Fiche du document numéro 32050

Num
32050
Date
Mardi 6 août 2013
Amj
Taille
1221815
Titre
Procès-verbal de déposition de Monsieur José de Pinho
Nom cité
Mot-clé
Mot-clé
Cote
n° 579/2008/62 ; D8567
Fonds d'archives
PAT
Commentaire
José de Pinho, technical military assistant with the paras-commando battalion in Kanombe, said that on April 6, 1994, immediately after hearing the sound of the explosions, five of them went to the plane crash site with their leader, Commander De Saint-Quentin, two other French technical military assistants and Major Ntabakuze in the latter's van. In his audition, de Saint-Quentin says he only went there at 10 p.m. De Pinho returned to camp for some of his CRAPs to "secure" the crash zone. He says they searched overnight and the next day for black boxes and missile debris but found nothing. He claims the missile hit the plane from behind while it hit the right wing. He blames Paul Kagame for the attack but he awkwardly acknowledges that "Hutu extremists would never accept the entry of Tutsis into the government". Eight times he speaks of a missile firing post, whereas the Russian SA 7 or 16 missiles are shoulder-fired and do not require a firing post, unlike the Mistral missile.
Type
Audition judiciaire
Langue
FR
Citation
REPUBLIQUE FRANCAISE

PROCES-VERBAL

MINISTERE DE L'INTERIEUR
DIRECTION GENERALE
DE LA POLICE NATIONALE

L'an deux mille treize,
le six août à quatorze heures

DIRECTION CENTRALE
DE LA POLICE JUDICIAIRE
SOUS-DIRECTION
ANTITERRORISTE

nO 579/2008/ 6 L
C/Rose KANYANGE épouse
KABUYE et autres.

Assassinats et complicité
d'assassinats en relation à titre
principal ou connexe avec une
entreprise individuelle ou
collective ayant pour but de
troubler gravement l'ordre
public par l'intimidation ou la
terreur et association de
malfaiteurs en vue de préparer
des actes de terrorisme.

NOUS : Thierry PARRET
Major de police
en fonction à la sous-direction antiterroriste
de la direction centrale de la police judiciaire

--- Officier de police judiciaire en résidence à LEVALLOIS-PERRET (Hautsde-Seine), -------------------------------------------------------------------------------------- Nous trouvant ...., au
domicile de Monsieur José DE PINHO, -------------------------------------------------- Poursuivant l'exécution de la commission rogatoire délivrée le 17 décembre
2008 par messieurs Marc TRFVIDIC et Philippe COIRRE, vice-présidents
chargés de l'instruction au tribunal de grande instance de PARIS relative à
l'information n° 272/00/13 et 1341 (numéro parquet 9729523030) suivie contre
Rose KANYANGE épouse KABUYE et autres des chefs d'assassinats et
complicité d'assassinats en relation à titre principal ou connexe avec une
entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement
l'ordre public par l'intimidation ou la terreur et association de malfaiteurs en
vue de préparer des actes de terrorisme.
Vu les articles 81, 151 et suivants du code de procédure pénale,---------------Assisté du commandant de police honoraire Serge DUMONT, agissant en
tant que réserviste dans le cadre de la réserve civile, ----------------------------------- Contact préalablement pris et accord sans réserve sur une audition au
domicile de l'intéressé, constatons que se présente la personne ci-dessous
dénommée qui nous déclare après avoir juré de dire toute la vérité, rien que la
vérité et n'être ni parent, ni allié, ni au service des partis en cause":
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SUR SON IDENTITE
OBJET:

Procès-verbal de déposition de
monsieur José DE PINHO

--- Je me nomme José DE PINHO, ... Je suis retraité, ---------------------------------------------------SUR LES FAITS
--- Je prends acte que je suis entendu en qualité de témoin dans le cadre de la
commission rogatoire susvisée dont vous m'avez donné lecture. J'accepte de
répondre à mon domicile à l'ensemble des questions qui me seront posées. -------- J'ai préféré une audition à mon domicile pour éventuellement avoir sous la
main des notes de l'époque. ------------------------------------------ .----- -------

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L

--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE P INHO. --- page 2 ------------------------------------------------------------- PV 579/2008/
--- QUESTION: Pouvez-vous nous préciser les dates auxquelles vous étiez
en poste au Rwanda ? -------------------------------------------------------------------REPONSE : J'étais présent au Rwanda du 20 février au 9 mai 1993
(intervention aux abords de Kigali au sein de la 2 ème compagnie du 8ème
RPIMa), puis du 16 septembre 1993 au 12 avril 1994 (coopérant Assistant
Militaire Technique au sein du bataillon para-commando de KANOMBE). ------ QUESTION : A quel titre étiez vous là bas ? -----------------------------------REPONSE : Au titre de la coopération et des accords de défense et de
coopération militaire, signés entre la France et le Rwanda. --------------------------QUESTION: Quels étaient vos responsables hiérarchiques sur place
pour cette mission ? ----------------------------------------------------------------------REPONSE : L'Attaché de défense Monsieur CUSSAC, le conseiller terre
Lieutenant Colonel MAURIN, le chef des coopérants du bataillon-para de
KANOMBE, Monsieur DE SAINT QUENTIN.---------------------------------------QUESTION: Quelles étaient vos fonctions ? ------------------------------------REPONSE : En ce qui me concerne, j'étais Adjudant, responsable de la
formation de trois équipes de commandos de recherche et d'action dans la
profondeur (CRAP) composées de 10 militaires rwandais chacune. ---------------QUESTION : Où étiez-vous basé professionnellement?-----------------------REPONSE : A l'intérieur du camp de KANOMBE, -------------------------------QUESTION: Où étiez-vous logé? --------------------------------------------------REPONSE : A l'intérieur du camp de KANOMBE dans le secteur dédié aux
familles. --------------------------------------------------------------------------------------QUESTION : Que pouvez vous nous dire sur la situation au Rwanda
concernant la période entre votre arrivée dans ce pays et l'attentat?----------REPONSE : L'intervention française de février 1993 a permis d'éviter que
le FPR n'entre dans Kigali et avec certitude une guerre civile totale dans la
capitale faisant des milliers de victimes. ------------------------------------------------A mon retour en septembre 1993, la situation était assez détendue et stable.
Hutus et Tutsis vivaient ensemble sans défiance apparente, jusqu'au départ des
troupes françaises mises en place dans le cadre de l'opération "NOROÎT"'. --Après le départ des troupes françaises et l'arrivée des troupes de la MINUAR
une certaine tension a commencé à se faire sentir. A partir de janvier et
l'arrivée de 600 rebelles Tutsis au CND la situation va considérablement se
dégrader. Cette arrivée du FPR dans Kigali et son installation à l'intérieur du
CND, au sein même de l'état-major de la MINUAR va créer un climat de
défiance de la population Hutue et de l'inquiétude au sein de la population
Tutsie. Cela était particulièrement significatif dans les réactions de mes deux
employés Hutus et de ma cuisinière Tutsi. ---------------------------------------------- L'installation du FPR à l'intérieur du CND au sein même de l'état-major de
l'ONU, la constitution même de cette force, le comportement général des
casques bleus et le parti-pris en faveur du FPR ont fait que la MINUAR a dès
le départ perdu toute crédibilité vis-à-vis des FAR. -----------------------------------Début février 1994, j'ai été informé, ainsi que les trois autres coopérants du
bataillon-para, que des éléments de la MINUAR ont empêché le FPR de tirer
un missile d'origine russe, à partir du toit du CND, sur l'avion des
parachutistes rwandais à bord duquel je me trouvais, lors d'une séance de saut
sur la zone de parachutage qui se trouvait tout près_ de..._l.'aéroport. Bien

