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Mise à jour :
2 août 2023 Anglais

Rony Brauman : « La garde présidentielle, à l'occasion de l'assassinat de leur Président dont ils sont d'ailleurs eux-mêmes probablement responsables, a lancé le massacre avec des milices bien identifiées et une faction de l'armée »

Fiche Numéro 30252

Numéro
30252
Auteur
Ceylac, Catherine
Auteur
Coste, Patricia
Date
29 avril 1994
Amj
19940429
Heure
24:00:00
Fuseau horaire
CEST
Surtitre
Journal de 24 heures [8:12]
Titre
Rony Brauman : « La garde présidentielle, à l'occasion de l'assassinat de leur Président dont ils sont d'ailleurs eux-mêmes probablement responsables, a lancé le massacre avec des milices bien identifiées et une faction de l'armée »
Soustitre
« Ce que je trouve porteur de très lourds effets pervers, c'est l'ingérence dite humanitaire pratiquée par les États ».
Taille
26904913 octets
Source
Fonds d'archives
INA
Type
Journal télévisé
Langue
FR
Résumé
- Au Rwanda les chiffres s'entrechoquent : on avance le chiffre de 100 à 200 000 victimes et de un à deux millions de réfugiés. Des informations imprécises mais qui s'expliquent par le chaos que connaît le pays : les massacres perpétrés entre deux ethnies rivales qui se disputent le pouvoir et cela depuis des décennies.
- Au Rwanda c'est l'exode. Un exode d'une ampleur telle qu'il a été qualifié de catastrophe humanitaire majeure par la Croix-Rouge. Un demi-million de personnes fuient le pays, franchissent les fleuves. Tous n'ont pas pu passer au Burundi alors ils refluent vers la Tanzanie où le HCR signale des files de huit kilomètres de long.
- Dans les camps se retrouvent toujours les mêmes blessés, la nuque bandée cachant le coup de machette qui a manqué sa cible. Au Rwanda les massacres continuent. D'après un des rares témoins européens encore sur place, un délégué du CICR que nous venons de joindre à Kigali, un nouveau massacre a eu lieu aujourd'hui à Gitarama, au sud de la capitale, là où le gouvernement provisoire s'est replié. Philippe Gaillard : "Je crois qu'il n'y a pas une seule préfecture du Rwanda qui ait échappé aux tueries. On fait la chasse à l'homme, pour des raisons ethniques, pour des raisons politiques".
- Pour des raisons politiques, des réfugiés commencent à oser en parler comme cet homme, l'un des rares opposants au régime en place à avoir pu sauver sa peau. Alphonse-Marie Nkubito : "Ce n'est même pas un massacre ethnique, c'est un jeu politique qui a été joué entre ceux qui ne voulaient pas le changement démocratique, c'est-à-dire la mouvance présidentielle, et l'opposition. En fait la mouvance présidentielle voulait mettre fin à toutes ces velléités de démocratie et ils y sont parvenus. Si on m'attrapait, même aujourd'hui, on me tuerait alors que je suis hutu !".
- Hutu, comme cette femme : l'ancien Premier ministre massacrée dès les premières heures par les extrémistes de sa propre ethnie. Extrémistes qui ne voulaient pas partager le pouvoir avec les Tutsi. Les démocrates hutu ont donc rejoint dans la mort et dans l'exode les Tutsi persécutés.
- Le secrétaire général de l'ONU Boutros Boutros-Ghali propose d'envisager un recours à la force pour arrêter les tueries au Rwanda, "même si cela, dit-il, nécessite des renforts de Casques bleus".
- Rony Brauman : "C'est effectivement une boucherie. Mais ça n'est pas une boucherie qui est due à des affrontements interethniques. C'est une boucherie qui est due à un véritable massacre unilatéral ! Les Juifs et les Aryens, ils ne se sont pas jetés les uns sur les autres pour s'entrégorger. Les Aryens, les Nazis, ont tué des Juifs. Là, vous avez une faction, qui est la garde présidentielle, qui, à l'occasion de l'assassinat de leur Président, dont ils sont d'ailleurs eux-mêmes probablement responsables, ont voulu radicaliser encore un petit peu plus le régime. Et dès que l'avion est tombé, dans les heures qui ont suivi, le massacre a été lancé. Il a été lancé par des milices bien identifiées, par une faction de l'armée et par la garde prétorienne du Président. Et ce sont eux qui sillonnent le pays et qui, à la grenade, à la machette, à la mitrailleuse, tirent sur tout ce qui ressemble à un Tutsi, car ils estiment que les Tutsi c'est un peu les Juifs du Rwanda, et ce qui ressemble à un opposant hutu qu'ils connaissent fort bien car le Rwanda est un petit pays où chacun sait tout sur tout le monde. […] L'ingérence est un faux problème. Lorsqu'une organisation humanitaire privée, indépendante, qui n'a pas d'autre objectif que d'apporter des secours à des hommes et des femmes qui sont en détresse, franchit une frontière, elle ne pratique pas l'ingérence. Au nom du devoir d'initiative humanitaire, elle va porter des secours à des gens qui vont mourir. Lorsqu'un État, en revanche, franchit une frontière, lorsqu'il noue des relations avec un autre État, hostiles, amicales, etc., il fait de la politique. Alors si son ingérence est d'ordre politique, très bien ! À ce moment-là on est dans un autre domaine. Mais ce à quoi je ne crois pas du tout, ce que je trouve porteur de très lourds effets pervers en plus, c'est l'ingérence dite humanitaire pratiquée par les États".