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Mise à jour :
2 août 2023 Anglais

À 500 mètres de l'aéroport huit personnes ont été tuées en fin de matinée, au moment même où passait un convoi d'évacués encadré par des militaires français en armes. Lorsqu'une femme tutsi a été assassinée à coups de machettes sous leurs yeux, les soldats n'ont pas bougé

Fiche Numéro 29737

Numéro
29737
Auteur
Bilalian, Daniel
Auteur
Burgot, Maryse
Auteur
Boisserie, Philippe
Auteur
Lebrun, Bernard
Date
11 avril 1994
Amj
19940411
Heure
13:00:00
Fuseau horaire
CEST
Surtitre
Journal de 13 heures
Titre
À 500 mètres de l'aéroport huit personnes ont été tuées en fin de matinée, au moment même où passait un convoi d'évacués encadré par des militaires français en armes. Lorsqu'une femme tutsi a été assassinée à coups de machettes sous leurs yeux, les soldats n'ont pas bougé
Soustitre
Les militaires de la garde républicaine ne font pas que d'embraser les rivalités interethniques. Ils sont aussi accusés de l'assassinat de leur propre Président.
Taille
31932 octets
Nb. pages
5
Source
Fonds d'archives
INA
Type
Transcription d'une émission de télévision
Langue
FR
Résumé
- Le rapatriement des 600 Français qui résidaient au Rwanda, en proie à une guerre civile sauvage et meurtrière, est en passe de se terminer. Il resterait 70 personnes à évacuer aujourd'hui. Et un certain nombre sont déjà arrivés la nuit dernière à l'aéroport de Roissy après une escale en Centrafrique.
- Aéroport de Kigali hier matin [10 avril]. Sous la protection de soldats français, les ressortissants étrangers s'apprêtent à quitter le pays. Nous devrons nous contenter de ces seules scènes de départ pour parler ce matin du Rwanda. Aucune image pour l'instant des combats qui ensanglantent le pays depuis quatre jours.
- Belges, Allemands, Américains, Français, tous les ressortissants étrangers vivant au Rwanda sont en train de quitter Kigali, le plus souvent évacués par avion vers les capitales voisines, Bujumbura ou Bangui.
- Les premiers Français évacués du Rwanda transitent par Bangui avant de regagner Paris. Cette nuit enfin, l'arrivée à l'aéroport de Roissy. L'émotion et la joie de retrouver les siens. Tous sont fatigués mais tous sont soulagés. Un ressortissant français témoigne : "On a passé la nuit de jeudi [7 avril] à vendredi [8 avril] qui était sous les obus, les tirs de mortiers. On n'a rien dormi de la nuit, on a eu très peur".
- Une centaine d'autres Français et Belges ont fui le Rwanda par la route. Ils sont ce matin réfugiés au Zaïre. Un ressortissant belge témoigne : "Ils nous ont tout pris. Moi, on m'a mis la machette devant le nez pour me prendre mes papiers. Mais ce qui nous a surtout fait peur, c'est quand ils ont su qu'on était Belges. Ils en veulent aux Belges".
- Philippe Boisserie : "Ce matin à Kigali les évacuations d'étrangers, et notamment des 70 Français encore au Rwanda, se poursuivent. Dans le même temps se déroulent dans les rues des combats violents ainsi que des massacres sommaires. À 500 mètres de l'aéroport huit personnes ont été tuées en fin de matinée, au moment même où passait un convoi d'évacués encadré par des militaires français en armes. Lorsqu'une femme tutsi a été assassinée à coups de machettes sous leurs yeux, les soldats n'ont pas bougé. Leur mission spécifie clairement qu'ils ne doivent prendre parti pour aucun des belligérants. C'est d'ailleurs cette passivité qui excite la colère de beaucoup d'étrangers sur le départ, et notamment ceux des organisations internationales. […] Une Sœur espagnole nous a raconté comment 17 Rwandais de sa congrégation avaient été assassinés : réunis dans une pièce, les soldats de la garde présidentielle ont jeté une grenade avant d'achever les religieux à coups de fusil. À l'hôpital central de Kigali il reste encore 650 cadavres. D'autres témoignages font état de très nombreuses fosses communes. C'est donc dans une ambiance très tendue que les avions militaires continuent leurs rotations".
- Cette guerre civile qui s'éternise au Rwanda mérite quelques explications quant à son origine. Elle ne remonte pas à la nuit des temps mais au moins à la fin de la colonisation belge. Deux ethnies se disputent le pays et le conflit s'étend à une nation limitrophe : le Burundi, d'où beaucoup de réfugiés sont rentrés l'année dernière, changeant le rapport de force dans ce pays.
- Image d'horreur, images de guerre civile interethnique. Ces cadavres qui reposent à la morgue de Kigali appartenaient à l'ethnie tutsi, minoritaire, 10 % des sept millions d'habitants du Rwanda à majorité hutu. Un minuscule État de l'Afrique centrale. Comme son voisin, le Burundi, cinq millions d'habitants à 80 % Hutu lui aussi. Depuis 30 ans, ces deux anciennes colonies belges jouent les vases communicants de part et d'autre de leur frontière avec leurs minorités. 600 à 900 000 réfugiés selon les sources.
- Au Rwanda les guérilleros du FPR défendent les intérêts tutsi et pro-démocratiques. Face à eux, les soldats de la garde républicaine qui incarnent l'aile radicale de l'intransigeance hutu, pourvoyeur de volontaires pour les escadrons de la mort anti-Tutsi.
- Mais ces militaires ne font pas que d'embraser les rivalités interethniques. Ils sont aussi accusés de l'assassinat mercredi [6 avril] dernier de leur propre Président, Juvénal Habyarimana. Acculé politiquement, il s'était déclaré favorable à l'intégration politique des Tutsi. La chasse à l'homme dans les rues de Kigali cache mal la volonté dictatoriale des militaires hutu qui refusent en bloc le multipartisme et la démocratisation du Rwanda.
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