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--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINH"
--- page 3 ------------------------------ -PV579/208
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entendu, nous avons aussitôt pris la décision de ne plus survoler le CND et
Kigali. ---------------------------------------------------------------------------------------- La question que je me pose encore aujourd'hui est la suivante: « l'incident
pour déclencher le génocide, n'était-il pas déjà recherché ce jour là » ? --------Au regard de l'accélération de la dégradation de la situation, causée par tous
les événements que je viens de décrire, nous, coopérants français, avons perdu
beaucoup de notre confiance dans l'espoir de voir un jour les accords d'Arusha
aboutir. La constitution d'un gouvernement de transition avec la participation
des leaders du Front Patriotique et l'intégration des rebelles tutsis du FPR dans
l'armée régulière nous semblaient de plus en plus improbables.. ------------------- Nous savions que cela pouvait dégénérer très vite et à tout moment. La
marche en avant vers le bain de sang que les troupes françaises avaient réussi à
empêcher, ces dernières années, nous semblait difficile à stopper.. ---------------- Les émissions de "radio-mille collines" et les échecs des discussions pour
la formation d'un gouvernement mixte Hutus et Tutsis, tout au long du mois
de février et de mars 1994, n'ont fait qu'aggraver les inquiétudes et à Kigali,
tous vivaient dans la crainte de la reprise de la guerre (blancs, Hutus, Tutsis). .
--- Au regard de la situation, nous, militaires français du bataillon-para, allions
consacrer une partie de notre temps à la préparation d'un plan d'évacuation de
nos familles et de nos ressortissants.. -------------------------------------------------- Durant les deux derniers mois avant l'attentat, les militaires du bataillon
para, n'avaient qu'une seule hantise : « la reprise de la guerre avec le FPR ». A
chaque fois c'était eux qui étaient engagés dans le conflit et à chaque fois les
pertes humaines dans leurs rangs étaient considérables.. ---------------------------- La quarantaine d'hommes que je formais n'avait qu'une seule envie : vivre
en paix avec leurs homologues Tutsis. D'ailleurs au bataillon-para il y avait
déjà quelques Tutsis. ----------------------------------------------------------------------- Durant ces deux mois la population civile a vécu dans la peur de subir la
reprise des combats et des massacres. Dans le même temps, les forces de la
MINUAR, loin d'avoir pris conscience de la situation, se faisaient remarquer
en dépensant leur argent dans les hôtels. ------------------------------------------------QUESTION : Que pouvez vous nous dire sur l'attentat survenu le 6
avril 1994 à l'encontre de l'avion présidentiel rwandais? Où vous trouviez
vous à ce moment là ? --------------------------------------------------------------------REPONSE : Personnellement, à ce moment précis, je me trouvais dans ma
maison qui était située à l'intérieur du camp des parachutistes-commandos de
KANOMBE et perpendiculairement à environ 800 mètres du lieu du crash du
Falcon 50. Avec mon fils, je regardais un match de football de la coupe
d'Afrique des Nations, à la télévision.---------------------------------------------------QUESTION : Qu'avez-vous pu voir de vous-même concernant cet
attentat

?

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---REPONSE : Avant de m'être rendu sur le lieu du crash, je n'ai absolument
rien vu. J'ai seulement entendu une explosion, suivie quelques secondes après
d'une plus grosse.---------------------------------------------------------------------------QUESTION : Que s'est-il passé après le crash de l'avion ? avez-vous
entendudes tirs ?--------------------------------------------------------------------------REPONSE : Je me trouvais à KANOMBE, là où_ j'étais- je -n`a' tendu

