Commentaire
En visite à Kigali, le président de la République française Emmanuel Macron prononce un discours au mémorial du génocide de Gisozi. Sur un ton grave, il dénie d'une part l'implication de la France dans le génocide contre les Tutsi : « Les tueurs qui hantaient les marais, les collines, les églises n'avaient pas le visage de la France. Elle n'a pas été complice. Le sang qui a coulé n'a pas déshonoré ses armes ni les mains de ses soldats ». Mais d'autre part, il s'accorde l'erreur, la maladresse : « La France n'a pas compris que, en voulant faire obstacle à un conflit régional ou une guerre civile, elle restait de fait aux côtés d'un régime génocidaire ». Sa reconnaissance de la responsabilité de la France est pondérée par une déclaration de bonnes intentions : « En ignorant les alertes des plus lucides observateurs, la France endossait une responsabilité accablante dans un engrenage qui a abouti au pire, alors même qu'elle cherchait précisément à l'éviter ». L'argument sonne faux : « À Arusha, en août 1993, la France pensait, aux côtés des Africains, avoir arraché la paix. [...] Ses efforts étaient louables et courageux. Mais ils ont été balayés par une mécanique génocidaire qui ne voulait aucune entrave à sa monstrueuse planification ». La mise en place du Gouvernement intérimaire par le colonel Bagosora en étroite collaboration avec l'ambassadeur de France Jean-Michel Marlaud vient contredire ces bonnes intentions et prouver au contraire que la France a joué un rôle déterminant dans cette mécanique génocidaire. Le Président recourt encore à l'argument de la responsabilité de la communauté internationale, omettant le fait que la France a usé de son siège de membre permanent du Conseil de sécurité pour abuser les Nations unies en feignant de reconnaître le génocide et en permettant à ses auteurs de prendre la fuite. Enfin, on peut faire crédit au Président français de cette phrase : « En me tenant, avec humilité et respect, à vos côtés, ce jour, je viens reconnaître l'ampleur de nos responsabilités ». Il reconnaît « une dette envers les victimes après tant de silences passés ».