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9 avril 2024
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Alain Juppé : « Nous sommes décidés à sanctionner, à punir ceux qui se livrent à de tels massacres »

Numéro : 9918
Date : 16 mai 1994
Auteur : Juppé, Alain
Titre : Interview du ministre des Affaires étrangères, M. Alain Juppé, aux radios françaises à Bruxelles
Source : Quai d'Orsay
Résumé : Pour Alain Juppé, ce qui se passe au Rwanda mérite le nom de génocide et il faut que la communauté internationale passe à la vitesse supérieure en matière d'aide humanitaire et en obtenant un cessez-le-feu. Le ministre des Affaires étrangères considère également qu'« il faut annoncer très clairement que nous sommes décidés à sanctionner, à punir ceux qui se livrent à de tels massacres ».
Commentaire : Alors qu'il affirme qu'il y a un génocide au Rwanda, Alain Juppé n'envisage que l'action humanitaire et la négociation d'un cessez-le-feu. Négocie-t-on avec les auteurs d'un génocide ? Non, on les combat. C'est plus tard que le Quai d'Orsay conviendra que les auteurs des massacres seront exclus des négociations. Le ministre des Affaires étrangères lance ici le mot « génocide » mais en détourne la signification que lui a donnée la Convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide. Cependant, il s'engage au nom de la France « à sanctionner, à punir ceux qui se livrent à de tels massacres » et il précise « dans les zones qui sont tenues par les forces armées rwandaises ». C'est cet engagement qu'il ne tiendra pas lorsque l'armée française, munie d'un mandat des Nations unies sous chapitre VII de la charte, n'arrêtera pas les assassins sur ordre du quai d'Orsay.
Citation:

Rwanda

Q - Le Rwanda. Vous avez parlé tout à l'heure de génocide. Qu'est-ce qu'on peut faire pour le Rwanda, qu'est-ce que la communauté internationale peut faire ? R - D'abord, pousser un véritable cri d'indignation parce que ce qui se passe là-bas mérite, je crois en effet, le nom de génocide. On compte les morts par dizaines de milliers, et même selon certaines informations, par centaines de milliers, les réfugiés par millions. Nous n'arrivons pas à arrêter le carnage puisque malgré toutes les pressions qui ont été faites, les deux camps s'obstinent dans la guerre et refusent tout cessez-le-feu. Il faut donc que la communauté internationale passe maintenant à la vitesse supérieure. D'abord pour l'aide humanitaire : la France a fait, pour sa part, un gros effort vis à vis des réfugiés qui sont au Burundi, mais également par le biais de la Croix rouge internationale au Rwanda même. Il faut que l'Union européenne, elle l'a décidé aujourd'hui, mais également les autres grands pays, puissent intensifier cette aide humanitaire. Deuxièmement, il faut obtenir, le plus vite possible, un cessez-le-feu en utilisant la médiation des pays de la région, certains s'y emploient. J'ai envoyé notre ambassadeur faire la tournée des principales capitales et nous suggérons maintenant un Sommet des pays principalement concernés dans la région pour qu'ils puissent peser de tout leur poids. Et puis enfin, il faut annoncer très clairement que nous sommes décidés à sanctionner, à punir -- c'est le mot qui convient -- ceux qui se livrent à de tels massacres, notamment à Kigali, dans les zones qui sont tenues par les forces armées rwandaises.
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