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--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO. ----- page 4 ------------------------------------------------------------ PV 579/2008/
aucun tir, ni ce soir là ni les jours qui ont suivi. Par contre il y a eu des tirs sur
KIGALI, mais n'y étant pas je ne peux vous décrire ce qui s'y est passé. Le
bataillon para s'est probablement déployé immédiatement aux alentours de
l'aéroport et le FPR s'est déployé autour du Méridien et du Stade national..-------QUESTION: Qu'avez-vous fait précisément juste après les faits ? --------REPONSE : Vers 20h30, j'ai entendu une première explosion, tout près de la
maison, suivie quelques instants plus tard, je pense une poignée de secondes
d'une très grosse seconde explosion. -----------------------------------------------------Sachant que notre avion « Nord Atlas 2501 » et le « Falcon 50 »
présidentiel, devaient revenir de DAR-ES-SALAAM, je me suis dis
immédiatement au fond de moi-même qu'il était certainement arrivé quelque
chose de grave. Aussitôt, j'ai décroché le téléphone pour appeler mon chef, le
commandant responsable des coopérants français du camp de KANOMBE, le
commandant DE SAINT QUENTIN.----------------------------------------------------Les ordres reçus ont été simples: «rendez-vous au bureau pour tenter de
,
savoir ce qu a se passe ». ------------------------------------------------------------------ Notre inquiétude était à son maximum, en partant en moto, j'ai aperçu le
Major rwandais qui commandait le bataillon para-commando, qui sortait de
chez lui. Sa maison se trouvait à côté de la mienne, séparée uniquement par un
petit chemin. Je me suis arrêté près de lui pour lui demander s'il savait ce qui
s'était passé et il m'a répondu qu'il n'en savait strictement rien. Je l'ai informé
que, nous les coopérants, nous nous rendions à notre bureau et il m'a répondu
qu'il en faisait de même. Comme nos bureaux respectifs étaient face à face,
quelques minutes plus tard nous nous sommes tous retrouvés dans son bureau. --Il nous a dit avoir appelé son service de transmissions, puis l'état-major des
forces armées rwandaises à Kigali et que personne n'avait été capable de lui
donner des informations précises. Cependant, il nous a confirmé que l'avion
présidentiel avait bien décollé de DARES-SALAAM.--------------------------------Aussitôt nos visages ont dû s'assombrir et le lieutenant colonel
NTABAKUZE venait, lui aussi, de comprendre que les explosions pouvaient
concerner l'avion présidentiel ou le Nord 2501. Il nous proposa immédiatement
de monter dans sa camionnette personnelle, pour tenter de nous rendre sur le
lieu supposé des explosions. Pour éviter de se faire tirer dessus par les gardes
de la résidence du Président, nous l'avons contournée et sommes remontés
jusqu'à une piste que nous connaissions, au milieu de champs de canne à sucre
à partir de la route de KIBUNGO/KIGALI. ---------------------------------------------Une fois arrivés sur l'axe supposé d'approche des avions, nous sommes
entrés à pied dans le champ de canne à sucre. A peine avions nous fait une
cinquantaine de mètres, que nous avons découvert la queue d'un avion. -----------Quelques instants après, dans le faisceau de ma lampe, j'ai aperçu l'indicatif
d'appel du Falcon 50 (9XR-NN) que je connaissais par coeur, car parfois, lors
des séances de sauts, nous embarquions dans le Nord Atlas 2 501 devant le
hangar où il était stationné. Souvent je montais même à bord de l'appareil pour
discuter avec mes trois collègues pilotes, retraités de l'armée de l'air française
et en contrat de travail avec le gouvernement rwandais. -------------------------------Il ne faisait plus de doute, il s'agissait bien du Falcon 50 du Président, nous
étions tous stupéfaits, le Major rwandais était complément déconfit- ---------------Après quelques minutes très difficiles, nous avons continué notre
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--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PIN.
PV 579/2008/
- page 5 -------------------------------------------------------------

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progression, car sur place il n'y avait que de la tôle. Nous suivions le sillon
creusé au sol par le reste de l'appareil et quelques mètres plus loin nous
sommes tombés sur la carlingue qui était encore en feu. Elle était venue
s'écraser contre le mur de l'enceinte de la résidence présidentielle et l'avait en
partie traverse.--------------------------------------------------------------------------------Par des appels vocaux en rwandais, le Major s'est assuré qu'il n'y avait
personne de l'autre côté du mur et prudemment nous l'avons franchi.
---Devant nous le spectacle était horrible. Les corps avaient été éjectés et
étaient groupés en deux endroits, une vingtaine de mètres en avant de la
carlingue. Ceux de mes trois collègues pilotes français se trouvaient dans une
piscine qui était vide de son eau et semblait ne plus être en fonction. Les autres
se trouvaient au niveau du hangar où était garée la Mercedes du Président.--------Le Major a réussi à identifier un corps, je ne sais plus si c'était celui du Chef
d'état-major des armées ou du ministre de la défense, toujours est-il
qu'immédiatement après, il s'est pris la tête entre les mains et s'est adressé à
nous pour nous dire la chose suivante : « cette fois-ci c'est fichu ! ». ---------------Personnellement, à ce moment précis, je pensais déjà exactement la même
chose
-Après avoir repris ses esprits, le major m'a dit: « il faut aller chercher les
CRAP pour sécuriser la zone ». Deux de mes collègues sont restés sur place et
moi je suis parti avec le lieutenant-colonel et mon chef, NTABAKUZE et DE
SAINT QUENTIN. Ils m'ont déposé à mon bureau pour réceptionner les CRAP
et sont partis rendre compte chacun de leur coté.---------------------------------------Après avoir récupéré une partie de mes CRAP, je les ai guidés sur place et un
périmètre de sécurité a été établi. Comme il faisait nuit noire, il nous était
impossible d'entreprendre de récupérer les corps dans de bonnes conditions,
avant le levé du jour. Par conséquent, avec mes collègues, nous nous sommes
mis à la recherche des fameuses «boîtes noires », qui d'ailleurs, nous le
savions sont oranges.
-Nous avons commencé par explorer les éléments de l'avion qui n'avaient pas
brûlé, dont la queue, car je savais qu'en principe c'est là qu'elles sont
installées
---Habitués aux coupures d'électricité, nous sommes bien équipés en lampes
torches, mais aussi puissantes soient elles, leur éclairage ne remplace pas la
lumière du jour et nous n'avons rien trouvé. Deux de mes collègues ont décidé,
alors, d'aller récupérer des pioches pour nous permettre de retourner les parties
chaudes de la carlingue. Vers une heure du matin nous n'avions toujours rien
trouvé
-Comme nous avions de très bons rapports avec le chef d'escale d'Air France
au Rwanda, le commandant décida d'aller à son domicile lui téléphoner pour
qu'il nous renseigne précisément sur l'emplacement des enregistreurs de vol, à
l'intérieur de l'avion. A son retour il nous a dit que d'après notre collègue d'Air
France, il se peut qu'il n'y ait pas d'enregistreurs de vol dans le Falcon 50.
D'après lui, certains avions présidentiels de cette époque, n'en étaient pas
équipés. Le choix serait laissé à l'acquéreur, d'en équiper ou non son avion, au
moment de l'achat.
-Suite à cette information, comme nous avions une entière confiance en nos
CRAP et que étions très fatigués et dans un sale état vestimentaire, nous avons
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--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO.
PV 579/2008/
- page 6 ------------------------------

