interahamwe, que, dont vous changez le vocable pour les appeler
auto-défense civile, sont des gens qui ont éliminé une partie de la population rwandaise, sous sa base
ethnique, sous le, les, parce que c'était des Tutsi, puis vous comme gouvernement vous en venez à
ça. Est-ce que tous les membres du gouvernement étaient d’accord à émettre cette directive-là ?

JK -Je n’ai pas en mémoire une ou des personnes qui se seraient opposées pour l'émission de

cette directive.



T2K7-7 -17 novembre 1997 (17h15) 28
kK 47798
PD -Il y a aucune personne qui a manifesté même privément [sic] ?
JK -Je n’ai pas en mémoire si ça a été fait.
PD -Sa désapprobation face à cette directive ?
JK -Je n’ai pas en mémoire cette personne-là.
PD -OK. Etiez-vous, comme gouvernement, comme individu, est-ce que vous étiez conscient de
l’analyse qu’on fait là présentement ?
TK -Moi en tant qu’individu oui.
PD -Vous, en tant qu’individu, oui. Est-ce que c’est analyse que vous avez partagée avec des
membres du gouvernement ?
JK -Non.
PD -Vous en avez pas parlé à personne ?
JK -J'avais mes propres raisons et mes propres intérêts de sécurité de ne pas faire cette analyse

là. A cette époque.
MD -Avec d’autres ?
JK -Avec d’autres.

PD -C’est une chose que vous pouviez penser...

TK -Je pouvais le penser mais je ne pouvais pas l’exprimer.
PD -Vous ne pouviez pas le dire ?'

JK -Non.

PD -Mais vous pouviez le penser ?

JK -Je le pensais.

PD -Vous l’avez pensé.

MD -Quelle conséquence voyez-vous à ce geste ? Quelle conséquence pour le gouvernement et
pour la défense civile voyez-vous ?

JK -Pour le gouvernement la conséquence était simple, c’est que il endossait toute la
responsabilité sur les massacres.

MD -C'était clair, et c'était énorme ça.

JK -C’était énorme mais je crois que les gens qui faisaient partie de ce gouvernement n’avaient

pas, à cette époque-là, quand je parle, dont je parle, n’avaient pas beaucoup de choix.



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k _ 47799

PD -Ok.
MD -Alors.….
PD -Est-ce que les personnes, je m'excuse Marcel.

MD -Oui vas-y.

PD -Est-ce que les personnes membres du gouvernement, tous les ministres membres du
gouvernement avaient la même information que vous, vous permettant d’arriver à la même
conclusion que vous concernant les Interahamwe, à savoir que ces gens-là éliminaient des gens, des
populations de votre pays, des concitoyens sur leur base ethnique ?

JK -J’estime que oui. Parce que, comme je, je vous l’ai déjà dit à d’autres occasions, tout le
monde était au courant des massacres qui se faisaient dans le pays. Tous les ministres étaient
informés qu’il y avait des massacres dans le pays et qui les faisait.

MD -Alors quand, quand les ministres ont cautionné, quand tout le monde au gouvernement a
cautionné ce document, ils ont cautionné les massacres ?

TK -Ouiï. Is ont cautionné les massacres.

MD -Ils ont cautionné les massacres. Alors il y a pas un membre de votre gouvernement qui
pourrait aujourd’hui se retourner puis dire “moi j'étais pas au courant”, Parce que...

JK -Ou peut-être que il y en aura qui vont le dire mais... qu’ils n’étaient pas au courant.

MD -U y a pas un membre du gouvérnement..

PD -Est-ce que vous êtes capable de démontrer que toutes les personnes du gouvernement étaient
au courant des massacres ethniques concernant la population Tutsi, causés par les Interahamwe ?
JK -Oui je suis capable.

PD -Vous êtes capable de le démontrer. Ok. Ça je pense ça clôt pas mal cette partie-là.….

MD -Oui mais ça faut que ça soit clair, c’est ça c’est la connaissance, la connaissance, les
membres du gouvernement ne pouvaient pas ne pas connaître les, les, les actions de ces gens. Et
aucun ne s’est opposé à cautionner ces gens, ces gestes en signant ou en étant d'accord avec ce
document. On peut, est-ce que, est-ce que vous êtes d’accord avec ça ?