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décidé d'aller nous laver, changer de vêtements et, si possible, dormir une
heure ou deux. Nous savions que les jours qui suivraient, seraient très
compliqués pour nous, il faudrait sauver notre peau et protéger nos familles. ---Notre séjour au Rwanda serait probablement terminé dans quelques jours,
mais il nous fallait en repartir tous vivants.--------------------------------------------Nous avions convenu d'un rendez-vous au bureau pour six heures.---------------Le mercredi 7 avril 1994 au matin, le cinquième coopérant et collègue
artilleur qui habitait aussi KANOMBE nous a rejoint à notre bureau, il
s'agissait de l'adjudant GRATADE. Après avoir débriefé et essayé de
comprendre ce qui s'était passé la veille, nous avons établi un plan d'action
pourla journée.
-Notre collègue artilleur était chargé de la protection de nos familles, qui
allaient être regroupées pour la journée, dans deux maisons proches l'une de
l'autre. Accompagné de deux collègues, je me suis rendu de nouveau sur le site
du crash et le commandant est reparti à son domicile pour tenter d'entrer en
contact avec l'Ambassade. Il nous a rejoints un peu plus tard.
---Sur place les CRAP avaient déjà commencé à récupérer les corps et à les
mettre sur des draps, dans le salon de la résidence du président. Ils nous
confirmaient ce que nous savions déjà. À bord de l'avion, en plus du président
rwandais il y avait aussi le président burundais Cyprien NTARYMIRA.
---La clarté étant revenue, nous avons poursuivi la recherche des enregistreurs
de vol, en élargissant le secteur au delà du champ de canne à sucre. Une autre
recherche encore plus élargie, a concerné la recherche du fil de guidage du
missile et d'éventuels débris. Concernant ces deux derniers éléments, nous
étions conscients que nous cherchions une aiguille dans une botte de foin. --------QUESTION: Qu'entendez-vous par guidage par fil ?-------------------------REPONSE : Ne sachant quel type de missile avait été utilisé, nous avons
pensé chercher le fil de guidage, en fait certains missiles notamment anti-char
sont guidés par le tireur au sol par le biais d'un fil qui se déroule derrière le
missile, c'est un fil de connectique avec le poste de tir qui donne la trajectoire
aumissile.-----------------------------------------------------------------------------------Ayant été chef de section missiles anti-char, j'en parle en connaissance de
cause
-Après quelques minutes de réflexion, mon expérience de chef de section
Milan (missile anti-char guidé par fil) m'a fait dire à mes collègues qu'il valait
mieux laisser tomber la recherche du fil, car il est très fin et lorsqu'il a cassé au
moment de l'impact, étant donné la tension et l'altitude, il s'est avec certitude
rétracté sur plusieurs centaines de mètres en arrière de la position. Par ailleurs
j'étais loin d'être convaincu que les missiles utilisés aient été guidé par fils. ------En ce qui concerne les éventuels débris du missile, comment vouliez-vous
trouver de petits morceaux de ferraille dans un champ de canne à sucre de plus
de trois mètres de haut ? ------------------------------------------------------------------Suite à ces analyses et au fait qu'il n'y avait probablement pas
d'enregistreurs de vol à l'intérieur du Falcon, en accord avec mes collègues,
nous avons laissé tomber les recherches.------------------------------------------------

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---QUESTION : Selon un témoignage, juste après le crash, des militaires
du bataillon para sont arrivés, dirigés par la Major Aloys NTABAKUZE

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de déposition
de monsieur José DE PINHO. - ---- Suite durocès-verbal
P
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PV 579/2008/
- page 7 -------------------------------

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et ont enlevé les corps de l'avion. Confirmez-vous ces faits?
---REPONSE : Je le répète, nous étions cinq à nous rendre sur place, le Major
NTABAKUZE et les quatre coopérants français du bataillon-para. Les CRAP
rwandais sont arrivés après. Je confirme qu'il n'y avait aucun corps à
l'intérieur de la carlingue. Ils ont tous été éjectés lorsque la carlingue à percuté
le mûr de la résidence et s'est disloquée certainement après l'explosion du
Kérosène. Les corps de mes trois collègues ont été arrêtés au fond d'une vieille
piscine sans eau, environ dix mètres en avant de la carlingue et du côté droit.
Tous les autres ont été arrêtés par le mur gauche de l'enceinte de la résidence
et le mur du garage à véhicules, une vingtaine de mètres en avant de la
carlingue et du côté gauche de celle-ci. Tous les corps que j'ai vu étaient
entiers, pas très abîmés et leurs vêtement pas brûlés. La carlingue était
complètement disloquée, mais tous les débris, sauf la queue, étaient regroupés
au niveau du mur sur un rayon d'environ 20 mètres. L'avion n'a pas explosé
en vol, c'est une certitude, car aucun débris n'était dispersé. -------------------------------------

---QUESTION: Dans le cadre de vos activités, vous rendiez vous dans le
secteur de la ferme de MASAKA ? ---------------------------------------------------REPONSE : Probablement que je suis passé plusieurs fois par là,
notamment lors des séances de footing. Cependant, je n'ai jamais situé
précisément le nom de "ferme de MASAKA". -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

QUESTION : Quels barrages aviez vous à franchir ? tenus par qui ? -----REPONSE : Je n'ai aucun souvenir de barrages dans ce secteur avant
l'attentat. D'ailleurs, mis à part dans les environs immédiats du camp de
KANOMBE, je n'ai aucun souvenir de barrages, sauf parfois sur les routes
principales à l'extérieur de Kigali qui étaient alors tenus par les FAR et à
l'entrée des villages par les gendarmes. De KANOMBE à KIGALI en passant
par le CND tout le monde pouvait circuler, sans difficulté. Cependant parfois
la nuit des barrages improvisés de la gendarmerie ou de voleurs pour dévaliser
les passants avaient lieu. Pour un pays en guerre depuis 4 ans, contrairement à
d'autres pays africains, il était extraordinairement facile de circuler de jour
comme de nuit et sans grand danger particulier. ---------------------------------------

---QUESTION: Ces barrages étaient-ils contournables?
---REPONSE : Pour peu qu'ils existent, à mon avis sans aucune difficulté. ----

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---QUESTION : Dans les heures ou les jours précédent le 6 avril 1994
aviez vous senti un renforcement du personnel sur ces barrages ou
l'inverse ? -----------------------------------------------------------------------------------REPONSE : Absolument pas --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------QUESTION : Juste avant le barrage du PK19, il existait semble t-il un
petit chemin empruntable à pieds qui passait dans la végétation derrière
le CEBOL et qui menait à l'usine GUTANITE, en aviez vous
connaissance ? -----------------------------------------------------------------------------REPONSE : NON ---------------------------------------------------------------------

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--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO.
- page 8 -----------------------------PV 579/2008/
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---QUESTION: Selon un témoin qui tenait une buvette dans le secteur,
des entrainements de militaires encadrés par des militaires blancs avaient
lieu près du CEBOL et sur le terrain de football prés de la paroisse de
MASAKA, en aviez-vous connaissance ? --------------------------------------------REPONSE : A ma connaissance, le seul blanc à entrainer des rwandais sur
le terrain, après mon arrivée en septembre 1993, c'était moi. Je peux certifier
que je n'ai jamais entraîné mes CRAP sur un terrain de football et je suis
certain de ne pas avoir été aussi loin lors des entraînements militaires,
généralement je restais aux environs du camp de KANOMBE. Par contre lors
des séances de footing, je suis probablement passé par là, en tenue de sport
avecles CRAP.
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--- QUESTION : Connaissiez vous les bâtiments de la société GUTANIT à
MASAKA, l'ancienne usine de fabrication de tôles ondulées? Y aviez vous
constaté une activité quelconque notamment militaire?
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---REPONSE : Je ne connaissais pas cette société donc encore moins ce qu'on
pouvaity faire.
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QUESTION : Selon nos informations, le CND était à l'époque le
cantonnement des soldats du Front Patriotique Rwandais (FPR) fort de
six cent hommes et sous protection de la Garde présidentielle qui y était
hébergée, et d'effectifs de la MINUAR, principalement belges et
bangladais, est ce bien cela?
---REPONSE : Je crois que vous mélangez les genres. La garde présidentielle
du président Habyarimana était composée d'Hutus. En aucun cas ils ne
pouvaient se trouver à l'intérieur du CND. Si on vous a parlé de garde
présidentielle au CND, c'est probablement la garde du chef de guerre Paul
KAGAME. Tout le reste est exact, mais je suis persuadé que les effectifs du
FPR étaient bien plus conséquents. ------------------------------------------------------

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---QUESTION : A priori tous les véhicules qui s'y rendaient ou en
sortaient étaient contrôlés et fouillés, qu'en pensez vous ?-----------------------REPONSE : L'entrée du CND fonctionnait, comme un organisme militaire
à l'africaine, probablement de manière assez laxiste. Les véhicules de
ravitaillement, des visiteurs ou autres étaient certainement contrôlés, fouillés
au vrai sens du mot probablement pas. Ceux du FPR et de la MINUAR
circulaient à mon avis librement. Je pense que les casques bleues de la
MINUAR n'avaient que très peu d'autorité sur les rebelles du FPR à l'entrée
du CND, sauf peut être les soldats belges lorsqu'ils assuraient le service.---------QUESTION: Savez vous ce qui s'est passé au CND après l'attentat? Y
a-t-il eu des mouvements de troupes ? ------------------------------------------------REPONSE : Je n'y étais pas, donc je ne sais pas ce qu'il s'y est passé. Mais
qu'il y ait eu aussitôt l'attentat commis des mouvements de troupes, c'est une
certitude. Puisque dès le lendemain matin et les jours qui vont suivre des
combats vont opposer les rebelles du FPR et les FAR du bataillon-para au
niveau du stade national, et le FPR et les gendarmes tout près de l'hôtel

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Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINH
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méridien. Je suis aussi quasiment certain que les casques bleus de la MINUAR
ont appuyé le FPR, lors de ces combats. A ce sujet il serait intéressant de
savoir si des renforts du FPR sont arrivés au CND les jours précédant
l'attentat.
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---QUESTION : Pensez vous qu'il eût été possible après un tir depuis
MASAKA de rentrer au CND sans problèmes ? des barrages tout azimut
n'avaient-ils pas été dressés à la hâte après l'attentat?
---REPONSE : Je suis absolument certain qu'il n'y avait aucune difficulté
pour un tireur du FPR de rejoindre le CND, après un tir de MASAKA ou des
environs sur l'avion. Aujourd'hui, lorsque je regarde une photo aérienne sur le
site « Google MAP », en raison de l'urbanisation, les lieux ont beaucoup
changé. En 1994 entre MASAKA et le lieu du crash, il n'y avait guère que des
champs de canne à sucre ou d'autres cultures. A l'époque pour nous rendre sur
le lieu du crash il nous à fallu descendre jusqu'à la route de Kibungo à Kigali.
---Lorsque j'ai quitté le site du crash le 7 avril, entre une et deux heures du
matin, je suis certain de n'avoir eu à faire à aucun barrage. Lors du retour sur
place, entre 7 et 8 heures, il en a été de même. Les barrages civils se sont mis
en place que très progressivement.
---Dans Kigali la route entre le stade national et le méridien, en raison des
combats, était coupée. Mais sur les autres axes, deux jours après l'attentat, tout
le monde pouvait circuler librement en ville et les pilleurs en ont largement
profité
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--- QUESTION : Plusieurs témoins déclarent que les tubes lance missiles
auraient été retrouvés à MASAKA par des réfugiés, en avez-vous entendu
parler ? les avez-vous vus ? que sont-ils devenus ? --------------------------------REPONSE : Je n'ai jamais entendu parler de cela et je n'ai rien vu. Ce qui
me dérange dans ce témoignage sont les termes de réfugiés et tubes lance
missiles. Vu le monde qui gravitait là autour, pourquoi des réfugiés et quels
réfugiés. Peut être des Tutsis qui se cachaient des extrémistes Hutus? En ce
qui concerne les tubes lance missiles, si le témoin parle de conteneur de
missile pourquoi pas. Mais étant donné le coût d'un poste de tir anti aérien,
j'ai du mal à croire que les tireurs les ont abandonnés sur place.--------------------QUESTION : A quelle date avez-vous été évacué du Rwanda ?-------------REPONSE : J'ai quitté le Rwanda le 12 avril 1993 vers 19 heures.

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--- QUESTION : Possédez-vous des photos prises juste avant, pendant ou
juste après l'attentat?
---REPONSE : Non, la vue du cauchemar suffisait.--------------------------------------------------------------------------------------------------

QUESTION: Avez-vous quelque chose à ajouter, modifier ou
retrancher à vos déclarations ?---------------------------------------------------------L'expérience que j'ai acquise dans le domaine aérien au cours de ma
carrière militaire et lors du crash du DC10 d'UTA au dessus du Ténéré en
1989, me permet de vous livrer les analyses suivantes : ---------------------------"