JK -J'ai pas bien compris...

PD -Les, les, les membres, tous les membres de votre gouvernement connaissaient, ne pouvaient

pas ne pas connaître les actions de ces groupes-là. Les assassinats ethniques qu’ils ont commis. Y



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+3
C2
CD
)

a pas personne dans votre gouvernement qui pourrait se lever aujourd’hui, il dit “moi j'étais pas au

courant que ces gens-là faisaient ces atrocités-là” ?

JK -Non.
PD -Tout ie monde les connaissait ?
JK -Oui.

MD -Alors, en retour, quand on a proposé ça personne ne s’est opposé à ça ?
JK -Dans notre système si il y avait une opposition l'instruction ne passait pas.

MD -Bon, alors, on peut, on peut en tirer la conclusion.

JK -I y avait, il y avait un consensus sur tous les documents qui devaient sortir.
MD -C'est ça.

PD -A l’unanimité.

JK -À l’unanimité.

MD -Ok. Alors, on ne peut qu’en conclure que tous les membres de votre gouvernement,
sciemment, ont endossé ce document.

JK -Oui.

MD -En connaissance de cause.

PD -As-tu d’autres choses ?

MD -Non, au niveau de ce document-là... moi j’essayais de comprendre c’est... la question que
je demandais c'était pourquoi, c'était pourquoi que le gouvernement a fait ça. Pourquoi le
gouvernement a, a fait ce document ? Pourquoi, quel était, j'essaie de comprendre la raison, je
comprend il a été fait puis, ça a été fait là, je pense qu’on établit que tous les membres du
gouvernement, mais pourquoi ? Est-ce que vous avez eu des pressions, est-ce qu’il y a des groupes
qui ont fait des pressions sur vous ? Ou qu’il y a des groupes qui ont été faire des. pour avoir ce,
pour avoir ce document officiellement, est-ce que, est-ce qu’il y a des groupes qui ont, qui sont.
JK -Non j'ai pas en mémoire des groupes particuliers qui auraient fait pression pour que ça sorte.
L'information que j'ai c’est que ceci existait avant mais que ce n’était pas rendu public. Parce que
comme je l’ai dit c'était, rien n’a été inventé, rien n’était nouveau dans ceci. C'était quelque chose

d’assez, d’assez connu au sein du gouvernement avant 94.



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MD -Oui. inaudible] où c’est étrange c’est que c’était connu mais là tout à coup ça a été
officialisé.

JK -Oui.

MD -C'est ça, c’est ça qui est étrange, c’est ça qui est difficile à... en tout cas que moi j'ai de la
difficulté à comprendre, la, les raisons pour lesquelles le gouvernement.

PD -finaudible] massacres, on a officialisé ça, devenir un organisme gouvernemental.

MD -C’est la partie où moi là, que j’ai de la difficulté à comprendre, comme gouvernement que
linaudible]..

PD -Moi j'aimerai qu’on réfléchisse sur les quelques points-là qu’on a, dont on a parlé, vous avez
dit que peut-être vous tenteriez de réfléchir, jaimerai aussi que vous tentiez de vous rappeler si il
y a eu un débat sur la défense civile, et si oui quelle a été la teneur du débat, heu. j'aimerai aussi
que vous, demain, que vous nous entreteniez un petit peu sur le. même si J'étais, vous nous avez
dit que même vous étiez en désaccord ou même si vous saviez ce que vous étiez à faire, à cautionner
des gens qui avaient massacré, comme gouvernement, que vous pouviez pas vous opposer à ça, qu'il
était impossible. J'aimerai ça que demain, si c’était possible, que vous commenciez à nous élaborer
pourquoi vous pouviez pas. Quelles auraient été les conséquences, ce serait venu de qui, qui, quel
aurait été quoi, comment pourquoi, vous savez ? Qui, comment, quoi, pourquoi là, toutes les
questions qu’on peut se poser relativement à ça. J'aimerai ça que demain matin on puisse

commencer par Ça, à Savoir, Si VOUS, OU si.

Fin de la face B de la cassette 7.



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