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--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO. -- --- page 10 ---------------------------PV 579/2008/
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En ce qui concerne la phase du tir du missile, mon analyse est la suivante:
---Contrairement à ce qui a été dit et écrit, je ne soutiens pas la thèse du tir de
deux missiles. En tout cas, il est certain qu'un seul missile a atteint le Falcon.
Ma maison était très proche du crash et, pour ma part, je n'ai entendu que deux
explosions. C'est-à-dire, à mon avis: «une première explosion lorsque le
missile a touché l'avion et une seconde plus grosse, provoquée par
l'embrasement du kérosène, lorsque l'avion a percuté le mur de l'enceinte de
la résidence présidentielle ». --------------------------------------------------------------Par ailleurs, je connais un peu la mise en oeuvre de l'arme, supposée avoir
été utilisée. En aucun cas elle ne permet de tirer des missiles en rafales. Par
conséquent, le temps de recharger le poste de tir, de reprendre la visée et
d'acquérir la cible, l'avion est déjà loin et hors de portée. Si deux missiles ont
été tirés, il y avait forcément deux postes de tir. D'autre part, le départ du coup
d'un tir de missile, ne fait pas un bruit aigu comme un coup de fusil. Ce bruit,
ressemble un peu au sifflement d'une fusée de feu d'artifice. Avec l'abondance
de la végétation, il fallait être relativement près pour l'entendre. ----------------------Ceux qui prétendent avoir entendu des départs de missiles, à l'intérieur
d'une maison ou l'extérieur à plus de 500 mètres de l'emplacement supposé,
racontent des bêtises. Par contre ce qui pouvait être parfaitement visible, c'est
la flemme laissée par le propulseur du missile sur sa trajectoire.---------------------Je connais bien le terrain du camp, car je l'ai parcouru dans tous les sens
avec mes CRAP, lors d'exercices. Dans l'hypothèse d'un tir à partir de la zone
de l'ancien cimetière, le missile serait passé au dessus de ma maison ou de ses
abords immédiats, car elle se trouvait entre le cimetière et la zone du crash et
en dessous de l'axe d'une trajectoire éventuelle du missile. Par ailleurs, la
distance pour tirer sur un avion, tous feux éteints à partir de cette zone, me
paraît bien trop importante et l'emplacement bien trop en avant de la zone du
crash
-- -J'ai aussi la conviction que dans l'hypothèse d'un tir à partir de cette zone, le
missile aurait forcement touché l'avion de trois quarts avant et l'aurait fait
exploser en vol. Les débris auraient alors été dispersés sur plusieurs centaines
de mètres et les corps des passagers auraient eux aussi été dispersés,
déchiquetés et brûlés, hors ce n'est pas ce que j'ai constaté sur place.
-- -Une autre certitude vient aussi argumenter mon analyse. À environ 300
mètres de ma maison, au milieu des champs de canne à sucre, il y avait un
poste de garde où se trouvait en permanence une sentinelle du bataillon para. Si
cette hypothèse s'était réalisée, le parachutiste de faction aurait forcément vu
passer le missile. Si tel avait été le cas, nous coopérants français, nous l'aurions
obligatoirement su.
---L'autre hypothèse avancée, suppose : «que le tir a été effectué à partir de la
ferme de Masaka ou de ses environs », cela me paraît beaucoup plus réaliste,
car cette zone est bien plus près de l'axe de vol et bien en arrière du lieu du
crash. Par conséquent, mon expérience me permet de dire qu'à partir de cet
emplacement, le tireur a parfaitement eu le temps de prendre l'avion en
compte, de le suivre pour que le missile soit en mesure d'acquérir sa cible et
d'appuyer sur la détente pour la mise à feu. C'est comme cela, que l'on procède
pour tirer sur un avion avec un missile. Sans cette phase de prise en compte et
d'acquisition de la cible par le missile, de quelques secondes avant le tir, le
.

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--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO. -- --- page 11 ---------------------------PV 579/2008/
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tireur n'a aucune chance de guider le missile sur sa cible. Par ailleurs, cette
hypothèse confirme mon analyse, c'est-à-dire : «que l'avion a été touché dans
sa partie arrière, qu'il n'a pas explosé en vol et qu'il est arrivé au sol entier, à
plat, ou en léger décrochage arrière ». ---------------------------------------------------Un autre fait est lui aussi sûr, que les auteurs de l'attentat soient des rebelles
du FPR ou des extrémistes hutus, l'attentat a du être commis par un spécialiste
en missiles formé à l'étranger. Cela confirme encore la thèse que le tireur ne
devait pas être très éloigné, car plus on s'éloigne de la cible plus il est difficile
de l'atteindre. Par ailleurs, quel que soit la distance, il faut être un tireur
confirmé pour arriver à guider de nuit un missile sur un avion, car plusieurs
phases doivent être accomplies avec une extrême précision. -------------------------Je suis persuadé que le tireur était très expérimenté et entraîné, ou alors la
seule explication que l'on puisse donner, c'est que c'était vraiment son jour de
chance. La probabilité pour un tireur, non entraîné, d'abattre un avion de nuit
avec un missile tiré à partir d'un poste de tir porté par un homme, est à mon
avis, à peu près la même que celle de gagner au loto. Alors quel camp avait la
possibilité de former à l'étranger des tireurs aussi expérimentés? La réponse à
cette question désignera les grands responsables de l'attentat.----------------------Une autre certitude que j'ai : « je ne peux pas croire que le tir s'est fait à
l'aveugle sur un avion non identifié. Les têtes pensantes de l'attentat et les
tireurs du missile, étaient parfaitement renseignés sur l'heure d'arrivée du
Falcon à Kigali ». Par conséquent, ils avaient forcément un informateur qui
participait à la réunion à DAR-ES-SALAAM, qui connaissait ce qu'il s'y était
décidé, l'heure de décollage, l'identité des passagers et l'heure prévue d'arrivée
duFalcon.
-Cet informateur a obligatoirement communiqué ces renseignements à Kigali,
pour qu'une décision soit prise pour la mise en place des tireurs. Il est
impensable qu'ils aient tiré au hasard, de nuit, sur un avion qu'ils n'avaient pas
identifié auparavant.
---Par ailleurs, une personne seule ne peut pas servir un poste de tir anti-aérien.
Il y avait obligatoirement plusieurs personnes sur l'emplacement du tir. Or,
l'emplacement des tireurs, où qu'il soit, se trouve dans une zone relativement
habitée et il y avait beaucoup de gens qui gravitaient là autour. Une mise en
place de jour des tireurs, sans se faire repérer, avec le ou les missiles et le ou les
postes de tir, me paraît peu probable, voir impossible. Pour moi, la mise en
place sur l'emplacement du tir s'est faite au dernier moment. Cela confirme la
thèse de l'informateur. Si les juges décidaient de chercher, parmi les personnes
présentes à la réunion à DAR-ES-SALAAM, qui pouvait jouer le rôle de cet
informateur, nous apprendrions certainement beaucoup de choses sur le camp
qui a commandité l'attentat.---------------------------------------------------------------

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En ce qui concerne l'analyse de l'impact:
---Je suis certain, que le missile a touché le Falcon 50 dans sa partie arrière et
que l'appareil n'a pas explosé au moment de l'impact du missile. Par ailleurs,
le début de la piste d'atterrissage se trouvait à environ cinq kilomètres et le
Falcon devait être encore assez haut, car je sais que mes copains pilotes, depuis
début février 1994, quand les rebelles du FPR ont tenté de tirer sur notre avion
le «Nord 2501 », à partir du Centre National du Développement, n'effectuaient

D 56

--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO.
- page 12 ---------------------------PV 579/2008/
--

'—

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la descente sur la piste d'atterrissage qu'au tout dernier moment et tous phares
éteints. ----------------------------------------------------------------------------------------Si l'avion avait explosé en vol, au moment de l'impact du missile, ne seraitce qu'à deux cent mètres d'altitude, les débris et les corps au sol auraient été
éparpillés et calcinés. Or ce n'est pas le cas, l'avion était seulement en deux
parties. D'un côté la partie arrière avec les petites ailes, la queue, et la dérive
posée sur le sol et, quelques mètres plus loin, la carlingue et le cockpit qui se
sont écrasés contre lé mur de la résidence présidentielle, après avoir creusé un
sillon au sol. Les corps n'étaient pas brûlés et étaient, eux aussi, groupés sur
une vingtaine de mètres en avant du cockpit. Il est certain, qu'ils ont été éjectés,
lorsque l'avant de l'appareil s'est disloqué en percutant le mur de la résidence.---Je suis quasiment certain que le missile n'a endommagé qu'une toute petite
partie de l'arrière de l'avion, juste derrière les ailes. Cela a eu pour
conséquence de le stopper progressivement dans son vol et de le faire décrocher
légèrement vers l'arrière, jusqu'au moment où il a touché le sol. Ceci explique
le fait que la carlingue se soit cassée, probablement à l'emplacement de
l'impact du missile et juste en arrière des ailes, lorsque l'appareil a touché le
sol. C'est à mon avis la seule explication possible à la position au sol
parfaitement à plat et sans cratère de toute la partie arrière de l'appareil et le
fait que le reste de la carlingue ait poursuivi sa trajectoire, jusqu'à venir
s'écraser contre le mur de la résidence du président et exploser par
l'enflamment du kérosène.
---Mon analyse est encore confirmée par le fait que, contrairement au crash du
DC-10 d'UTA dans le Ténéré, aucun débris n'était planté dans le sol. Il est
dommage qu'aucune enquête, n'ait été réalisée sur ce crash dans les tous
premiers jours. Néanmoins, je pense que les spécialistes en aéronautique,
peuvent facilement confirmer mes dires.------------------------------------------------------------------------------------------------------------

En ce qui concerne la possession des missiles :
- --Ce que je peux affirmer c'est qu'à ma connaissance, il n'y avait pas de
missiles air-sol d'origine russe, et encore moins de missiles mistral français en
dotation dans l'armée régulière rwandaise.
---Par contre, le FPR en possédait. Si tel n'était pas le cas, les casques bleus de
la MINUAR, lorsqu'ils nous ont dit s'être interposés, afin d'empêcher des
éléments du FPR de tirer des missiles sur notre avion Nord 2051, en février à
partir du toit du CND, nous ont menti. ---------------------------------------------------La journaliste anglaise, Linda Melvern, a écrit dans le journal «Libération »,
qu'après des années d'errements dans les archives de l'ONU, elle a retrouvé un
rapport signé du général Roméo Dallaire (commandant en chef des forces de
l'ONU au Rwanda), daté du 6 avril 1994 et rédigé par des observateurs
militaires de la MINUAR. Linda Melvern dit que dans la liste des armements
détenus par l'armée rwandaise avant le 6 avril, les observateurs de la MINUAR
notent la présence d'un nombre "indéterminé de missiles sol-air de type SA-7
de fabrication russe et de 15 missiles sol-air Mistral français' . Excusez du
-------------------------------------------

peu
---Madame Linda Melvern, le gouvernement rwandais, même s'il en avait eu la
volonté, n'avait pas les moyens de s'offrir un tel arsenal. Il n'avait même pas
les moyens d'offrir une arme individuelle à tous les soldats. Mes prédécesseurs
.

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9 86
--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO. ----'^
- page 13 ----------------------------------------------------------- PV 579/2008/
ont eu un mal fou, pour arriver à obtenir des armes à peu près correctes pour les
équipes CRAP. ------------------------------------------------------------------------------Par ailleurs, les rebelles du FPR ne possédaient, ni avions, ni hélicoptères.
Pourquoi voulez-vous que le gouvernement rwandais achète des missiles antiaériens ? Par contre, le FPR avait de bonnes raisons d'en posséder, car l'armée
régulière rwandaise, avait des avions et des hélicoptères. Par ailleurs, les chefs
du FPR, via l'Ouganda, disposaient d'un réseau pour l'acquisition de ce type
d'armes. ---------------------------------------------------------------------------------------Pourquoi cette journaliste anglaise vient-elle rapporter des faits non vérifiés
au journal français «Libération»? Puisqu'elle a réussi à se rendre aux Etats
Unis pour fouiller dans les archives de l'ONU et si l'attentat du 6 avril
l'intéresse vraiment, pourquoi ne va-t-elle pas fouiller dans les archives
rwandaises ? Si les missiles ont bien existé et même s'ils ont disparus, il doit
bien en rester une trace quelque part. ----------------------------------------------------Mon emploi du temps au Rwanda, ne m'a pas permis de prendre beaucoup
de contacts avec mes collègues coopérants du détachement d'hélicoptères.
Néanmoins, comme ce détachement possédait deux ou trois hélicoptères, peut
être qu'il possédait aussi quelques missiles, air-sol, pour les armer. Mais cela
n'est pas du tout, la même chose. Pourquoi accuse-t-on, une fois de plus, la
France de tous les maux, sans aucune certitude et sans chercher à savoir ce qui
s'est passé du côté du FPR et du soutien que certains pays lui ont apporté? ------Peut-on croire que Monsieur KAGAME ait financé une armée de 15 000
hommes, pendant des années avec ses propres deniers. Où a-t-il été chercher
l'argent nécessaire pour acheter toutes ces armes, payer ses hommes, les nourrir
etc. ? Je sais bien qu'il faut un bouc émissaire, mais c'en est trop. ----------------

En ce qui concerne les auteurs de l'attentat :
---L'auteur du tir, je ne sais pas avec une totale certitude s'il est tutsi du FPR
ou extrémiste hutu. Néanmoins, il est clair que pour prendre le pouvoir, Paul
KAGAME, chef du FPR et actuel président du Rwanda, avait décidé de se
débarrasser du président HABYARIMANA depuis le début du conflit. Le
gouvernement de transition ne l'intéressait pas. À mon avis, les accords
d'ARUSHA, c'était un faux prétexte pour faire partir les troupes françaises et
entrer avec ses 600 premiers rebelles dans Kigali. Il savait très bien que les
extrémistes hutus n'accepteraient jamais l'entrée de tutsis au gouvernement. -----Par ailleurs, il savait que les militaires hutus de l'armée régulière rwandaise
en avaient ras-le-bol de la guerre. Il savait qu'ils étaient prêts à intégrer les
rebelles du FPR dans leurs rangs. Cependant, Monsieur Kagamé, ne voulait
surtout pas que cela se réalise. Que lui resterait-il comme moyen de pression,
une fois ses troupes intégrées dans l'armée régulière, le président
HABYARIMANA toujours au pouvoir et quelques Tutsis au gouvernement ?----Ma question est la suivante: « connaissez-vous un chef militaire capable de
se débarrasser de son armée, encore en mesure de combattre, juste avant de
gagner la guerre, ou en l'occurrence dans notre cas, avant de prendre le
pouvoir»? Paul KAGAME, savait très bien qu'il lui fallait prendre le pouvoir
par la force. Il savait qu'en tant que représentant de la minorité tutsie (environ
20% de la population), il n'avait aucune chance de gagner des élections libres,
dans des conditions normales et régulières, face à la majorité hutue.--------------

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56 ---

--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO. --------------------------------- PV 579/2008/
- page 14 ------------------------------Le président Juvénal HABYARIMANA condamnait forcément sa marche
vers le pouvoir. Personnellement, je suis tout à fait d'accord avec la thèse qui
est de dire: « Paul KAGAME a fait tuer Juvénal KABYARIMANA, tout en
sachant que le Rwanda était un baril de poudre ethnique ». -------------------------La thèse que l'attentat est l'oeuvre des extrémistes hutus du « Hutu power »,
qui planifiaient depuis des mois le génocide et véhiculaient leur haine des
"cafards" tutsis sur les ondes de «Radio mille collines », car ils ne voulaient
pas entendre parler de partage du pouvoir, alors que le président
HABYARIMANA s'apprêtait à le faire, me paraît peu probable. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------La haine anti-Tutsis existait, et elle était même très profonde chez les
extrémistes hutus du « Hutu power », malgré cela, très sincèrement, je ne pense
pas qu'ils avaient la carrure pour abattre le Falcon. Ils n'avaient, à mon avis, ni
l'organisation nécessaire, ni comme je l'ai écrit, la possibilité d'avoir des
informateurs à la réunion de DAR-ES-SALAAM, ou à la tour de contrôle, ni
des missiles et des tireurs formés. Puis je pense qu'un tel acte, relevait de
l'inconscience pour eux. Ils devaient être parfaitement conscients qu'après
l'attentat, et comme cela a été le cas, ils allaient être sous la menace directe du
FPR. Ils connaissaient les ambitions de KAGAME. -----------------------------------Non je ne crois pas à cette thèse. Le « Hutu power », était un mouvement
politique, non armé, en partie opposé au régime de HABYARIMANA. Ses
partisans se préparaient à une réaction d'envergure en cas de prise du pouvoir
par le FPR. Ils n'avaient pas du tout la même soif du pouvoir que KAGAME.
Ils reprochaient seulement au président HABYARIMANA de vouloir intégrer
des Tutsis dans son gouvernement. ------------------------------------------------------À ma connaissance, à aucun moment ils n'ont manifesté une quelconque
volonté de le renverser, ni de le tuer. Si toutefois ils avaient eu cette volonté, ils
n'avaient pas besoin de s'embarrasser d'un scénario d'attentat aussi compliqué,
dont les chances de réussite étaient hypothétiques. Certains membres du
« Hutu power » côtoyaient le président HABYARIMANA régulièrement à
Kigali. À mon avis, en ce qui les concerne, le mobile ne tient pas. Un tel
attentat a été forcément pensé, réfléchi et minutieusement préparé, bien des
mois, voir des années auparavant. ---------------------------------------------------------La thèse supputant que l'armée régulière rwandaise ait abattu l'avion du
président, à partir du camp de KANOMBE, relève à mon avis du pur fantasme.
---Les forces armées rwandaises, mise à part une poignée de hauts gradés
ambitieux pour leur avenir, n'étaient pas du tout impliquées là dedans. Dans
leurs rangs, comme au sein du bataillon para-commando, il y avait quelques
Tutsis. Par exemple, notre meilleur moniteur parachutiste était tutsi et nos
prédécesseurs l'avaient envoyé en France pour suivre une formation. --------------Nous les coopérants français, nous avions tous des employés tutsis et hutus.
Jamais il n'y a eu le moindre problème entre eux. En ville, comme dans le reste
du pays, les populations hutues et tutsies vivaient en bonne harmonie, malgré la
guerre qu'elles subissaient depuis quatre ans. Personnellement je n'ai jamais
entendu traiter un seul Tutsi de cafard. -----------------------------------------------

A mon sens :
---Les pistes à approfondir sont: « qui des extrémistes Hutus ou du FPR

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--- Suite du procès-verbal de déposition de monsieur José DE PINHO. ----- page 15 ----------------------------------------------------------- PV 579/2008/
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étaient en mesure de former des tireurs aussi performants, bien des mois,
voir des années auparavant; qui des deux possédaient réellement des
postes de tir et des missiles sol-air; qui des deux camps avaient la
possibilité d'avoir des informateurs à la réunion à DAR-ES-SALAAM, ou
éventuellement à KIGALI à la tour de contrôle; qui des deux avaient un
mobile suffisamment puissant pour réaliser un tel acte ». ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

---Je ne vois rien à ajouter à mes déclarations ? Par contre, je peux vous
remettre une extraction Google Map de ce jour en vous positionnant mon lieu
d'habitation, mon lieu de travail et d'autres points. ------------------------------------ Après lecture faite par lui-même, le nommé José DE PINHO persiste et
signe avec nous et notre assistant le présent, il est dix sept heures.-------------J. DE PINHO L'Assistant L'Officier de Police Judiciaire

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